L’école de l’air de Saintes, un modèle unique en France, qui accueille les élèves dès 16 ans

Mardi 28 septembre 2021 à 19:39 – Par Lise DussautFrance Bleu La Rochelle

Il n’y en a pas d’autre comme elle : l’école d’enseignement technique de l’armée de l’air, basée en Charente-Maritime, à Saintes, est unique. Elle accueille des élèves dès 16 ans, avant même leur bac, qu’ils passeront au sein de l’école. En même temps qu’un autre diplôme, militaire.

Chaque promotion de l'école d'enseignement technique de l'armée de l'air de Saintes compte actuellement  250 élèves.
Chaque promotion de l’école d’enseignement technique de l’armée de l’air de Saintes compte actuellement 250 élèves. – EETAAE722

Le site de l’école de l’air de Saintes, en Charente-Maritime, est entouré d’un grand mur d’enceinte, sur lequel il faut ajouter des barbelés. Bien différent d’un lycée habituel. C’est ici un site militaire, qui accueille et forme 250 élèves chaque année, dès 16 ans. Ce qui est rare. En général, l’armée recrute plus tard, après le bac. 

Les arpètes, c’est ainsi qu’on appelle les élèves, auront deux diplômes à leur sortie. Ils vont passer leur bac ou leur CAP dans l’école d’enseignement technique de l’armée de l’air. En même temps qu’un autre diplôme, celui-ci militaire. 

Beaucoup deviendront mécaniciens 

Les élèves commencent à Saintes à appréhender les avions sur lesquels ils seront amenés à travailler plus tard. Ici, un Alpha Jet de la patrouille de France.
Les élèves commencent à Saintes à appréhender les avions sur lesquels ils seront amenés à travailler plus tard. Ici, un Alpha Jet de la patrouille de France. © Radio France – Lise Dussaut

Le quotidien est bien différent d’un lycée traditionnel. Les élèves se déplacent en section, et en chantant, pour les longs trajets (le site est très grand). Ils sont tous en treillis et en rangers. 

Romain vient d’avoir 18 ans, il voudrait devenir mécanicien sur les hélicoptères Caracal. “La plupart d’entre eux deviendront mécaniciens dans l’armée de l’air”, expose la cheffe des lieux, la colonelle Diane Géribaldi. Elle aussi porte un uniforme, comme presque tout le monde ici, sauf les “civils”, c’est-à-dire, le proviseur, et certains professeurs, comme Nicolas Pin. Il connaît bien les lieux, il y travaille depuis 20 ans : “Ce qui m’a le plus déboussolé au début, ce sont les uniformes. Ce n’est pas facile de distinguer les élèves. Mais on s’y habitue.” 

L'école ne cesse d'évoluer. Elle s'est dotée dernièrement d'un drone.
L’école ne cesse d’évoluer. Elle s’est dotée dernièrement d’un drone. © Radio France – Lise Dussaut

Tout le monde n’a pas 17 de moyenne en arrivant ici

Les élèves viennent de toute la France, y compris d’outre-mer. La colonelle Diane Géribaldi insiste bien sur le fait que tout le monde a ses chances : “Et même si l’on n’a pas 17 de moyenne.” Le recrutement se fait sur dossier. L’année dernière, ils ont reçu près de 800 candidatures pour… 250 places

Et puis, “nous avons 100% de réussite dans les deux diplômes, et ce depuis plusieurs années”, rajoute la colonelle. 

Le poste de pilotage d'un avion de chasse.
Le poste de pilotage d’un avion de chasse. © Radio France – Lise Dussaut
© L'école de l'air de Saintes, un modèle unique en France, qui accueille les élèves dès 16 ans

Actualisation stratégique 2021

Mise à jour  : 05/02/2021 – Auteur : DGRIS – Direction : DGRIS

La ministre des Armées a présenté l’Actualisation stratégique 2021 lors de ses vœux aux armées, le 21 janvier 2021. Ce document actualise l’analyse de notre environnement stratégique à la lumière des évolutions observées depuis 2017.

Comme l’a rappelé le Président de la République dans son discours sur la stratégie de défense et de dissuasion à l’École militaire du 7 février 2020, l’environnement international est devenu plus complexe, plus incertain et plus dangereux. Depuis la Revue stratégique de 2017, et outre la pandémie, qui représente un bouleversement majeur pour les sociétés et les économies, certaines tendances déjà à l’œuvre se sont confirmées, d’autres se sont accélérées, alors que plusieurs éléments de rupture sont intervenus.

Il est donc apparu opportun d’actualiser l’analyse du contexte stratégique auquel la France est confrontée. La ministre des Armées a souhaité que ce travail soit conduit au sein du ministère et coordonné par la DGRIS, en lien avec les armées et autres directions du ministère et en interministériel, mais aussi avec des parlementaires et des experts de la société civile, comme avec les principaux partenaires et alliés de la France, dont certains conduisent des exercices d’analyse similaires.

Cette Actualisation rappelle tout d’abord les grandes tendances à l’œuvre depuis 2017 et l’accélération de plusieurs d’entre elles :

  • compétition entre grandes puissances,
  • généralisation des stratégies hybrides,
  • enhardissement des puissances régionales,
  • effets de rupture liés aux nouvelles technologies, notamment numériques et spatiales.

Elle dresse ensuite le bilan des efforts d’adaptation mis en œuvre, à l’échelon national comme avec les partenaires et alliés, pour faire face aux défis qui se présenteront à l’avenir.

Actualisation stratégique 2021 : Synthèse en dix points
Actualisation stratégique 2021

L’efficacité énergétique sera systématiquement prise en compte dans les programmes d’armement

Par Laurent LAGNEAU – Zone Militaire [Opex360.com]

Exit le Service des essences des armées [SEA]
Et bienvenue au Service de l’énergie opérationnelle [SEO]!
Ce changement d’appellation illustre la nouvelle approche du ministère des Armées en matière de politique énergétique, laquelle passe par une réduction de sa dépendance aux énergies fossiles en misant sur la « sobriété énergétique » ainsi que sur un recours accru aux « nouvelles technologies de l’énergie et aux carburants de rupture. »

Annoncé par Florence Parly, la ministre des Armées, lors d’une visite au Centre de soutien logistique du service des essences des armées [CSLSEA] de Montereau, le 25 septembre, ce tournant ne vise surtout à faire de la transition énergétique un atout pour les opérations menées par les forces françaises. « Il ne s’agit pas de surfer sur la ‘vague verte’ », a-t-elle en effet affirmé.

Au moins trois facteurs plaident en faveur de cette approche.
Le premier est qu’il s’agit de sécuriser les approvisionnements en ressources énergétiques, lesquelles font « l’objet d’une compétition internationale accrue », sur fond de « tensions géoéconomiques et géopolitiques qui ébranlent le marché pétrolier mondial », explique le ministère des Armées.

