Résilience et esprit de défense

Par Comité de la Charente

La résilience fait partie de ces mots couramment utilisés dans l’actualité. Son usage est devenu commun au fur et à mesure de son élargissement sémantique.
Cela reste très certainement lié à la perception grandissante dans l’opinion publique des risques et des menaces qui pèsent sur la société, mais aussi des fragilités de cette dernière.
Est-ce pour autant que la notion de résilience est mieux saisie notamment lorsqu’elle est appliquée à la Nation ?
Comment interpréter un usage du terme qui, aujourd’hui, s’est tellement élargi qu’il fait parler d’abus voire de galvaudage ?
Comme si l’emploi du mot connaissait une inflation qui le viderait de sa substance plus qu’elle nous permettrait d’en comprendre le sens profond ?

Questionner la résilience de la Nation c’est questionner la Défense nationale dans son essence même car, de nos jours, les acteurs de cette Défense ne peuvent porter à eux seuls une crise ou une guerre.
La qualité de ces derniers ne peut suffire compte tenu de leur faiblesse en volume comme en moyens, et eu égard à l’ampleur de menaces devenues hybrides.
Plus que jamais l’adhésion de la société aux enjeux, sa capacité à subir les traumatismes sans être désemparée, sa capacité à garder une cohésion et une cohérence, sont nécessaires à la réalisation des missions de défense.
La résilience est, par conséquent, un « Esprit de défense » – conjugaison à la fois d’une capacité à subir sans céder et d’une volonté de se relever – qui doit irriguer l’ensemble de la société.

Cette approche ne peut donc être technique ni fonctionnelle, car elle nous oblige surtout à scruter ce qui dans les profondeurs de la société – et de la civilisation dont elle en est l’héritière – participe ou non à cette capacité.

Du Kosovo à l’Ukraine : la guerre devant la justice

Par Patrice de Charette – Magistrat – Membre associé du Comité Aunis-Saintonge
Détaché au Kosovo le 5 février 2000, coordinateur des programmes à l’Institut judiciaire, puis juge international.

Cicéron disait : « Quand les armes parlent, le droit se tait ». Ceci n’est plus vrai, la justice peut désormais intervenir sur les crimes commis pendant les conflits armés :

  • Crimes de guerre : exactions commises contre les civils, pendant les conflits armés,
  • Crimes contre l’humanité : exactions commises de façon systématique et généralisée, dans le cadre d’un plan,
  • Génocide : destruction intentionnelle de tout ou partie d’un groupe national, ethnique, racial ou religieux,

Qui peut juger ces crimes ?

  • Les tribunaux nationaux pour les crimes commis sur leur territoire
  • Les tribunaux étrangers dans le cadre de la compétence universelle 
  • Les cours mixtes, tribunaux nationaux dans lequel siègent des juges étrangers. Ces cours ont été créées au Kosovo en 2000 pour juger les Serbes accusés de crimes de guerre. Le modèle a été reproduit ensuite : chambres extraordinaires du Cambodge, pour juger les Khmers rouges, chambre spéciale du Sénégal pour juger le dictateur tchadien Hissene Habré, chambre spéciale de Centrafrique, en activité actuellement
  • Les tribunaux spéciaux, généralement créés par l’ONU : Nuremberg, tribunal pénal international pour l’ex Yougoslavie, tribunal pénal international pour le Rwanda, tribunal spécial pour le Liban
  • La cour pénale internationale, juridiction permanente, créée par le statut de Rome, traité international conclu en 1998. Elle n’est pas normalement compétente pour intervenir en Ukraine, puisque la Russie n’a pas signé le statut de Rome, mais une exception à celui-ci rend possible son intervention si l’Ukraine le demande, ce qui a été fait, et si des Etats signataires du statut de Rome le demandent également, ce qui a été le cas, puisque 41 États ont demandé l’intervention de la Cour.

La remontée de la chaîne de commandement pour les crimes de guerre commis en Ukraine sera compliquée. La Cour a choisi une autre voie en mettant Poutine en accusation pour déplacement forcé d’enfants, crime de guerre, avec mandat d’arrêt.

Sauf arrestation improbable de Poutine, celui-ci ne pourra pas cependant être jugé pour ce crime, car la procédure anglo-saxonne, en vigueur devant la CPI, ne permet pas le jugement par contumace 

Une seule solution pour juger directement Poutine : utiliser le crime d’agression (agression d’un État par un autre) en créant un tribunal spécial.
La création de ce tribunal est réclamée par de nombreuses autorités, notamment la Commission européenne. Le crime étant d’ores et déjà établi, le jugement serait facile et possible notamment par contumace, si le traité international qui crée ce tribunal le décide.
Le chemin sera long pour créer ce tribunal spécial. Il permettrait de consacrer judiciairement la responsabilité du chef d’État russe.

Beaucoup d’échanges après cette conférence :

  • Exécution des décisions ; crime de guerre définition de guerre ; crime d’agression 
  • De nombreuses questions sur le conflit Russo/Ukrainien

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Fonds documentaire.

Définitions [Nations Unies]

Génocide

Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide.

Article II – Dans la présente Convention, le génocide s’entend de l’un 8quelconque des actes ci-après, commis dans l’intention de détruire, ou tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel :

  • Meurtre de membres du groupe;
  • Atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe;
  • Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle;
  • Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe;
  • Transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe.

Crimes contre l’humanité

Statut de Rome de la Cour pénale internationale

Article 7 – Crimes contre l’humanité

1. Aux fins du présent Statut, on entend par crime contre l’humanité l’un quelconque des actes ci-après lorsqu’il est commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque :

  • Meurtre ;
  • Extermination ;
  • Réduction en esclavage ;
  • Déportation ou transfert forcé de population ;
  • Emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit international ;
  • Torture ;
  • Viol, esclavage sexuel, prostitution forcée, grossesse forcée, stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ;
  • Persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d’ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste au sens du paragraphe 3, ou en fonction d’autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte visé dans le présent paragraphe ou tout crime relevant de la compétence de la Cour ;
  • Disparitions forcées de personnes ;
  • Crime d’apartheid ;
  • Autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé physique ou mentale.

