Le rallye citoyen : une manifestation citoyenne autour de l’Esprit de Défense

Article écrit le 24 mars 2023 par Nghia NGUYEN 
– 180e promotion Cardinal de Richelieu
– Professeur au Lycée Jean Monnet (Cognac)

Manifestation annuelle organisée par le Trinôme académique (1) et les acteurs de la Défense (armées, Gendarmerie nationale, Police nationale, SDIS, protection civile, associations), le rallye citoyen a pour vocation de faire vivre concrètement la citoyenneté à travers un apprentissage de la cohésion et de l’engagement autour de l’Esprit de Défense. Il se déroule dans le camp militaire Broche situé sur la commune de Dirac, à une quinzaine de kilomètres au sud-est d’Angoulême.

Pilotés par la Délégation Militaire Départementale de Charente (DMD 16), les rallyes citoyens débutent par un lever de drapeau en présence des équipes lycéennes, des organisateurs des différents ateliers et de l’autorité publique représentée par le Préfet ou son second. À l’issue de cette ouverture, ce sont entre 15 et 20 ateliers que les élèves parcourent jusqu’en fin d’après-midi. Les activités présentées y sont variées allant du simple questionnaire au parcours d’obstacles en passant par du tir (plomb/laser) et les gestes de premiers secours. Utilisation d’une boussole et lecture d’une carte, portage d’un blessé sur un brancard, pose d’un garrot, maniement d’une lance d’incendie sont autant d’initiations dispensées sous forme d’épreuves chronométrées.

Tout en apprenant des gestes concrets dans une ambiance stimulante (port d’équipements, utilisation de matériels, sollicitation à la fois de la réflexion et des capacités physiques), les lycéens sont incités à agir dans un esprit d’équipe où goût de l’effort, dépassement de soi et action collective sont évalués. Ils sont dans le même temps sensibilisés aux problématiques de notre défense contemporaine : conflits militaires, sûreté intérieure, protection civile, sécurité routière et jusqu’aux enjeux historiques et mémoriels (2).

Les rallyes citoyens de l’année scolaire 2022-2023

Après deux victoires consécutives en 2019 et 2021 (3), le Lycée Jean Monnet est revenu dans la course le mercredi 12 octobre 2022 affrontant 12 autres lycées charentais soit 17 équipes adverses (4). Pour ce rallye qui s’adressait à des élèves du niveau de Première, Marie, Mathéo, Sasha, Adrien, Ilan, Malo, Mathis et Youri formaient une équipe bien décidée à l’emporter : les Robins urbains.

En dépit de ce moral élevé, de réelles performances et d’une tenue exemplaire remarquée par tous les organisateurs, les Robins urbains n’arrivèrent malheuresement qu’en deuxième position sur le podium. Manquant de peu la première marche, ils durent remettre le trophée à l’une des deux équipes du Lycée Élie Vinet de Barbézieux. La déception fut d’autant plus grande qu’en voyant s’échapper une troisième victoire consécutive, les Robins urbains savaient qu’ils perdaient également l’occasion de donner définitivement le trophée du rallye citoyen au Lycée Jean Monnet (5).

Cinq mois plus tard ce fut donc à une nouvelle équipe que revint la mission de reprendre à la fois la première place et le trophée. Le rallye du mercredi 22 mars 2023 mit en compétition 10 lycées et 13 équipes du niveau de Seconde cette fois. En présence de Juliette BRUNEAU, sous-préfète de Confolens, le chef d’équipe Alex (2nde 4) fut choisi pour lever les couleurs avant d’emmener ses camarades de l’équipe 1 – Eliott, Quentin, Erwan, Arthur, Victoria et Timéo – au cri de Passavant li meillor ! (6).

Ce fut une rude journée où le potentiel de l’équipe fut d’emblée affaibli par l’absence d’un camarade au départ de Cognac. Une hypoglycémie dans la matinée fit craindre la perte d’un deuxième élève, fort heureusement rétabli avec quelques barres de céréales… Surtout, les lycéens eurent à affronter deux parcours particulièrement difficiles physiquement : ceux des 1er RIMa et 515e RT. Celui du 515e RT fut réalisé en toute fin de rallye alors que la fatigue de la journée se faisait sentir dans les bras et les jambes. Dans un dernier effort, les secondes de Jean Monnet accomplirent l’épreuve, revêtus chacun d’une « frag » de 15 kilos, portant un FAMAS Blueguns (7) et brancardant un lourd mannequin. Alors qu’habituellement les rallyes citoyens mettent en œuvre deux exercices de brancardage en tout terrain (SDIS et 1er RIMa), il y en eut trois pour cette treizième édition. Jusqu’au bout cependant les lycéens témoignèrent d’un excellent état d’esprit et d’une discipline qui fut remarquée du début à la fin. Cette belle cohésion fit très certainement la différence, en leur permettant notamment de rattraper certains points de pénalités.