D’où, par conséquent, la nécessité « d’explorer toutes les nouvelles technologies de l’énergie [stockage, énergies renouvelables] et les carburants de nouvelle génération [biocarburants, hydrogène], afin de sortir de la dépendance au pétrole en matière de mobilité, au niveau tactique comme au niveau stratégique », poursuit-il.

Un deuxième élément à considérer est budgétaire : réduire la consommation des énergies fossiles devrait théoriquement faire baisser la facture des armées dans ce domaine. Ainsi, en 2019, ces dernières ont consommé 835.000 m³ de produits pétroliers, pour un coût de 667 millions d’euros.

Enfin, le dernier facteur est d’ordre opérationnel, avec une empreinte logistique moindre et des véhicules plus discrets.
Pour cela, indique la stratégie énergétique du ministère des Armées, il sera désormais question d’inclure systématiquement dans les programmes d’armement des « exigences d’écoconception et d’efficacité énergétique. » Ainsi, « l’ensemble de leur cycle de vie sera analysé à l’aune de leur impact environnemental et de leur consommation énergétique », précise-t-elle.

« Le ministère va recourir plus largement aux nouvelles technologies de l’énergie [gestion optimisée, hybridation, énergies renouvelables] et aux carburants de nouvelle génération [biocarburants, hydrogène] tant pour la mobilité que pour le stationnement. Cela permettra une meilleure performance opérationnelle, ainsi qu’une résilience énergétique accrue », lit-on dans le document.

Pour les blindés de l’armée de Terre, par exemple, il s’agira de les doter d’une motorisation hybride, ce qui permettra « d’accroître la performance et la furtivité », estime le ministère des Armées. D’autres, avant lui, ont lancé des initiatives similaires, comme son homologue britannique.

« L’intérêt et la faisabilité du couple moteur diesel/moteur électrique ont été démontrés, avec des gains de carburant [allant jusqu’à 10-15%] et des gains opérationnels [boost de performance, furtivité, résilience…] », fait-il valoir.

Aussi, dés 2022, un « démonstrateur d’hybridation de blindés » sera mis au point en 2020, afin de « founir les critères de choix pour la motorisation des Griffon et VBCIqui seront livrés à horizon 2028-2030 », précise le document du ministère des Armées.
À noter qu’Arquus s’est déjà engagé dans cette voie avec son VAB Electer qui, présenté en août 2017, a parcouru 5.000 km [dont 800 km sur sable] sans aucune panne durant une campagne d’essais de 18 mois.

S’agissant du secteur aérien, qui représente 50% de besoins énergétiques du ministère des Armées, le recours aux biocarburants est, pour le moment, la meilleure option disponible. L’objectif est de porter, à l’horizon 2030, à 5% la consommation de biocarburants.
Puis à 50% d’ici 2050, afin d’atteindre « la neutralité carbone ».

« L’objectif est d’intégrer progressivement ces molécules dans les carburants fossiles utilisés par les vecteurs aériens militaires français qui ont reçu l’agrément pour l’emploi de ces biocarburants », explique le ministère des Armées.

En outre, afin de réduire la consommation de carburants, le recours à la simulation, avec un « niveau de réalisme garanti », pour l’entraînement du personnel navigant sera accru. Les carnets de vol seront donc moins étoffés que par le passé…

Enfin, pour le domaine maritime, et hormis ceux à propulsion nucléaire [porte-avions et sous-marins], les navires de la Marine nationale utilisent exclusivement du carburant diesel marine
[F-76 et DMA, ndlr]. Aussi, indique le ministère, « le rendement
énergétique des futurs navires fera également l’objet d’améliorations dès la conception [hydrodynamisme, consommation électrique ajustée, capacités de production mieux rentabilisées et réseau de distribution optimisé], sans perdre de vue la nécessaire redondance des équipements et la réserve de puissance indispensable.
 »

Si la taille et les missions de ces prochains navires seront prises en compte, l’idée est de privilégier les « architectures tout électrique » quand cela sera possible.
En attendant, le programme des futurs Patrouilleurs outre-Mer [POM] « inclut la composante efficience énergétique ».
De même que celui relatif aux Patrouilleur océanique [PO], pour lequel un groupe de travail sera mis en place pour aborder la question. Ses « conclusions entreront dans les critères de choix sur l’architecture » de ces navires.

Documentation relative au SEO :
SEO : Dossier de Presse du 14 juillet 2021
SEA : Rapport du groupe de travail énergie (2000)
SEA : Stratégie énergétique de Défense (2020) – 10 points clés
SEA : Stratégie énergétique de Défense (2020) – Dossier de presse

© Ministère des Armées

IHEDN – Session régionale en Nouvelle-Aquitaine

Bonjour à tous.

Comme évoqué récemment, je vous confirme que la prochaine session régionale IHEDN se tiendra en Nouvelle-Aquitaine début 2022.

C’est l’IHEDN qui en a fixé les dates de même que les sites retenus et c’est la Zone de défense à Bordeaux qui en établit le programme. Les DMD départementaux en sont leurs représentants. L’AR-18 participe activement à cette mise en place.

Pour le moment, rien n’est figé, mais il semble maintenant acquis que nous hébergerons à La Rochelle la première semaine de session qui se déroulera du 25 au 28 janvier 2022 (les dates viennent d’être modifiées une première fois) avec des déplacements programmés en Charente. Lors de sa présidence, Jean Claude DUCHET a fait valoir que des programmations de visite en Deux-Sèvres et dans la Vienne pourraient également être envisagées. Je ne sais pas si nous serons entendus…

C’est bien évidemment l’occasion rêvée pour nous de recupérer des auditeurs au niveau de notre AR.

Pour votre information, les préfets territoriaux ont reçu notification officielle de cette session régionale dont je vous transmets la plaquette.
[NDR : Téléchargement possible en fin d’article]

Me concernant, je vais transmettre un courrier au Préfet 17 pour l’assurer de notre engagement dans l’organisation de cette session. Dans le courrier transmis, j’y joindrai  la dernière revue défense transmise par Marc FIARD lors de l’AG et qui traite notamment des sessions nationales et régionales.

Pour le moment, et en fonction de l’évolution (nouvelles visites de sites en Deux-Sèvres et en Vienne…),  l’équipe régionale d’organisation pour l’AR-18 est composée de Catherine HERAULT, Jean-Claude DUCHET, Paul MORIN et Dominique FAURE.

[…]

Soyons actifs  pour contacter des relations qui pourraient participer à cette session. Un point important, c’est bien évidemment le coût de 1 600 euros avec les à côtés. Cependant, et pour ceux qui le peuvent, une grande partie des frais peut être assurés par les administrations et les entreprises dans le cadre des crédits de formation dont vous trouverez le code dans la plaquette.