Crimes de guerre

Statut de Rome de la Cour pénale internationale

Article 8 – Crimes de guerre

2. Aux fins du Statut, on entend par « crimes de guerre » :

  • Les infractions graves aux Conventions de Genève du 12 août 1949, à savoir l’un quelconque des actes ci-après lorsqu’ils visent des personnes ou des biens protégés par les dispositions des Conventions de Genève :
  • L’homicide intentionnel ;
  • La torture ou les traitements inhumains, y compris les expériences biologiques ;
  • Le fait de causer intentionnellement de grandes souffrances ou de porter gravement atteinte à l’intégrité physique ou à la santé ;
  • La destruction et l’appropriation de biens, non justifiées par des nécessités militaires et exécutées sur une grande échelle de façon illicite et arbitraire ;
  • Le fait de contraindre un prisonnier de guerre ou une personne protégée à servir dans les forces d’une puissance ennemie ;
  • Le fait de priver intentionnellement un prisonnier de guerre ou toute autre personne protégée de son droit d’être jugé régulièrement et impartialement ;
  • La déportation ou le transfert illégal ou la détention illégale ;
  • La prise d’otages ; […]

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Portrait – Un juge acerbe

Patrice de Charette, 52 ans, magistrat. Chargé par l’ONU, sans moyens, de mettre sur pied une vraie justice au Kosovo.
par Marc Semo. Publié le 15 janvier 2003. Extrait :

[Patrice de Charette] fut pendant deux ans magistrat international au Kosovo. Il siégea même à la Cour suprême de cette province du sud de la Serbie, placée depuis juin 1999 sous protectorat de l’ONU.

Patrice de Charette arrive à Pristina en février 2000.
Avec ses lugubres immeubles socialistes bordant des avenues noyées, selon la saison, par la boue ou la poussière, la ville n’a rien d’un lieu de villégiature. « Des milliers de corneilles nichées dans les arbres et les décombres s’envolent tous les soirs au crépuscule avec un bruit d’enfer », écrit-il dans l’un de ses premiers e-mails.
Il fait froid et l’électricité est souvent coupée. « Elle fonctionnait par roulement, en tranche de quatre heures », raconte le magistrat, qui témoigne de son expérience, dans un livre drôle et quelque peu amer (1).
C’est un juge qui aime et sait écrire. Il a toujours été l’une des meilleures plumes du Syndicat de la magistrature. Il narre les interminables soirées à la lueur des bougies. Impossible de lire les bouquins ­beaucoup de polars et un peu de SF emportés depuis Paris.
Difficile de sortir aussi, car il répugne à déranger à nouveau les hommes d’escorte qui toute la journée ont travaillé à ses côtés.
C’est une vie plutôt solitaire dans une espèce de bulle blindée.

Défini pourtant comme prioritaire, le chantier de la justice au Kosovo est pour le moins laborieux.
Surtout au début. Quel code pénal appliquer ? Il a fallu près d’un an à l’ONU pour en décider.
Les procès s’enlisent. Les prisons sont des passoires. Réaliser une autopsie représente une gageure si le meurtre n’a pas eu lieu dans la capitale. « Les policiers internationaux ne voulaient pas salir les sièges de leur belle voiture avec le cadavre mais aucun budget n’était prévu pour payer les entreprises locales de pompes funèbres », raconte Patrice de Charette.
Les choses se sont depuis un peu améliorées mais le fonctionnement de la justice représente le principal fiasco de l’action de la communauté internationale dans cette ex-région autonome de l’ex-Yougoslavie. « En tant que juge on voit les choses au jour le jour dans toute leur crudité. Beaucoup d’énergie a été gaspillée pour des résultats en partie décevants », reconnaît le magistrat qui admet désormais ne plus avoir trop d’illusions sur la grosse machine de l’administration onusienne du Kosovo, la Minuk.
« C’est une leçon d’humilité pour la communauté internationale. Elle a privilégié le court terme alors que la justice représente la condition même d’une réconciliation durable entre les communautés », raconte le magistrat qui n’eut pas toujours des rapports faciles avec l’administrateur de l’ONU, Bernard Kouchner.

Sa tâche au début est de mettre sur pied la future école de la magistrature. En fait, il s’agit surtout de faire de la formation.
Dès l’instauration du protectorat de l’ONU, des centaines de nouveaux juges kosovars sont nommés.
Les Albanais sont pour la plupart d’anciens magistrats chassés en 1989, au moment de la reprise en main par Belgrade.
Pour les Serbes, il a fallu trouver des juristes pas trop compromis, mais presque tous boycottent les nouvelles institutions.
Le système patine. A peine protégés, les juges locaux gardent un profil très bas dans les affaires de crimes de guerre ou de mafia. En outre, ils sont mal payés. « Moins qu’une femme de ménage travaillant pour la Minuk », ironise Charette.
L’ONU décide finalement de les épauler sur les dossiers sensibles par des juges internationaux. Il se porte volontaire.
On l’envoie à Gjilan, grosse ville du sud-est, en secteur américain.

Son premier gros dossier est celui de deux frères serbes accusés d’avoir tué un ex-guérillero albanais qui, à la tête d’une petite foule, attaquait leur maison.
Croupissant en préventive depuis plusieurs mois, ils clament avoir agi en légitime défense.
Aucune autopsie n’a été effectuée sur la victime.
Une cassette vidéo de l’incident n’a même pas été visionnée. Finalement, il s’avère que les balles meurtrières ont été tirées par les soldats américains en dispersant la foule.
Il n’est pas évident non plus pour un juge de travailler sans cesse avec un traducteur. « On arrive quand même à sentir si sa déposition sonne juste », raconte Patrice de Charette, qui fut ensuite nommé à Pristina à la Cour suprême. […]

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Les Oiseaux noirs du Kosovo.
Un juge à Pristina

Patrice de Charente, nommé par l’ONU comme juge international au Kosovo, raconte l’extraordinaire expérience qu’il a vécue pendant deux ans dans ce territoire dévasté, en proie à des tensions ethniques meurtrières. Il décrit sans complaisance les errements de l’ONU et dit le combat quotidien pour la construction d’une justice démocratique.
© https://www.decitre.fr/livres/les-oiseaux-noirs-du-kosovo-9782841861798.html

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Kosovo : une expérience
de justice transitionnelle

Par  Anna Adamska-Gallant
– Dans Délibérée 2017/2 (N° 2), pages 70 à 76
– Éditions La Découverte

De Associé à Auditeur IHEDN

Comment, à la retraite depuis quelques années, passer du statut d’associé au titre d’une association régionale des auditeurs de l’IHDN au statut d’AUDITEUR sans critère d’âge ?