L’annonce des résultats est le grand moment qui tient en haleine les participants jusqu’au bout. Sur le nombre d’équipes présentes, élèves comme accompagnateurs espèrent bien être appelés en dernier : la proclamation par le jury commençant par l’équipe ayant obtenu la note la plus basse. L’espoir grandit lorsque l’on entre dans le cercle des cinq premières équipes, mais devient en même temps suspens intolérable jusqu’à l’annonce de la troisième et de la deuxième…

Ce fut donc une belle victoire qui, ce jour-là, permit au Lycée Jean Monnet de reprendre sa première place ainsi que le fameux trophée qui sera conservé jusqu’à l’automne prochain, date à laquelle il sera de nouveau remis en jeu. En attendant, le grand lycée public de Cognac peut être fier de ses belles équipes : celle qui n’a aucunement démérité au mois d’octobre et celle qui l’a emporté en mars.

  • (1) Cf. Le Trinôme académique est l’institution qui, au sein de chaque académie, est en charge de l’Éducation à la Défense. Il s’organise autour de trois piliers : le MINEN, le MINARM et l’IHEDN.
  • (2) Cf. Avec notamment la présence de l’ONACVG et de l’association des ordres nationaux.
  • (3) Cf. L’année 2020 a vu l’annulation du rallye citoyen du fait de la crise sanitaire.
  • (4) Cf. Certains lycées présentant plusieurs équipes à la fois.
  • (5) Cf. Le trophée du rallye est une coupe distincte de celles des trois premières équipes arrivées en tête. Un lycée doit le gagner trois fois de suite pour pouvoir le garder définitivement. En attendant, le trophée est conservé temporairement par le lycée ayant remporté le dernier rallye.
  • (6) Cf. Ce cri de guerre en ancien français, choisi par les élèves eux-mêmes, fut celui des comtes de Champagne au Xe siècle. Il signifie « Que le plus brave s’avance contre nous ! »
  • (7) Cf. La « frag » désigne un gilet balistique. Le Blueguns est un bloc de polyuréthane bleu reproduisant la forme et le poids (4 kg pour le FAMAS) d’une arme (fusil d’assaut, arme de poing, arme blanche). Les répliques Bluegunspermettent aux soldats de s’entraîner sans abîmer les armes réelles.

Les lycéens de Jean Monnet visitent l’ENSOA

Article écrit le 9 mars 2023 par Nghia NGUYEN 
– 180e promotion Cardinal de Richelieu
– Professeur au Lycée Jean Monnet (Cognac)

Le mercredi 12 octobre 2022, Marie, Mathéo, Sasha, Adrien, Ilan, Malo, Mathis et Youri participaient à la 12e édition du rallye citoyen Charente sur le camp militaire Broche. Affrontant dans une série d’épreuves 17 équipes provenant de 12 lycées, l’équipe représentant le Lycée Jean Monnet arriva en deuxième position derrière le Lycée Élie Vinet de Barbézieux. Déçue mais bien présente sur le podium, l’équipe des Robins urbains (1) reçut en récompense une invitation à visiter l’École Nationale des Sous-Officiers d’Active de Saint-Maixent.

La Maison mère des sous-officiers de l’Armée de Terre (2)

Héritière de l’École Militaire d’Infanterie (EMI), l’ENSOA est installée à Saint-Maixent depuis le 1er septembre 1963 (3). Elle dépend du Commandement de la Formation de l’Armée de Terre (COMFORM), le commandement en charge de la formation des officiers, sous-officiers et militaires du rang de l’Armée de Terre. L’École est organisée autour de 3 sites urbains représentant 1000 ha et d’un camp de manoeuvre :

  1. Le Quartier Largeau où réside le général commandant l’École.
  2. Le Quartier Marchand où se trouve le Musée du Sous-Officier et l’hôtel des cadres célibataires.
  3. Le Quartier Coiffé est le coeur de l’ENSOA. On y trouve les installations essentielles avec l’état-major de l’École, les bâtiments logeant les 5 bataillons d’élèves sous-officiers (ESO), une zone d’instruction avec 35 salles de cours, le simulateur de tir, la zone technique, le foyer… À l’ouest du Quartier Coiffé se situe le complexe sportif du Panier fleuri. Ce vaste espace accueille 2 stades, 3 parcours d’obstacles, des gymnases et salles de fitness, un centre de plongée, une piscine et un pas de tir.
  4. Le camp de manœuvre est celui d’Avon situé à 15 kilomètres au nord-est de la ville de Saint-Maixent. Espace bocager occupé par 7 fermes et un village de combat urbain, le camp d’Avon permet aux ESO de s’entraîner au combat élémentaire et à leurs missions de chef de groupe.