Amitiés à tous

Paul MORIN Président de l’AR-18 (Potou-Charentes)

Plaquette de la 225e Session régionale en Nouvelle-Aquitaine

Déroulement : 3 semaines du mardi matin au vendredi après-midi.

  • Séance d’ouverture : mardi 25 janvier 2022 à La Rochelle
  • Semaine 1 : mardi 25 au vendredi 28 janvier 2022 à La Rochelle
  • Semaine 2 : mardi 1er au vendredi 4 février 2022 à Limoges (internat)
  • Semaine 3 : mardi 15 au vendredi 18 février 2022 à Brive-la-Gaillarde
  • Semaine 4 : mardi 22 au vendredi 25 février 2022 à Bordeaux

Il nous faut renouer avec la puissance

Entretien avec le général Vincent Desportes réalisé par Elouan Picault.
Gavroche le 16 avril 2021

Vincent Desportes est général de division. Diplômé de l’Ecole Spéciale Militaire de Saint-Cyr, il a exercé de nombreux postes à responsabilité au sein des armées. Il fut notamment attaché militaire auprès de l’ambassade de France aux Etats-Unis et directeur de l’Ecole de Guerre entre 2008 et 2011. Docteur en histoire, il est aujourd’hui conférencier international et enseigne la stratégie à Sciences Po et HEC.

Pouvez-vous nous dresser un tableau de l’état des armées françaises aujourd’hui ?

Nous avons des armées qui sont à la fois extrêmement professionnelles et compétentes, mais qui ne le sont que pour des actions relativement ponctuelles, sur des durées de temps courtes. Nous sommes capables du meilleur, mais uniquement ponctuellement dans le temps et dans l’espace. Nous sommes face à une vraie difficulté parce que nous avons une armée construite sur la base des décisions prises par le président Chirac en 1996 : passer d’une armée de conscription à une armée professionnelle.

Celle-ci est basée sur un modèle simple : la bombe nucléaire et une force expéditionnaire très limitée dans son volume. Cette force expéditionnaire fut pensée pour défendre la sécurité des Français à l’extérieur du territoire national, mais uniquement dans des guerres d’escarmouche, et pas beaucoup plus que ça. Seulement, ce modèle n’a pas tellement évolué depuis 25 ans alors que les menaces, elles, changent. La guerre de haute-intensité, voire les conflits majeurs, redeviennent un horizon possible. L’armée français a beau avoir été excellente dans les guerres qu’elle a conduit ces dernières années, elle risque de l’être beaucoup moins à l’avenir.

Vous avez déclaré dans un de vos entretiens que les armées françaises sont « capables de coups tactiques mais plus de victoires stratégiques ». Est-ce que vous pouvez nous expliquer cette nuance ?

C’est un peu ce que je viens de dire. Nous sommes capables de gagner des batailles d’une ampleur limitée -ce que nous faisons tous les jours et de manière excellente au Sahel- mais nous ne sommes plus capables de conduire des guerres et de les mener à leurs résultats. Plus globalement, la question se pose de savoir si l’Occident est encore capable de le faire, puisque toutes nos dernières guerres ont été au mieux des impasses, parfois des échecs.

Au niveau tactique nous savons être les meilleurs, nous sommes absolument excellents, mais on constate que les victoires stratégiques ont du mal à advenir au-delà de la bataille. C’est particulièrement visible au Sahel, où nous gagnons des batailles tous les jours, mais où la guerre est très loin d’être gagnée. Pour la bonne raison d’ailleurs que les problèmes de guerre ne sont jamais des problèmes militaires, mais des problèmes politiques, et que les conditions politiques de transformation des résultats tactiques en résultats stratégiques ne sont pas réunies.

On assiste, depuis le début du quinquennat Macron, à un rehaussement du budget des armées après une longue dégradation. Où en est-il aujourd’hui ?

A partir du début des années 2000 a éclaté l’évidence de l’inadéquation du budget des armées vis-à-vis des guerres qu’on les amenait à faire. Ce fut visible à partir de la présidence Sarkozy, et plus encore de la présidence Hollande. Je m’étais à ce moment-là donné la mission, avec d’autres, de faire évoluer la situation de manière à ce que nos soldats aient au moins de quoi combattre et que la France soit défendue à minima.

Pour comprendre le rehaussement du budget des armées, il faut d’abord se demander pourquoi il y a eu dégradation. Il y a eu dégradation car il y a eu l’illusion de la disparition de la guerre. Ce fut profondément le cas en Europe, car l’Europe a tué la guerre sur son sol. Nous avons alors fait l’erreur de le généraliser au reste du monde : parce que la guerre avait disparu chez nous, elle devait avoir disparu ailleurs. La chute du mur de Berlin nous a ensuite fait croire, selon l’expression de Fukuyama, à « la fin de l’Histoire ». L’effondrement de l’Union soviétique devait avoir éradiqué la guerre. Or, assez rapidement, est venue l’évidence que notre monde était particulièrement violent. Si nous arrivions à prévenir le conflit sur le sol européen, nous n’empêchions nullement les autres de s’entre-déchirer. Depuis, les escarbilles de la violence nous ont rattrapé, y compris chez nous.

A partir de 1989, les budgets de la défense se sont dégradés régulièrement. Pourquoi ? Pour une raison simple : même s’ils aimaient leur armée, les Français ne croyaient plus en sa nécessité. Dès lors, les gouvernements français n’ont eu aucune difficulté à prélever de l’argent au ministère des Armées pour aller le redistribuer ailleurs, notamment dans le social. Cette affaire-là s’est accélérée considérablement sous la présidence Sarkozy, pendant laquelle 25% des forces armées ont été détruites. Même chose sous la présidence Hollande, sous laquelle l’intendance fut la même. Nous nous sommes donc retrouvés sur une pente descendante au moment où les conflits se sont multipliés. Tout a changé très vite. Le président Chirac avait eu le bon sens de ne pas engager trop fortement la France en Afghanistan, guerre qui ne pouvait être que perdue, preuve en est faite depuis. Or, le président Sarkozy a fait exactement l’inverse : il a engagé la guerre en Libye et a lancé un mouvement de ré-investissement de l’armée dans les crises. Cette entreprise s’est accélérée sous François Hollande, avec les interventions au Sahel et en Centrafrique. La situation était plus que paradoxale : le budget de la défense descendait au moment où l’engagement des armée croissait.