Tout simplement en suivant une session du cycle « Intelligence économique et stratégique » de l’IHEDN – École militaire, Paris. 
Les formations IES de l’IHEDN bénéficient de l’intervention d’experts et d’institutions telles que le SGDSN et son nouveau service VIGINUM, la DGSE, la DGSI, la DRSD, TRACFIN, la Direction du renseignement douanier, le Ministère des affaires étrangères ou encore le PNF.
https://lnkd.in/eHGxvH9D

Alain Juillet – Jean-Marc Brault de Bournonville – Nicolas Moinet (référent intelligence économique à l’IHEDN)
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Union-IHEDN & AR-18 – Rapport Annuel 2022

L’Union-IHEDN est le pôle fédérateur des associations d’auditeurs de l’Institut des hautes études de défense nationale.

Fondée en 1975, l’Union-IHEDN (as- sociation loi 1901) regroupe et fédère l’ensemble des 40 associations d’auditeurs de l’IHEDN, classées en grandes catégories :
• 2 associations nationales AA-IHEDN, 3AED-IHEDN
• 1 association thématique IE-IHEDN
• 32 associations régionales, métropolitaines et ultramarines
• 5 associations internationales Europe-IHEDN, Euromed-IHEDN, Afrique-IHEDN, AMLAT-IHEDN et AMO- IHEDN

L’Union-IHEDN a pour vocation de créer des synergies, renforcer la communauté des au- diteurs, susciter, développer et coordonner les activités menées par les associations afin de sensibiliser le plus grand nombre aux questions stratégiques et contribuer au rayonnement de l’esprit de défense.
Le maillage que les associations représentent sur le territoire national contribue au renforcement de la cohésion nationale.
Au sein de chacune des associations, soit 5242 membres cotisants composés de décideurs, hauts responsables des armées, de la fonction publique et du secteur privé ainsi que de jeunes actifs, poursuivent la réflexion qu’ils ont commencée lors de leur formation durant les sessions vécues à l’IHEDN.
Ils s’investissent dans de nombreux domaines et par exemple au service des enseignants et des élèves de l’Éducation nationale ainsi que des élèves de l’enseignement agricole et des étudiants de l’enseignement supérieur par le biais des trinômes académiques.

D’autres sont membres des différentes réserves, certains encore remplissent les fonctions de conseillers de défense. Dans ce cadre, ils sensi- bilisent les élus aux problèmes de défense, ap- portent leur expertise dans différents domaines dont l’intelligence économique, et mettent leurs compétences à disposition des préfets et des élus sur tout le territoire national ainsi que dans les DROM-COM.

En outre, l’Union-IHEDN publie trimestrielle- ment sa revue Défense. Chaque année elle or- ganise un forum des études https://www.union-ihedn. org/page/le-forum-des-etudes qui permet aux auditeurs de présenter la synthèse des travaux menés dans le cadre d’un thème annuel de réflexion et de la formation continue des associations.

Par son site internet, elle communique sur les activités à venir ou réalisées.
https://www.union-ihedn.org/category/note-de-position
La revue de presse « défense » hebdomadaire est aussi accessible en ligne.
https://www.union-ihedn.org/page/revue-de-presse

Extrait : Activités concernant l’A-18 Poitou-Charentes

Suite à une volonté de l’AR de s’inscrire dans une démarche de proximité en donnant de la visibilité à ses actions, l’AR-18 a constaté un meilleur rayonnement local de l’association. Outre ses nombreuses activités, cela est dû à une évolution de ses modes de communication, notamment par l’utilisation du communiqué de presse.
Sur l’initiative de l’AR18, et en coopération avec la Délégation Militaire Départementale de Charente-Maritime, un rassemblement des correspondants défense des conseils municipaux du département a été organisé.

Études.
Pour la première fois, depuis plusieurs année, l’AR s’est investie dans un travail de réflexion sur le thème de la résilience (comité de la Charente). Cette étude est installée sur le site internet de l’AR.
L’AR-18 a en outre participé à la restitution des travaux du sujet national 2022 à Bordeaux.

Les Rallyes, des opérations majeures dans le cadre du Trinôme académique.

  • Les rallyes citoyens sont désormais bien installés dans le paysage local. Un nouveau rallye citoyen a été organisé en 2022, ce qui porte le nombre à 5 dans la zone de compétence de l’AR-18.
  • L’organisation s’appuie sur une journée alternant activités physiques et intellectuelles (QCM sur l’Europe). Elle permet aux jeunes à la fois de découvrir toutes les facettes de la défense et bien souvent d’ail- leurs de susciter ou de conforter des vocations dans ces secteurs :
    • Rallye-citoyen collégien de la Charente-Maritime, Base aérienne 721 de Rochefort Saint Agnant, le 18 mai 2022 ;
    • Rallye-citoyen lycéen de la Charente, Camp militaire de Broche à Dirac ;
    • Rallye-citoyen collégien des Deux-Sèvres, Niort 79000 ;
    • Rallye-lycéen de la Charente-Maritime, Base aérienne 721 de Rochefort Saint Agnant ;
    • Rallye-citoyen lycéen de la Vienne, L’Europe, Caserne Aboville, Poitiers.

Service national universel.

    • Le CSNJ de Poitiers a organisé une formation initiale pour huit auditeurs et membres associés, permettant d’intervenir lors de huit vacations en soutien des animateurs du ministère de la défense, pour l’animation du jeu « décision-défense » présenté par le ministère des armées.
    • Les interventions des auditeurs de l’AR-18 lors des sessions SNU, sont hautement appréciées, apportant « un plus » en termes de connaissance géopolitiques et militaires.

Conférences et colloques.

  • Intervention à Chauray 79000 Organisée par le comité des Deux-Sèvres de l’AR 18 du député Fièvet, membre de la commission de la défense à l’Assemblée nationale, et spécialiste des questions de sécurité civile.
  • Intervention à Poitiers Organisée par le comité de la Vienne, de la députée Ballet-Blu, membre de la commission de la défense à l’Assemblée nationale.
  • Conférence sur la thématique des drones à Poitiers organisée par le comité de la Vienne, en prévision de la visite de la BA 709 de Cognac où est stationné un régiment opérationnel de drones.

Soutien aux sessions régionales.

  • 225ème session régionale. Mise à disposition du carnet d’adresse de l’AR-18 permettant d’organiser la première semaine de cette session à La Rochelle.
  • Participation de 5 auditeurs de l’AR à la première réunion constitutive des groupes de travail.

Actions auprès de la communauté enseignante et de la jeunesse.

  • Participation de l’AR-18 au colloque dédié à la « Journée de l’Engagement », organisée par le rectorat au profit des jeunes de l’éducation nationale (Niort). L’AR18 était représentée par la responsable du trinôme académique qui a présenté les missions de l’IHEDN, de l’Union IHEDN et les activités de l’AR-18. 150 participants.
  • Cycle de conférences donnés par l’AR auprès des classes Défense et sécurité globales au lycée Jean d’Arc de Surgères (Charente-Maritime) sur les thèmes de la défense globale, les valeurs de la République et la politique de défense de la France, les nouvelles technologies dans l’Armée française. Excellente réceptivité des élèves.
  • Formation des enseignants aux questions de défense dans le cadre du trinôme académique sous la forme d’un colloque au lycée Grégoire à Angoulême (Charente)., Présentation de l’IHEDN, de l’Union IHEDN et de l’AR18., excellents retours de la majorité des enseignants.
  • Colloque sur le thème de la cyber-sécurité à destination des jeunes de l’éducation nationale et du grand public, Palais des Congrès de la ville de Rochefort avec la participation de plusieurs élus. Organisée sur une demi-journée à destination des jeunes des lycées, cette manifestation a pour objet de les sensibiliser aux bonnes pratiques relatives à l’utilisation d’internet et des réseaux sociaux.

Le Rapport Annuel 2022 dans son intégralité.

Russie et Ukraine

Par Bernard PENISSSON – titulaire d’un doctorat en histoire ( Paris I – Panthéon Sorbonne), agrégé de l’Université, auditeur IHEDN (SR 143), membre du comité 86

Russie et Ukraine – Des origines à 2022

Introduction 

            Dans une mise en scène savamment orchestrée, en 2006, à un enfant qui lui demandait : « Quelles sont les frontières de la Russie ? » le président Vladimir Poutine répondait : « La Russie n’a pas de frontières. » Franche, nostalgique ou cynique déclaration qui ne rassurait pas les voisins occidentaux de la Fédération de Russie : Finlande, Pays Baltes, Pologne, Biélorussie et Ukraine, tous pays qui ont appartenu dans le passé à l’empire des tsars. Était-ce une allusion au désir d’empire universel taraudant un pays qui se prétend l’héritier de l’Empire romain ? Le conflit actuel entre la Russie et l’Ukraine a en effet des racines profondes qui remontent à la chute de l’empire byzantin. L’indépendance de l’Ukraine a souvent été balayée par de puissants voisins au cours de l’histoire. Une des explications de ce phénomène récurrent est-elle à saisir dans le rôle de pivot géopolitique de ce pays, zone de marche entre empires rivaux ? Dans quelle mesure l’histoire religieuse de l’Ukraine et de la Russie vient-elle interférer avec les rivalités géopolitiques qui les opposent ?

            Mais une question préalable se pose : qu’est-ce qu’un empire ? C’est un ensemble politique, militaire, économique, culturel et/ou religieux, continental et/ou maritime, formé de plusieurs nations dirigées par l’une d’entre elles, à son profit ; cette nation impériale se considère comme supérieure aux autres nations dominées, parce qu’elle les a conquises au nom de la diffusion de la ‟ civilisation ˮ, de la mise en valeur de ressources naturelles inexploitées, ou encore de la mise en place d’un glacis de sécurité sur l’étranger proche. L’empire peut être formel, lorsqu’il est gouverné directement par la nation conquérante (au moyen de fonctionnaires nommés par la métropole) ou indirectement, toujours par la nation dominante, mais au moyen d’autorités autochtones recevant leurs pouvoirs de la puissance impériale. L’empire peut aussi être informel lorsque, gardant l’apparence de la souveraineté, les nations soumises sont dominées par la puissance économique et financière, par une alliance militaire asymétrique, ainsi que par l’influence culturelle, voire linguistique (langue russe/langue ukrainienne), qualifiée de ‟ puissance douce ou soft power ˮ, d’une nation hégémonique. 

            L’impérialisme est la tendance à constituer un empire, formel ou informel. Ce mouvement a été étudié et dénoncé par de nombreux auteurs, dont l’un des plus célèbres est le britannique John A. Hobson (1858-1940), avec le livre Imperialism. A Study, publié  1902. Lénine s’en est inspiré pour rédiger sa brochure L’Impérialisme, stade suprême du capitalisme, imprimée à Pétrograd en 1917. Enfin Hannah Arendt a rédigé en 1951 L’Impérialisme, deuxième partie de son grand œuvre Les Origines du totalitarisme. Des invasions extérieures, des impérialismes rivaux et/ou le réveil des nations temporairement soumises, entraînent la dislocation de l’empire, soit par le conflit ouvert, soit par la négociation, soit par l’effondrement interne de la puissance impériale. « Tout empire périra » a écrit l’historien Jean-Baptiste Duroselle L’empire russe s’est effondré en 1917, l’empire soviétique en 1991. Jusques à quand ? 

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Conclusion

            La politique extérieure de Vladimir Poutine évoque par certains aspects la doctrine Brejnev sur la souveraineté limitée. Après avoir « normalisé » la Tchécoslovaquie du « Printemps de Prague » en août 1968, et imposé « un traité sur le stationnement temporaire des troupes soviétiques en Tchécoslovaquie », Brejnev déclara dans La Pravda du 26 décembre 1968 : « La souveraineté de chaque pays socialiste ne peut s’opposer aux intérêts du socialisme ou du mouvement révolutionnaire mondial. » Ce qui signifie qu’aucun pays du bloc socialiste ne peut se retirer du Pacte de Varsovie. Ainsi, l’empire soviétique n’offrait pas de porte de sortie jusqu’à sa désintégration en 1991, tout comme l’empire russe était « la prison des peuples », selon Lénine. 

            Peut-on attribuer au président Vladimir Poutine cette profondeur de la réflexion historique dont parlait le philosophe Henri Bergson en 1911 ? Ou est-ce lui faire trop d’honneur ? « À quel signe reconnaissons-nous d’ordinaire l’homme d’action, celui qui laisse sa marque sur les événements auxquels la fortune le mêle ? N’est-ce pas à ce qu’il embrasse une succession plus ou moins longue dans une vision instantanée ? Plus grande est la portion du passé qui tient dans son présent, plus lourde est la masse qu’il pousse dans l’avenir pour presser contre les éventualités qui se préparent : son action, semblable à une flèche, se décoche avec d’autant plus de force en avant que sa représentation était plus tendue vers l’arrière. »[1] 
En tout cas, Vladimir Poutine est habité jusqu’à l’obsession et jusqu’à la guerre par une vision impériale de la Russie.