Est né à ce moment-là un mouvement chez un certain nombre de Français responsables, dont je m’honore d’avoir été, pour dénoncer cet état de fait. Deux phénomènes ont fait bouger les lignes. D’abord Daesh, qui a été d’une certaine manière la prise de conscience du danger. A partir de 2015, les courbes du budget ont cessé d’être descendantes et se sont aplaties. Le président n’a pas ré-augmenté les budgets, mais il a diminué la décroissance avant d’y mettre un terme. Et puis s’est rajouté un événement-déclencheur ; la démission du général Pierre de Villiers de son poste de chef d’Etat-major des armées, crise dite « du 14 juillet 2017 ». Au lendemain de celle-ci, Macron a perdu près de 10 points d’opinions favorables, ce qui est tout à fait énorme. Cela montre que les Français considèrent qu’on ne peut pas « taper » sur le plus haut dignitaire des armées de cette façon. Emmanuel Macron en a tiré quelques enseignements. D’une part, on ne peut pas trop tirer sur la corde car il arrive un moment où elle casse. D’autre part, à force de maturité, il a compris que si lui-même voulait exister sur la scène internationale, il aurait besoin d’une armée forte.

En faisant voter la loi de programmation militaire 2019-2025, il a redonné un peu d’air aux armées. Le budget de la défense ré-augmente de manière régulière. On commence enfin à avoir des pièces de rechange, des munitions et des quais pour nos bateaux. Pour autant, nous sommes toujours loin du compte : moins d’un char sur deux peut rouler, moins d’un avion sur deux peut décoller, moins d’un hélicoptère sur trois peut être déployé et moins d’un bateau sur deux peut prendre la mer. L’important c’est que cet effort ne diminue pas et que les promesses du président Macron soient tenues. D’abord par lui-même (et je pense qu’il le fera), mais aussi par son successeur.

L’inverse serait absolument dramatique, puisque partout le monde se réarme. Les guerres redeviennent de plus en plus probables. Les pays n’hésitent plus à s’entre-déchirer. On le voit avec l’Azerbaïdjan, qui conduit une véritable guerre de conquête -guerre qu’on avait cru oublié depuis 1945- en Arménie. On voit que les démarches d’empire reprennent. Je pense à la Russie avec la Géorgie et l’Ukraine. Je pense évidemment à la Turquie, et je vous rappelle qu’heureusement la France a une marine encore capable de déplacer quelques bateaux. C’est ce qui a permis d’arrêter M. Erdoğan dans l’aventure très dangereuse qu’il poursuivait vis-à-vis de la Grèce en mer Egée l’été dernier.

On en entend justement beaucoup parler de la Turquie en ce moment, notamment du fait de ses opérations en Méditerranée. Est-ce qu’on peut considérer la Turquie, malgré son appartenance à l’OTAN, comme un adversaire militaire ?

La véritable question est de savoir si la Turquie est un partenaire de l’OTAN. Il serait temps que l’alliance atlantique, qui est une organisation parfaitement dangereuse pour la paix dans le monde, s’interroge sur elle-même. Un de ses membres peut-il acheter un système de défense anti-aérien S-400 russe incompatible avec les système atlantiques ? Peut-il menacer impunément un pays européen, la Grèce, par ailleurs lui-même membre de l’organisation ?  Peut-il s’engager en Libye aux risque d’aller contre les intérêts français, sans même nous en avertir, et menacer nos navires en Méditerranée ?

Il est clair que la Turquie ne peut plus aujourd’hui être considérée comme un allié. Il faut que l’OTAN tienne acte des faits et non des promesses turques. Il n’existe pas de règles d’exclusion au sein de l’alliance, mais les règles se changent. Le droit est le produit de la volonté politique. Si on le voulait, on pourrait exclure la Turquie et il faudrait le faire.

Est-ce que la Turquie est un adversaire ? J’espère que non, mais en tout cas c’est un pays qui, comme la Russie, ne comprend que la force. On l’a bien vu en mer Egée l’été dernier, où c’est bien M. Macron qui a fait reculer M. Erdoğan en étant le seul, reconnaissons-le, à avoir du courage pour l’Europe. Il en est dans cette affaire comme de toutes les guerres : quiconque se refuse à la voir venir finit par être rattrapé par elle. Le Si vis pacem para belum [Si tu veux la paix, prépare la guerre, ndlr] a toujours été vrai et l’est encore. C’est pour ça qu’il est absolument important que la France se dote des moyens d’assurer ses défense. Et, ne pouvant le faire au niveau national pour des raisons budgétaires, elle n’a pas d’autres choix que de pousser à la construction de l’autonomie européenne de défense.

Qu’est-ce que l’autonomie stratégique, que vous appelez de vos vœux pour nos armées ?

L’autonomie, ça veut dire la liberté. Aujourd’hui, la France ne peut pas conduire d’opérations dont les Américains ne souhaiteraient pas l’existence. Nous combattons au Sahel uniquement parce que nous bénéficions du renseignement américain et du ravitaillement en vol américain. Nous n’aurions pas pu faire l’opération Serval au Mali sans leur capacité de transport logistique.

Nous n’avons donc pas de véritable autonomie. Nous ne sommes pas un pays libre, mais plutôt un protectorat, puisque notre défense suppose le soutien des Etats-Unis. C’est un fait. Le général De Gaulle avait compris dès 1958 que ce protectorat était dangereux et que nous devions être capables d’exercer notre défense comme nous l’entendons, où nous l’entendons, contre ceux que nous considérons être nos ennemis. Ce n’est plus le cas de nos jours. Or, je pense qu’il est vital que l’Europe joue son rôle de tiers-parti capable d’apporter la stabilité au monde. Ce que nous ne serons pas capable de faire tant que nous serons sous protectorat américain, incapables de conduire une politique étrangère autonome.

En quoi nos intérêts divergent-ils avec ceux des Etats-Unis et qu’en est-il de l’alliance atlantique ?

Je pense qu’il faut regarder les dynamiques à l’œuvre et voir comment elles vont transformer le monde. Il y a une tendance qui est strictement inéluctable, c’est la pacification -au sens de l’océan Pacifique- des Etats-Unis. On se rappelle qu’Obama a dit « je suis le président du Pacifique » et non « je suis le président de l’Atlantique ». Aujourd’hui, Kamala Harris n’a pas beaucoup plus de liens avec l’Europe qu’en avait Obama. Nous assistons à une dérive des continents. Le lien charnel qui unissait les Etats-Unis à l’Europe est très distendu. Nous ne sommes plus des cousins germains, mais au mieux des cousins issus de germain. L’Amérique n’est plus caucasienne. Elle est de plus en plus d’origine hispanique, africaine et asiatique. En 2040, la majorité des Américains n’aura plus aucune racine européenne. Donc le réflexe habituel de défense de la grand-mère patrie aura disparu à cette date. Il faut qu’à ce moment-là nous soyons capables de nous défendre.

De plus, une des raisons pour laquelle les Etats-Unis sont venus en Europe en 1917 et 1943 est la pression exercée par les hommes d’affaires sur les présidents Wilson et Roosevelt. Mais désormais ceci est de moins en moins vrai, il n’y a plus autant de marchés à conquérir. Et c’est comme ça.