            Pourquoi chercher à faire revivre par les armes un empire mort ? Pourquoi vouloir enfermer de nouveau les peuples dans une prison ? Pourquoi entreprendre un guerre de conquête et d’agression, la guerre injuste par excellence ? Á ces questions, des historiens, des philosophes et des géopoliticiens ont répondu de façon concordante à travers les siècles. Pour Thucydide, les États agissent principalement par crainte, par honneur et par intérêt. Quand un État craint pour sa sécurité, parce qu’il se croit menacé par la haine de ses voisins, il décide d’entrer en guerre pour ne pas laisser les risques et les menaces croître davantage. Tout État doit ménager ses intérêts « quand il s’agit des plus grands risques ». Et quand un État est à la tête d’un empire, il doit le défendre pour sauvegarder son prestige et son honneur. Et Thucydide fait dire aux Athéniens devant les Lacédémoniens et leurs alliés : « C’est ainsi que nous non plus, nous n’avons rien fait d’extraordinaire, ni qui s’écarte des façons d’agir humaines, soit en acceptant un empire quand on nous l’offrait, soit en ne le laissant pas aller quand les plus fortes raisons commandaient : honneur, crainte et intérêt ; avec cela, ce rôle, nous n’étions pas les premiers à le tenir, et il a été toujours chose établie que le plus faible soit tenu en respect par le plus puissant ; en même temps, nous pensons que nous le méritons. »[2]

            Dans Léviathan, publié en 1651, Thomas Hobbes reprend l’analyse de Thucydide en écrivant, au chapitre XIII : « de la sorte, nous pouvons trouver dans la nature humaine trois causes principales de querelle : premièrement, la rivalité [intérêt] ; deuxièmement, la méfiance [crainte] ; troisièmement, la fierté [honneur, Glory]. La première de ces choses fait prendre l’offensive aux hommes en vue de leur profit. La seconde, en vue de leur sécurité. La troisième, en vue de leur réputation. »[3]

            Quant à Raymond Aron, dans son livre Paix et guerre entre les nations (1962), il définit lui aussi les objectifs éternels des États. Il en retient trois : le désir de sécurité, la recherche de la puissance, et la passion de la gloire. Cette trilogie s’inscrit dans la lignée de Thucydide et de Hobbes, auteurs auxquels Aron se réfère explicitement. Le premier objectif de l’État est sa survie, car « dans l’état de nature, chacun, individu ou unité politique, a pour premier objet la sécurité. […] La sécurité, dans un monde d’unités politiques autonomes peut être fondée sur la faiblesse des rivaux (désarmement total ou partiel) ou sur la force propre. »[4] Cependant les États recherchent aussi la puissance, non seulement pour assurer leur sécurité, mais aussi pour être craints [Vladimir Poutine ne brandit-il pas régulièrement la menace nucléaire ?], respectés et admirés. Enfin, la passion de la gloire, cette soif de reconnaissance régionale ou mondiale [être l’un des trois Grands], constitue le troisième objectif de l’État. Á cette triade, Aron en ajoute une autre, celle de la conquête de l’espace, des hommes et des âmes, ce dernier objectif étant réservé aux prophètes armés qui veulent faire triompher leur foi en imposant par la force leurs croyances et coutumes religieuses. 

            « Tout empire périra », a écrit l’historien Jean-Baptiste Duroselle. Dans l’Évangile  selon saint Matthieu, Jésus n’a-t-il pas dit à Pierre : « Rengaine ton glaive, car tous ceux qui prennent le glaive périront par le glaive. »[5] Comme le chante Victor Hugo dans un célèbre poème, Hymne aux morts de juillet,  qui peut s’appliquer aux soldats ukrainiens de nos jours :

Ceux qui pieusement sont morts pour la patrie
Ont droit qu’à leur cercueil la foule vienne et prie.
Entre les plus beaux noms leur nom est le plus beau.
Toute gloire près d’eux passe et tombe éphémère
Et comme ferait une mère
.


  • [1] H. Bergson, « La conscience et la vie », conférence faite à l’Université de Birmingham le 29 mai 1911, Œuvres, PUF, 1963, p. 826.
  • [2] Thucydide, La Guerre du Péloponnèse, Livre I, 75, traduit par Jacqueline de Romilly, Les Belles Lettres, 1953, p. 50-51.
  • [3] T. Hobbes, Léviathan, Éditions Sirey, 1971, p. 123-124.
  • [4] R. Aron, Paix et guerre entre les nations, Calmann-Lévy, 1962, réédition 2004, p. 82.
  • [5] Saint Matthieu, Évangile de Jésus-Christ, chapitre 26, verset 52, La Bible de Jérusalem, Les Éditions du Cerf, 1998, p. 1.725. 

Article complet au téléchargement

Le SNU en 2023

Communication de Sarah El Haïry
Secrétaire d’État chargée de la jeunesse et du SNU

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Mesdames et Messieurs les secrétaires généraux des associations d’auditeurs de l’IHEDN,

Chers amis,

Madame Sarah El Haïry, secrétaire d’état chargée de la jeunesse et du SNU a souhaité vous adresser personnellement un courrier dans lequel elle reprécise ce qu’est le service national universel, son ambition et ses objectifs, car plus que jamais il est nécessaire d’encourager et développer la culture de l’engagement chez les jeunes.

Ce courrier a vocation à être largement diffusé auprès de vos membres, auditeurs et membres associés de vos associations, car tous n’ont pas forcément une idée claire de ce qu’est le service national universel, SNU dans lequel votre engagement pourra être davantage sollicité.

Sincères amitiés.

Jérôme de LabriffePrésident de l’Union-IHEDN

L’IHEDN, c’est QUOI ?

INSTITUT DES HAUTES ÉTUDES DE DÉFENSE NATIONALE

Une Histoire – Une Culture – Un Engagement

1936 : Sous l’impulsion de l’Amiral CASTEX, création du Collège des Hautes Etudes de Défense Nationale.
1948 : L’IHEDN ouvre une session de formation par recrutement élargi, à des personnes particulièrement qualifiées au point de vue économique et social.
1997 : L’IHEDN devient un établissement public administratif, placé sous l’autorité du Premier Ministre. 

Ses missions : 

  • Développer une culture de défense globale.
  • Participer au renforcement de la cohésion nationale.
  • Contribuer au développement d’une réflexion stratégique.