La divergence des intérêts stratégiques américains et des intérêts stratégiques français est une tendance fondamentale. Le soldat Ryan ne reviendra plus jamais mourir sur les plages européennes. Nous n’avons pas d’autres choix que de nous défendre nous-mêmes. Penser aujourd’hui que l’OTAN est la survie de l’Europe, c’est avoir une pensée tactique à 4 ou 5 ans. La défense de nos nations passe par l’autonomie, autonomie qui ne peut plus exister au niveau national pour des raisons budgétaires. Une puissance moyenne ne peut plus se doter d’un système de défense cohérent, comme ce fut le cas jusqu’au milieu du XXème siècle. On ne peut plus constituer une capacité d’action substantielle dans les cinq espaces d’affrontement ; terre, mer, air, espace et cyber. Ça coûte trop cher. Chaque nouvelle génération d’armement multiplie par dix le prix des systèmes d’armes. Cela explique pourquoi l’armée française a des trous dans sa raquette, qu’elle comble avec des moyens américains quand ceux-ci veulent bien lui prêter.

Il faut donc retrouver notre cohérence à un autre niveau. Un niveau qui ne peut être qu’européen. L’avenir de la défense de la France passe par la reconstitution des armées françaises, puis par des partenariats avec une alliance de nations européennes. Nous n’avons pas le choix. Ce qui ne veut pas dire que cela nous amènerait à gommer la souveraineté des nations. Nous ne pouvons rêver d’un fédéralisme qui effacerait leurs personnalités. Une alliance, fondamentalement, c’est accepter d’échanger un peu de liberté pour en gagner davantage par le collectif.

Joe Biden peut-il arranger les choses ?

Certains ont effectivement cru que Joe Biden allait arranger les affaires. Il est possible, effectivement, qu’il soit un peu plus poli et qu’il respecte davantage le multilatéralisme (auquel au fond il a intérêt). Mais quand il dit que M. Poutine est « un tueur », je ne pense vraiment pas qu’il agisse dans notre intérêt. Le secrétaire à la Défense américain a dit la semaine dernière à Bruxelles qu’il fallait que l’OTAN se « concentre d’abord sur la Chine ». Il est très clair qu’on veut nous amener dans des combats qui ne sont pas forcément les nôtres. Je ne dis pas qu’en cas d’affrontements avec la Chine nous ne serions pas du côté américain (très sûrement), mais nous n’avons pas à nous laisser dicter notre agenda.

Qui sont nos ennemis aujourd’hui et quelles sont les menaces auxquelles nous avons à faire face ?

Il faut distinguer nos ennemis immédiats de nos ennemis potentiels. Nous avons évidemment un premier ennemi immédiat, c’est le terrorisme. C’est principalement ce qui reste de Daech et d’Al-Qaïda, et toutes les déclinaisons que l’on trouve au Sahel. Il faut prendre conscience que c’est une menace dont nous n’arriverons pas à nous séparer. C’est une guerre qu’on ne peut pas gagner parce que c’est extrêmement difficile d’aller planter son drapeau sur des capitales qui n’existent pas. On l’a bien fait à Mossoul ou Raqqa, or ça n’a pas été Berlin : la menace terroriste a perduré. Je pense que nous sommes condamnés à savoir qu’il y aura toujours des attentats en France. C’est pour ça que nous sommes présents au Sahel, même si les Français ne le comprennent pas toujours. Sans ça, les projets d’attentat sur notre sol seraient bien plus nombreux.

Pour le reste, nos adversaires sont ceux que nous laisserons devenir nos adversaires, ceux que nous ne saurons pas contenir. On ne peut pas dire aujourd’hui que la Turquie est notre adversaire, mais on voit bien que si nous ne la contenons pas comme on a contenu l’Union soviétique, il arrivera à un moment où il faudra en venir aux poings. Même chose pour la Russie, qui comprend la force. Il faut donc d’une part mettre fin à la politique agressive qui est celle de l’OTAN, surtout vis-à-vis de la Russie, et d’autre part remonter en puissance.

La Chine pose également un véritable problème. Pour la première fois dans son histoire, elle est dans une démarche d’empire. Elle s’est dotée d’une marine de guerre qui possède désormais plus de bateaux et plus de tonnages que l’US Navy. Or, on ne se dote pas d’une marine de haute-mer aussi puissante lorsqu’on ne ressent pas le besoin d’aller vers le monde extérieur. Les mers vont vite devenir un espace de confrontation, ne serait-ce que parce que l’US Navy les domine aujourd’hui. Dans son expansion maritime, Pékin risque également de tomber assez vite sur nos territoires d’Outre-mer et en premier lieu sur la Nouvelle-Calédonie. A l’origine, la Chine ne vivait que pour régler ses problèmes intérieurs. L’armée populaire de libération (APL) n’était conçue que pour massacrer les ouïghours et calmer les Tibétains. La première mission de cette armée était de défendre le parti. Or, en 2049, la Chine aura sûrement réussi le pari que lui donne Xi-Jinping, à savoir devenir la première puissance économique et militaire du monde.

La question est : est-ce que les Américains laisseront la Chine devenir une grande puissance sans qu’il y ait un conflit majeur ? Vous avez peut-être entendu parler de la thèse du piège de Thucydide : une situation donnée qui voit une puissance dominante entrer en guerre avec une puissance émergente poussée par la peur de perdre son statut. Le risque que nous nous retrouvions pris dans cet étau est réel. La France et l’Allemagne ont par ailleurs renforcé leur présence en mer de Chine, ce qui montre bien que, faisant partie de l’Occident, nous pourrions nous retrouver embarqués dans cette affaire. Toutefois, la grande différence avec la Guerre froide est notre dépendance économique vis-à-vis de notre potentiel adversaire. C’est tout à fait nouveau et remplit l’avenir d’incertitude.

Enfin, nous avons des accords de défense avec de nombreux pays qui pourraient nous entrainer dans un conflit. Nous avons par exemple un accord de défense avec la Tunisie. Celle-ci est dans un situation compliquée vis-à-vis de la Turquie. La Tunisie a longtemps été une province ottomane, au même titre que l’Algérie, et n’a pas les moyens de se défendre seule. Ces accords de défense pourraient donc nous entraîner dans de dangereux engrenages, que nous ne saurons maîtriser qu’avec la puissance. Ce qui est certain, c’est que nous avons bien besoin d’une montée en puissance de nos systèmes de défense, tout en veillant à ce que celle-ci ne mette le feu à un brasier tout prêt à s’enflammer.

La profondeur stratégique de la France est-elle en Afrique ?