Ses actions majeures : 

  • Réalisation de travaux d’analyse et de réflexion sur l’évolution de la société.
  • Organisation de formations thématiques (nouveaux systèmes d’armes, intelligence économique, stratégie d’influence, lobbying, sécurité numérique etc..).
  • Formations d’auditeurs lors de sessions nationales et régionales qui ont vocation à s’engager au sein de l’Union-IHEDN, avec pour mission la diffusion de l’esprit de défense dans toutes les strates de la société.

La marque de fabrique de l’Union-IHEDN :

  • Un maillage territorial de près de 6000 auditeurs et membres associés, positionnés au plus près de centres de décision et rassemblés au sein d’associations régionales et de comités départementaux.
  • Des auditeurs et membres associés de haut niveau, issus de toutes les composantes de la société.
  • Le bénévolat.

Les sites internet à consulter :

Pour candidater à une session, prendre contact avec le président régional Poitou-Charentes Paul MORIN : paul.morin@orange.fr

Le Comité d’Éthique de la Défense (COMEDEF)

Article écrit le 21 décembre 2022 par Nghia NGUYEN 
– 180e promotion Cardinal de Richelieu
– Professeur au Lycée Jean Monnet (Cognac)

Une création récente

Le Comité d’Éthique de la Défense (COMEDEF) a été créé le 10 janvier 2020 par la Ministre Florence PARLY. Constitué de 18 membres représentatifs, entre autres, du monde des armées, de la recherche et du droit, il a à sa tête un grand commis de l’État, Bernard PÊCHEUR, secondé par l’ancien CEMA, le Général d’armée Henri BENTÉGEAT.

Les avancées scientifiques de la quatrième révolution industrielle, notamment dans le domaine des NBIC (1), posent de graves questions anthropologiques à l’ensemble de la société si ce n’est à la civilisation elle-même. Les armées n’échappent pas à ce questionnement à travers des faits déjà concrets à l’endroit du degré d’autonomie à accorder aux systèmes d’armes, à l’appréhension de nouveaux espaces de bataille mais aussi à l’intégration de capacité nouvelles dans l’organisme des combattants.

Le COMEDEF a, donc, pour mission de réfléchir sur ces questions profondes qui sont de nature à transformer radicalement les guerres qui arrivent. Développant une « réflexion éthique » qui doit accompagner de manière permanente les évolutions scientifiques, il inscrit son action dans une dimension prospective. Le COMEDEF émet donc des avis afin d’informer et de renseigner le MINARM. Il émet des propositions et des recommandations, et ses travaux peuvent être rendus publics. Au-delà, il permettra à notre pays d’élaborer une position internationale en cohérence avec ses valeurs politiques. Avec un logo représentant une boussole, le COMEDEF a pour vocation de donner un cap.

C’est donc pour présenter le comité, sa finalité et ses missions, que Bernard PÊCHEUR s’est rendu sur la BA 709 le mardi 29 novembre 2022. Accompagné par Rose-Marie ANTOINE et Christine BALAGUÉ (deux des dix-huit membres du comité), il fut accueilli par le Colonel Thierry KESSLER-RACHEL, commandant la base aérienne, et le Lieutenant-colonel Thibault RICCI, commandant l’École de l’Aviation de Chasse (EAC). Spécialiste en cyberdéfense, le Colonel KESSLER-RACHEL fut, également, rapporteur du COMEDEF avant sa prise de commandement de la BA 709. Désirant sensibiliser les élèves pilotes – et futurs officiers de l’AAE – aux questions éthiques, il a noué un partenariat avec le COMEDEF qui fait entrer cette réflexion dans le cursus de formation des futurs pilotes de combat.

C’est devant un parterre de personnels de l’EAC, en présence de la presse locale, que les trois membres du COMEDEF présentèrent leurs missions et les travaux jusqu’à présent réalisés : avis sur la défense spatiale, sur l’environnement numérique des combattants, sur l’éthique dans la formation des militaires, sur la notion d’intégration à introduire dans l’usage des SALA (2), sur le soldat augmenté… Avec en filigrane à tous ces thèmes la question omniprésente des avancées en matière d’intelligence artificielle.

De quoi parle-t-on ?

Si l’initiative est éminemment utile, pour ne pas dire d’une urgente nécessité, elle déçoit cependant dès sa présentation. Haut fonctionnaire et juriste de formation, rompu au service de l’État et aux discours institutionnels, M. PÊCHEUR s’est livré à un exercice oratoire particulièrement normatif où son assurance renouvelée dans le Droit, en la constitution et les lois tient lieu de cadre à toute réflexion éthique. « La démarche du COMEDEF s’appuie sur le droit commun qui s’applique à l’ensemble de la société » et « selon le principe de la dignité humaine » affirma t-il. Or, c’est oublier que le droit reste bien relatif et que les lois peuvent évoluer et changer. Surtout, c’est ne pas vouloir dire que la nature humaine c’est justement cela que la révolution du transhumanisme – qui procède directement des NBIC – propose de transformer.

Privilégiant une approche purement juridique des problèmes, le président du COMEDEF engage sa réflexion à partir d’une confusion – qu’il se garde bien de lever – entre les mots «  Éthique » et «  Morale ». Cette confusion, particulièrement conforme à l’air du temps politique et médiatique, est pourtant préjudiciable à l’essentiel. Elle dit surtout ce que l’on désire occulter.
Alors que la Morale se donnera les moyens (valeurs, principes) de distinguer fondamentalement le Bien du Mal, le juste de l’injuste, l’Éthique, elle, se posera comme une réflexion ne s’intéressant pas directement aux objets de la Morale mais à la manière de les (re)définir dans le relativisme voulu par l’époque. C’est donc avant tout à la Morale de précéder et d’éclairer les lois et non aux lois de dire, in fine, ce que devrait être une morale confondue avec l’éthique. Les deux termes ne sont pas synonymes quand bien même les contemporains ont-ils fini par confondre, eux aussi, la fin et le moyen.

L’Éthique dont parle M. PÊCHEUR n’est, au fond, qu’une judiciarisation des évolutions scientifiques et technologiques appliquée aux affaires militaires, dont on se demande s’il y a une place réelle pour une vraie réflexion morale au-delà d’un discours convenu et rhétorique sur la démocratie et l’importance des lois pour garantir la dignité des militaires et de la société.
La place faite au sein du COMEDEF à ceux qui auraient le plus à apporter en matière de Morale et d’Éthique – philosophes, intellectuels, théologiens – dit, à elle seule, l’orientation dans laquelle les promoteurs du comité ont voulu qu’il s’inscrive.

Certes, on trouvera un philosophe en la personne de Jean-Baptiste JEANGÈNE VILMER. Cependant, et sans remettre en cause l’excellence de ses travaux, ce dernier ne représente pas ce que le monde philosophique actuel produit de mieux sur les questions de l’Éthique et du transhumanisme. Recherchant avant tout « des propositions impactantes », le COMEDEF perçoit en fait le débat de fond comme un facteur de paralysie et sacrifie la finalité même de l’Éthique.

Le COMEDEF, un trompe-l’œil ?

« Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes. » La célèbre citation de BOSSUET n’a malheureusement pas pris une ride en ce début de XXIe siècle. Chaque fois que l’on fuit le sens d’un phénomène, on se condamne à un déni qui se rappellera, tôt ou tard, quand bien même se trouverait-on dans les cimes de l’État. Souvent dramatique pour les individus, ce rappel aux réalités humaines pourrait être catastrophique pour la société.

Les questions ne furent pas nombreuses mais quelques-unes furent néanmoins posées quant à la marge de manœuvre du COMEDEF et, au-delà, de la France pour limiter ou s’opposer aux évolutions imposées par les progrès des NBIC. Sachant que ce sont les États-Unis et la Chine qui, aujourd’hui, donnent le tempo en matière de recherche, d’innovations et de pratiques. La France n’a fait que suivre plus ou moins vite, mais elle a toujours fini par suivre comme en témoigne, par exemple, la possibilité désormais donnée aux drones d’exercer des frappes (3). L’alignement stratégique sur les États-Unis ainsi que la mise aux normes OTAN de nos forces armées à tous les niveaux montrent aussi qu’à terme il nous sera impossible de faire différemment en matière de principes lorsque le champ de bataille sera essentiellement robotisé et digitalisé (4). Quant à la distinction entre SALA et SALIA, si elle tient encore aujourd’hui, elle est d’ores et déjà indexée sur la marche de l’intelligence artificielle dont on ne voit pas en quoi la vitesse d’analyse, la capacité à interpréter et à concevoir (5), les possibilités qu’elle donne d’emblée en matière de guerre cognitive ainsi que la volonté, in fine, d’accéder un jour à une IA forte, n’élimineront pas à terme la partie humaine du contrôle de la décision.

Le plus grave demeure cependant la capacité d’aveuglement dont pourraient faire preuve certains membres du COMEDEF sur les sujets même de leurs réflexions. Ainsi, à une autre question posée sur la révolution du transhumanisme, Christine BALAGUÉ, professeur spécialiste des questions numériques, mit en avant les fantasmes portés par le transhumanisme qui en feraient davantage un mythe qu’une réalité ; allant jusqu’à affirmer que « des humains contrôlés par la technologie, ça n’existe pas » (sic). Ironie du sort : au lendemain même de cette affirmation, Elon MUSK annonçait que sa firme Neuralink sera en mesure d’implanter un premier appareil connecté dans un cerveau humain dans les six prochains mois (6).

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  1. Cf. Acronyme pour Nanotechnologies, Biotechnologies, Informatique et Cognitivisme. Les NBIC sont les domaines dans lesquels s’opèrent, de nos jours, les ruptures majeures contemporaines permettant l’entrée de l’Humanité dans l’ère de l’augmentation et du transhumanisme.
  2. Cf. DANET (Didier), « Pourquoi la France a renoncé aux SALA », DSI, 157, janvier/février 2022. L’article reprend la réflexion du COMEDEF qui propose les SALIA (Système d’Arme Létal Intégrant de l’Autonomie) à la place des SALA (Système d’Arme Létal Autonome).
  3. Cf. Le propos n’est pas une opinion sur le bien-fondé ou non d’armer les drones, mais il est de rappeler les longs débats qui ont précédé cette décision d’employer les drones pour des frappes comme le faisaient déjà Américains et Britanniques depuis des années. Débats dans lesquels il n’était pas rare d’entendre politiques et militaires dire qu’ « on ne fait pas la même guerre que les Américains », que l’ « on n’a pas la même culture qu’eux », qu’ « on s’impose toujours des limites »…
  4. Cf. JDEF, “Robots : des nouveaux soldats ?”, 19 décembre 2022. Cette émission du Journal de la Défense présente le COMEDEF.
  5. Cf. Les capacités de l’agent conversationnel ChatGPT de la firme OpenAI présenté pour la première fois en novembre 2022.
  6. Cf. Annonce faite par Elon MUSK le 30 novembre 2022. Cet implant sera une interface permettant à un individu de communiquer par la pensée avec un réseau connecté. L’objectif sera dans un premier temps de pouvoir rendre la vue ou de permettre à un tétraplégique de se mouvoir. Ce bond technologique (breakthrough device) relève de l’INTERNET des corps ou IoB (INTERNET of Bodies) c’est-à-dire de l’intégration dans le corps humain d’objets connectés. Il existe trois générations d’IoB : celle des objets externes connectés au corps (INTERNET of Things ou IoT), celle des implants (capteurs de contrôle médicaux) et celle de la fusion en temps réel homme/machine avec un réseau extérieur. L’annonce du 30 novembre 2022 renvoie à cette dernière génération dite des « corps embarqués ». Elle illustre le problème que porte le transhumanisme dans son essence même. Partant d’une problématique réparatrice – qui peut être légitime car médicale -, il ouvre sur une problématique d’augmentation propre à changer la nature même de notre humanité. Le délai de six mois annoncé par M. MUSK est celui que demande l’approbation administrative de la Food and Drug Administration (FDA), l’agence de santé publique étatsunienne. Mise à jour du 29 mai 2023 – Neuralink a annoncé, le jeudi 25 mai, disposer désormais de l’autorisation administrative pour pouvoir tester ses implants cérébraux.

Le cinquième âge de la guerre navale

Article écrit le 23 mai 2023 par Nghia NGUYEN 
– 180e promotion Cardinal de Richelieu
– Professeur au Lycée Jean Monnet (Cognac)

Compte rendu du traité de tactique navale de François-Olivier CORMAN et Thibault LAVERNHE.

Le problème fondamental des armées est de réussir à penser le prochain conflit qu’elles auront à mener. C’est une préoccupation souvent contrainte par le poids des habitudes du temps de paix, les trop longues parenthèses stratégiques qui peuvent favoriser sclérose et paresse intellectuelles mais aussi des évolutions technologiques inédites que d’aucuns considèreraient trop rapidement comme des révolutions tactiques ou stratégiques en soi.