Absolument et il est tout à fait nécessaire que la France s’occupe de l’Afrique. Lénine disait : « si vous ne vous occupez pas de l’Afrique, c’est l’Afrique qui s’occupera de vous ». Je ne vais pas vous rappeler la démographie du continent, mais vous la connaissez comme moi. Un milliard d’Africains vont naître dans le quart de siècle immédiat. Le plein va vers le vide : si nous n’allons pas stabiliser la croissance du continent, les mouvements de transfert de population vers l’Europe vont s’accroître. Il faut faire en sorte que les peuples africains aient de quoi subvenir à leurs besoins. Auquel cas, ils pourront être heureux chez eux au lieu d’être malheureux chez nous.

Il y un intérêt réciproque à ce que la France s’occupe de l’Afrique. C’est d’autant plus vrai que nous avons des savoir-faire que nul autre pays européen n’a. L’Afrique est un jet de pierre de l’Europe ; quelques milles les séparent. Nous avons une très grande proximité, c’est notre voisin le plus proche, beaucoup plus que l’Amérique. Ça doit donc être une de nos préoccupations stratégiques. De plus nous ne pouvons pas nous désengager du continent, sans quoi les attentats se multiplieraient sur le sol français. Le Maghreb, la bande sahélienne et le nord de l’Afrique noire sont des zones où le terrorisme est en pleine expansion, bien que contenu par nos opérations.

Par ailleurs, la croissance démographique du continent va faire du français la deuxième langue la plus parlée au monde. La francophonie va représenter un marché immense. Si nous savons faire -ce que l’histoire récente ne nous a pas forcément montré- nous aurons des potentialités économiques absolument considérables. Il ne faut pas abandonner l’Afrique aux seuls Russes et Chinois, qui en tire profit même s’ils n’ont pas d’affinités avec elle.

Est-ce que le rôle de la France est celui d’une puissance stabilisatrice de l’ordre international ?

Oui et non. Je crois qu’elle l’est déjà. Elle peut intervenir pour maintenir la paix ; l’été dernier déjà nous en avons en quelque sorte empêché un conflit entre la Turquie et la Grèce. De même, l’action française au Sahel est stabilisatrice de l’Afrique et donc de l’Europe. La France protège l’Europe en s’engageant au Sahel.

Mais non, en ce sens qu’elle est trop faible. Elle peut jouer dans des petits conflits comme ceux qu’on vient de citer, dans des petites opérations. Mais elle n’a pas le poids militaire pour jouer un rôle dans l’affrontement des mastodontes. Il n’y a qu’une union de pays qui puisse jouer un rôle stabilisateur, et celui-ci doit être joué par l’Europe. L’Europe a un rôle de stabilisateur et de pacificateur du monde. Nous nous sommes tellement entre-déchirés et massacrés que nous avons compris la vanité de la guerre et des velléités d’expansion territoriale. Je crois que l’Europe est vraiment adulte. Mais ne sommes-nous pas passé de l’âge adulte à a vieillesse ? Je crois qu’il est urgent de se dire que nous avons des responsabilités vis-à-vis du monde. Nous devons trouver un équilibre durable dans nos modes de vie, à la fois pour le bien du monde mais aussi pour la survie de nos nations. Et, si nous voulons jouer notre rôle sur la scène internationale, nous n’avons pas d’autres choix que de renouer avec la puissance.

© http://gavrochemedia.fr/il-nous-faut-renouer-avec-la-puissance-entretien-avec-le-general-vincent-desportes/elouan/?s=08

Repenser la défense face aux crises du 21e siècle

Face à la montée des périls, l’Institut Montaigne propose de revoir le format des armées à la hausse

PAR LAURENT LAGNEAU · 9 FÉVRIER 2021

Article en ligne sur Opex360.com
Institut Montaigne : Repenser la défense face aux crises du 21e siècleRapport
Institut Montaigne : Repenser la défense face aux crises du 21e siècle Résumé

Centre de réflexion s’intéressant aux politiques publiques françaises et européennes, l’Institut Montaigne vient de publier un rapport sur la politique de défense, avec les contributions de plusieurs personnalités, dont l’ancien Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve, l’essayiste libéral Nicolas Baverez, l’amiral [2S] Édouard Guillaud [ex-CEMA], Jean-Baptiste Jeangène Vilmer, le directeur de l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire [|IRSEM] ou encore Bruno Tertrais, de la Fondation pour la recherche stratégique [FRS].

Soulignant que des crises de nature diverse s’enchaînent et s’accélèrent depuis une vingtaine d’années, ce rapport ne peut faire que le même constat que celui établi par la Revue stratégique, laquelle a fait l’objet d’une actualisation le mois dernier. Terrorisme, prolifération des armes de destruction massive, durcissement de la compétition entre puissances, politique du fait accompli, extension des domaines de conflictualité… Tels sont les paramètres du contexte géostatrégique actuel.

« À proximité géographique de la France, le contexte récent a été marqué par une dégradation sécuritaire, à laquelle l’Union européenne [UE] ne répond guère », déplore par ailleurs le rapport.

Or, affirme ce dernier, la « France et l’Europe sont en première ligne ». La première, de par ses « valeurs, son histoire, ses engagements au Levant ou au Sahel, représente une cible prioritaire pour les jihadistes ou pour la démocrature islamique turque » alors même qu’elle se trouve « affaiblie par son décrochage économique, par la forte progression de la dette publique, par les tensions qui traversent la Nation ainsi que la défiance qui se répand envers les institutions. »

Quant au « grand marché européen, il constitue l’un des enjeux de la guerre commerciale et technologique entre les États-Unis et la Chine », avancent les auteurs du rapport. Et, poursuivent-ils, « l’Union européenne est cernée par les crises, désignée comme un ennemi par les djihadistes, mise sous pression et menacée par la Russie et la Turquie. Créée autour du droit et du marché, elle n’a d’autre choix de se redéfinir en termes de souveraineté et de sécurité, au moment où les États-Unis se replient sur eux-mêmes et poursuivent leur pivot vers l’Asie. L’Europe n’a pas d’alternative à l’affirmation de son autonomie. »

À cela viennent s’ajouter des « menaces supplémentaires contre la souveraineté ». Ainsi, le rapport rappelle que la France et l’UE sont « aujourd’hui dépendantes de puissances étrangères dans une série de secteurs économiques essentiels », comme celui du numérique, où elles « demeurent dans un état de vassalité technologique vis-à-vis des acteurs américains et même israéliens ».

Face à des menaces qui se précisent, il est donc plus que nécessaire de renforcer les armées françaises, affaiblies par des réformes hasardeuses conduites ces dernières années. Ce qui ne sera pas simple au regard du contexte économique, plombé par un PIB en net recul sous l’effet de la crise sanitaire et un endettement qui dépasse les 120% de ce même PIB. Pour autant, au regard de la montée des périls, le rapport insiste pour ne pas baisser la garde et exécuter à l’euro près la Loi de programmation militaire en cours. Mieux : il laisse entendre qu’il faudrait même accentuer l’effort de défense afin de redonner aux forces françaises la masse qu’elles ont perdue lors de la précédente décennie.

Justement, en premier lieu, l’Institut Montaigne parle de revenir sur certaines réformes, comme la Révision générale des politiques publiques [RGPP], laquelle avait remis en cause l’organisation du soutien des forces. « Il s’agit de revenir à l’esprit du rapport parlementaire Bouchard qui, après analyse des causes de la défaite de 1870, recommandait de rétablir la pleine autorité des chefs militaires sur le soutien et la logistique », estime-t-il.

Aussi recommande-t-il « d’aller vers une organisation militaire spécifique et mieux intégrée » afin de « consolider la singularité militaire pour forger la résilience » et de « remettre les soutiens dans la main des chefs organiques. »

Le rapport insiste également sur l’amélioration de la réactivité des forces françaises « face à la volatilité du contexte stratégique », en mettant l’accent sur la préparation opérationnelle pour atteindre les normes Otan en la matière. À ce titre, il propose de lancer un « un cycle d’entraînement interarmées correspondant à un scénario d’engagement majeur. » Et cette réactivité serait par ailleurs renforcée par le prépositionnement de moyens pour lesquels la France est dépendante d’acteurs tiers pour leur projection [blindés Griffon et Jaguar] dans les territoires d’outre-Mer, comme par exemple en Nouvelle-Calédonie.

Par ailleurs, avec des menaces qui tendent à s’accroître et à se préciser, la question de la « masse », évoquée par la Revue stratégique actualisée, se pose immanquablement.

« Le nombre des équipements a baissé et le remplacement par des équipements plus performants mais en nombre limité pose des difficultés [frégates, blindés, avions de combat, etc.] face à des besoins croissants », relève le rapport.

« Concernant les frégates de premier rang, la Marine est ‘au bout’ de ses capacités avec une multiplication des besoins de présence permanente et un nombre insuffisant de bâtiments avec seulement 15 frégates de premier rang », prend-il comme exemple. Même chose pour les blindés médians [« La cible pour 2030 est fixée à 300 Jaguar alors que nous disposions en 2008 de 452 véhicules blindés médians et que les théâtres d’opérations se sont multipliés depuis »] et l’aviation de combat, l’armée de l’Air & de l’Espace devant faire avec 185 avions de combat à l’horizon 2030 contre… 420 en 2008.

Aussi, l’Institut Montaigne plaide pour « ajuster les capacités et le format pour plus d’impact et d’endurance ». Et si le renouvellement des moyens de la dissuasion nucléaire fait consensus, il faudrait établir quatre priorités : combler en urgence les lacunes qui limitent la disponibilité des moyens existants, notamment les stocks stratégiques [munitions, pièces détachées pour la maintenance, etc], s’adapter aux nouveaux champs et modes de conflictualité, réparer et moderniser les segments plus lourds et modifier le format de la réserve, à qui pourrait revenir de « remplir de manière autonome le contrat protection du territoire national à 10.000 hommes. »

Pour un ordre international différent – Une grande ambition pour la France et l’Europe

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OTAN, États-Unis, ces amis qui vous veulent du bien…

Trente ans après la fin de la guerre froide, les grands équilibres stratégiques sont désormais remis en question tant par la lutte pour l’hégémonie mondiale qui s’amorce entre la Chine et les États-Unis que par l’émergence de nouvelles puissances régionales.

Partout dans le monde la multiplication des foyers de crises d’ampleurs croissantes, le réarmement quasi généralisé des puissances moyennes ainsi que des grandes puissances et la volonté américaine de se dégager des contraintes du multilatéralisme, fragilisent les grandes organisations internationales, en particulier l’ONU et l’OSCE.

Dans ce contexte, l’Europe, peut-elle indéfiniment se contenter de la tutelle américano-otanienne au double risque de sortir de l’histoire et d’être entraînée dans une conflagration qui n’est pas la sienne ?

La France, de par sa position stratégique particulière au sein de l’Union Européenne, n’a-t-elle pas le devoir, grâce à ses liens historiques avec la Russie, de tenter de rééquilibrer les relations entre les États-Unis, l’UE et la Russie ?

C’est à travers des analyses sans concessions dont les auteurs sont pour la plupart d’anciens militaires ayant eu à traiter de ces questions, tant sur le terrain qu’au sein des grandes organisations internationales, que le lecteur se fera une idée précise de « l’état des lieux » dangereusement dégradé de la situation internationale, avant d’aborder en synthèse le rôle que la France devrait avoir l’ambition d’assumer pour la paix en Europe.

           « Gardez-moi de mes amis !
Quant à mes ennemis, je m’en charge ! »
(Antigone II roi de Macédoine, 221 av. J.-C.)

Sous la direction de CRI (Centre de réflexion interarmées)
https://edsigest.blogspot.com/2021/01/pour-un-ordre-international-different.html

Pour les auteurs de cet ouvrage, pour la plupart anciens militaires ayant eu à traiter des questions de Défense, un rapprochement Russie-Europe est nécessaire face :

  • À l’emprise du protectorat américain, sous couvert de l’OTAN, maintenu sur le continent européen alors que la menace soviétique a disparu depuis plus de trente ans,
  • À l’accession de la Chine au rang de puissance mondiale rivale des États-Unis,
  • À l’insidieuse insertion islamique dans les sociétés occidentales et russes avec pour objectif un changement de civilisation et comme mode d’action le terrorisme,
  • Aux flux migratoires invasifs qui bouleversent les équilibres sociaux, économiques et culturels des sociétés européennes.

Ce rapprochement est dicté par la géographie (L’Europe n’est qu’une sorte de péninsule occidentale d’un vaste continent eurasiatique) et la culture( les peuples de cet espace sont les héritiers d’une part de Rome et de l’empire romain d’occident et d’autre part de Byzance et de l’empire romain d’orient).

Mais cette symbiose souhaitée implique de nombreux bouleversements diplomatiques et militaires. Elle remet en cause l’organisation voire l’existence de l’OTAN et le fonctionnement de l’Union Européenne.

Le Cercle de Réflexion Interarmées s’est attaché à analyser les tenants et aboutissants d’un tel changement stratégique et a tenté de répondre à deux questions :

  • Comment la France peut-elle aider l’Europe à se rénover et à assurer son autonomie stratégique ?
  • En quoi la France peut-elle être un levier de puissance de l’Europe ?