Renouveler la pensée tactique navale, tel est l’objectif de François-Olivier CORMAN et Thibault LAVERNHE dans ce qui se présente comme un passionnant traité en la matière. Officiers de La Royale, ayant commandé à la mer et poursuivant leur carrière dans la recherche et la prospective (1), les deux auteurs situent leur réflexion dans un changement d’époque qui voit l’émergence de nouvelles puissances navales dont l’agressivité remet en cause à la fois la sécurité collective qui prévalait depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale et l’hégémonie occidentale (étatsunienne) au lendemain de la Guerre froide.
Désormais, la guerre de haute intensité pointe à l’horizon et mers et océans – plus que jamais définis comme des milieux de conflictualité – annoncent le retour du combat naval.

La réflexion des deux auteurs se voudrait donc une anticipation à la fois théorique, doctrinale mais également réflexive et concrète sur le retour du combat naval et la complexité de ses nombreux aspects à notre époque contemporaine qu’ils définissent comme le cinquième âge de la guerre sur mer. D’abord destinée aux officiers de Marine, la réflexion est aussi portée au grand public du fait de la clarté des deux plumes et de leur volonté d’éclairer le plus grand nombre sur les enjeux de la guerre navale.

Hommes d’action et de commandement, les deux auteurs ont d’abord vécu la pratique militaire de la mer avant de l’écrire. Ils en connaissent la complexité et l’ordonne autour d’une réflexion où tous les grands aspects du combat naval contemporain sont abordés : des grands principes à la planification en passant par le capital ship, l’interopérabilité, le C2, le commandement humain…
Plus que structuré par une expérience technico-opérationnelle d’actualité, le propos est aussi charpenté par l’Histoire à laquelle les auteurs reviennent tout au long de l’ouvrage. Ainsi distinguent-ils cinq âges dans la généalogie du combat naval : celui de la voile (XVIe/XIXe siècles), celui du canon et de la torpille (XIXe siècle/Entre-deux-guerres), celui de l’aéronavale (Entre-deux-guerres/années 1960), celui du missile (années 1960 à nos jours).

Le cinquième âge est celui dans lequel nous entrons et dans lequel se livrera la prochaine guerre navale. Cadre contextuel du traité, ce cinquième âge poursuit les troisième et quatrième en y ajoutant les technologies actuelles : automation, dronisation, couches de réseaux, fusion des données, intelligence artificielle
Ce que nous décrivons de nos jours comme les game changers du combat naval moderne. Avec l’émergence de nouvelles puissances maritimes – au premier rang desquelles on pensera à la Chine et à la Turquie – l’écart technologique s’amenuise entre les forces navales au moment où les marines occidentales, engagées dans la gestion de crise depuis des décennies, ont oublié l’affrontement de haute intensité en mer.

Analysant de nombreuses batailles navales, les auteurs montrent qu’il existe des invariants du combat naval quelle que soit l’époque. Ces derniers tiennent à la spécificité physique et géographique du milieu marin mais aussi, et surtout, à un commandement qui n’a pas varié en ses principes. Des campagnes de Suffren au XVIIIe siècle à celle des Malouines menée en 1982 par l’Amiral WOODWARD en passant par la bataille de Koh-Chang en 1941, ces principes demeurent les mêmes à savoir l’autonomie tactique du commandement, la culture de l’initiative, celle de l’audace et last but not least la force morale.
Plus que jamais la guerre demeure un choc de volontés quand bien même celle de demain, à laquelle préparent les auteurs, se fera-t-elle dans un environnement et avec des moyens technologiques inédits.

Illustrant l’adage selon lequel « celui qui tient la mer tient le monde », les deux tacticiens montrent surtout que la maîtrise de la mer est incontournable dans tous les conflits même ceux que l’on pourrait penser au premier abord comme essentiellement aéroterrestres (Irak, Afghanistan, Ukraine…). Que ce soit dans :

  • la sécurisation d’une route maritime,
  • l’acquisition de littoraux,
  • l’accès à un théâtre d’opération,
  • la réorganisation de flux contrariés par un conflit,

il y a toujours un volet naval dans une confrontation. Certes, l’approche relève davantage de la stratégie que de la tactique où la mer apparaît comme un moyen décisif dont le contrôle permet de produire des effets dans d’autres milieux. Si stratégiquement un conflit part de la terre et finit sur la terre, une victoire ou une défaite sur mer est souvent décisive pour permettre ou empêcher une victoire finale.

La première caractéristique du combat naval est d’être avant tout destructeur car, contrairement à la terre, il n’y a pas d’encerclement en mer et les batailles ne durent pas des mois. Les confrontations directes sont souvent courtes dans le temps, brutales et décisives du fait de pertes infligées impossibles à reconstituer dans un temps court. Ces trois aspects – dimension destructrice de la bataille navale, sa contraction dans le temps et son caractère décisif dans une stratégie générale – traversent une réflexion hantée par l’idée d’une Marine dont les commandants ne seraient plus suffisamment préparés au combat naval qui arrive. Mettant en jeu des systèmes et des armements jamais engagés jusqu’à présent dans une guerre navale, ce combat verrait le retour de pertes humaines importantes.

Le combat naval du cinquième âge se caractériserait également – et paradoxalement – par le retour d’un « brouillard de la guerre » sous-estimé par l’illusion de la « transparence » d’un champ de bataille traversé par de plus en plus de robots, de machines autonomes, de drones et par de moins en moins de combattants humains.
Alors que l’interarmisation cherchait jusqu’à présent à coordonner les actions des différentes armées dans un même milieu, le cinquième âge naval est désormais celui de la guerre dans le multimilieux/multichamps (M2MC) : champs informationnel et du cyberespace, milieux de l’espace exo-atmosphérique et des grands fonds.
En plein développement intellectuel au sein des doctrines Terre/Mer/Air et Espace, le concept du M2MC se caractérise d’emblée par un obscurcissement informationnel et une interaction en temps réel de plusieurs milieux et champs de nature différente dont la conséquence est de faire resurgir un brouillard de la guerre que l’innovation technologique cherchait jusqu’à présent à réduire.

Étude fouillée qui nous projette dans une prospective de la guerre navale telle qu’elle se déroulerait tout à l’heure ou demain, mais en gardant en main courante les enseignements fondamentaux de l’Histoire, Vaincre en mer au XXIe siècle fera date dans l’évolution de la pensée navale française.

Réserve Communale de Sécurité Civile

Par Maxence JOUANNETAuditeur du Comité Aunis-Saintonge
– Colonel de Sapeurs-Pompiers en retraite
– Ancien directeur départemental du SDIS 87 – Limoges