Les chiffres clés de la Défense 2020

Mise à jour  : 17/09/2020 – Auteur : La Rédaction – Direction : DICoD
© https://www.defense.gouv.fr/actualites/articles/les-chiffres-cles-de-la-defense-2020#:~:text=Comme%20le%20stipulait%20la%20Loi,plus%20que%20l’an%20pass%C3%A9.

Le ministère des Armées publie son document annuel présentant les données majeures de son action au cours des derniers mois. Quel budget alloué à la Défense ? Combien de militaires déployés en mission ? Quels moyens mis en œuvre durant la crise sanitaire ? Tous les chiffres clés sont à retrouver ci-dessous.

Comme le stipulait la Loi de programmation militaire (LPM), le budget alloué au ministère des Armées a été revu à la hausse en 2020. Il s’est élevé ainsi à 37,5 milliards d’euros, soit 1,7 milliard de plus que l’an passé. « Derrière ces crédits, il y a des hommes et des femmes, les personnels civils et militaires du ministère des Armées, mais également de nouveaux équipements modernisés, des projets pour améliorer la vie des familles, des formations pour guider l’orientation des jeunes, des innovations pour accélérer la transition énergétique », tient à préciser Florence Parly, ministre des Armées, dans le fascicule des chiffres clés de la Défense 2020.

https://www.defense.gouv.fr/content/download/592943/10040200/file/Chiffres%20cl%C3%A9s%20de%20la%20D%C3%A9fense%20-%202020%20-%20FR.pdf

Une année sous le signe de la lutte contre la crise sanitaire

La crise de la Covid-19 a profondément marqué le premier semestre 2020.  Comme l’a rappelé la ministre des Armées, « plus de 2 000 patients atteints du virus ont été hospitalisés dans les 8 hôpitaux d’instruction des armées » et « 20 % des transferts de patients ont été réalisés par nos armées », sans oublier les 5 millions de masques livrés au ministère des Solidarités et de la Santé et le déploiement des trois porte-hélicoptères amphibies (PHA) à La Réunion, Mayotte et dans la zone Antilles/Guyane et de trois A400M aux Antilles, en Guyane et en Polynésie française. L’opération Résilience, lancée le 25 mars dernier, a ainsi contribué efficacement à la lutte contre la propagation du virus et au traitement des malades.

Un ministère des Armées investi sur plusieurs fronts

Ces derniers mois, plusieurs sujets ont plus particulièrement mobilisé les équipes du ministère des Armées. Parmi eux, la transition écologique a été mise au cœur des préoccupations ministérielles.  La stratégie énergétique de Défense a consacré ainsi la mobilisation de 2 000 ha de terrains militaires pour l’installation de fermes photovoltaïques d’ici 2022.

Par ailleurs, malgré la crise de la Covid-19, les livraisons d’équipements essentiels à la réalisation des missions se sont poursuivies : 17 Griffon pour l’armée de Terre, six Rafale F3R pour la Marine et un A400M Atlas à destination de l’armée de l’Air et de l’Espace.

Dans le même temps, le soutien aux entreprises a été tout particulièrement développé avec, entre autres, la création d’une Task force dédiée à préserver les industries stratégiques œuvrant au profit de la Défense et les 200 000 emplois liés.

Une meilleure prise en compte des conditions de vie des militaires et des familles

Lancé par le ministère des Armées le 31 octobre 2017, le plan Famille assure une meilleure prise en compte des conditions de vie des militaires et de leur entourage. Parmi les 55 actions qu’il prévoit, la plupart sont désormais effectives. 371 logements neufs ont notamment été livrés au cours de l’année passée et 100 000 nouvelles cartes famille SNCF distribuées.

« 61 372, c’est le nombre de militaires du rang dans l’armée de Terre ; 102, c’est le nombre de Rafale de l’armée de l’Air ; 3, c’est le nombre de porte-hélicoptères amphibies de la Marine ; 2 000 ha, c’est la surface des terrains militaires que le ministère des Armées a consacrée à l’installation de fermes photovoltaïques ; 5 millions, c’est le nombre de masques qui ont été livrés au ministère des Solidarités et de la Santé durant la crise de la COVID-19. Ces chiffres sont plus révélateurs qu’un grand discours ; et c’est bien l’esprit de ce fascicule Chiffres Clés. »

Florence Parly, ministre des Armées.

Revue Défense Nationale (2020)

Citation

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RDN – Mensuel – Juillet 2020 – n° 832 – Économie de défense : problématiques contemporaines

« Les éléments ultimes de la puissance sont le nombre 
des hommes et la capacité de production. » Raymond Aron

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RDN – Mensuel – Juin 2020 – n° 831 – La puissance américaine : assise et évolutions stratégiques

« L’Amérique n’a pas d’idéologie puisqu’elle en est une. » 
François Furet

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RDN – Mensuel – Mai 2020 – n° 830 L’Europe de la défense : quelle réalité ?

« Ceux qui laissent croire que par une sorte d’abracadabra 
européen, tous nos problèmes seront résolus se trompent et 
trompent les Français. » Jacques Chirac

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RDN – Mensuel – Avril 2020 – n° 829 Avenir de la guerre et ses mutations (suite)

« À la guerre, c’est celui qui doute qui est perdu : 
on ne doit jamais douter. » Ferdinand Foch

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RDN – Mensuel – Mars 2020 – n° 828 – Avenir de la guerre et ses mutations

« Se préparer à la guerre est le meilleur moyen de préserver 
la paix. » George Washington

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RDN – Mensuel – Février 2020 – n° 827 – Pierre Hassner

« Réduire l’incertitude, c’est bien souvent d’abord discerner
des intérêts communs, éduquer à la confiance mutuelle et 
refuser ensemble l’inacceptable. » Amiral Pierre Lacoste

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RDN – Mensuel – Janvier 2020 – n° 826La Fabrique Défense

« Un événement tourné vers les jeunes qui doit contribuer
d’une part à l’affermissement du lien armées-Nation, et
d’autre part à l’émergence d’une culture stratégique
européenne commune. » Florence Parly

L’IHEDN en Nouvelle-Aquitaine

L’Institut [IHEDN] et l’Union-IHEDN, nos maisons mères bougent et se réorganisent.

Tous ensemble, nous devons accompagner ce changement pour la réussite de la mise en place du Service National Universel [SNU] au niveau départemental.
A cet effet, il est impératif de voir converger nos actions au niveau régional.

Il est donc suggéré la création d’un « Comité d’entente des auditeurs IHEDN en Nouvelle-Aquitaine » et la mise en place d’une « Charte de fonctionnement » définissant un lien de subordination fonctionnelle entre les trois associations régionales et les modalités de concertation.

Un projet de rédaction de cette « Charte de fonctionnement » est téléchargeable en bas de page (version n° 1 du 16 février 2020)..

Région immense qui demande beaucoup d’ingéniosité afin de parvenir à travailler ensemble.