Maison mère des sous-officiers de l’Armée de Terre, l’ENSOA est au corps des sous-officiers ce que les Écoles de Coëtquidan sont au corps des officiers.
Sa devise est « S’élever par l’effort » et son chant « Jeune Chef ».

  • École prestigieuse, elle a formé 358 promotions de sous-officiers de sa création à ce début d’année 2023 (4).
  • Chaque promotion porte le nom d’un sous-officier tombé au combat et, depuis la 88e promotion Adjudant LE POITEVIN, chacune reçoit un insigne sur lequel apparaît le symbole de l’École : une main brandissant un glaive.
  • Paradoxalement et alors que la Guerre d’Indochine (1945-1954) reste l’un des conflits les moins connus des Français – l’un des moins étudiés dans l’enseignement secondaire aussi -, cartes et références indochinoises reviennent dans de nombreuses représentations d’insignes de promotion indiquant l’importance du sacrifice des sous-officiers durant cette guerre.

Une école de chefs

S’inspirant d’une chanson de musique country, le Lieutenant CHAILLEY écrivit en 1963 un texte que le Chef de musique principal Gaston GALLAS mettra en partition en 1970 (5). L’ensemble deviendra la marche de l’École. Entonné depuis par des centaines de promotions, le chant « Jeune Chef » ne peut mieux exprimer – et inspirer – la vocation de l’ENSOA à former des chefs. Du grade de sergent à celui de major, les sous-officiers constituent un maillon essentiel dans la chaîne de commandement au point qu’ils sont qualifiés de «  cheville ouvrière  » du commandement. Ce sont eux qui mettent en application les ordres sur le terrain, et qui commandent au plus près partageant la dureté de la vie des soldats. Leurs responsabilités techniques, tactiques, d’encadrement et d’instruction sont immenses et incontournables au point que nombre de jeunes officiers reconnaîtront devoir la réussite de leur temps de commandement en section grâce au soutien inestimable de leurs sous-officiers qu’ils aient été adjoints ou simples subordonnés. Toutes les armées ne disposent pas de ce vivier sous-officier ni de cette culture décentralisée du commandement. Il en résulte un défaut dans l’encadrement de la troupe et dans la souplesse tactique au combat dont les conséquences peuvent s’avérer graves : manque de contrôle des troupes, mauvaise interprétation des ordres, pertes élevées… C’est, par exemple et à l’heure actuelle, l’une des grandes déficiences de l’armée russe en Ukraine.

Certes, au quotidien la cohabitation n’est pas toujours facile entre les deux catégories de chefs. Sous-officiers et officiers ne sont pas situés au même niveau des missions. La répartition des tâches et des compétences techniques, les mises en œuvre opérationnelles ne sont pas les mêmes, et ne sont souvent pas perçues de la même manière dans un contexte où les conflits d’autorités ne manquent pas. L’appréhension d’une même mission se fera toujours à deux niveaux différents selon que l’on soit officier ou sous-officier. Cependant, lieutenants et capitaines comprendront rapidement que le grade n’est pas suffisant pour commander leurs sous-officiers, et qu’il leur faudra à la fois une réelle autorité comme une compétence technique et tactique avérée pour gagner l’estime et la loyauté de ces derniers.

Inversement un jeune sous-officier devra accomplir ce même travail de compétence en direction de la troupe tout en comprenant les impératifs élémentaires du commandement. Il devra exercer la part la plus rude de celui-ci sans en avoir pour autant la supervision de son lieutenant et de son capitaine. Avec l’expérience et l’ancienneté beaucoup de sous-officiers finissent d’ailleurs par exercer des commandements d’officiers dans les unités, devenant à leur tour des chefs de section et de peloton à part entière. Pour les plus capables, l’Armée de Terre leur offrira la possibilité de devenir officier par la voie du recrutement interne via, entre autres, l’École Militaire Interarmes (EMIA). La valeur ajoutée de ces officiers passés par le corps des sous-officiers est alors grande et particulièrement appréciée.

De fait et eu égard au besoin en sous-officiers, l’ENSOA n’a cessé de grandir au fil des ans accueillant de plus en plus d’ESO. Aujourd’hui, le Quartier Coiffé est une véritable ville dans la ville qui compte un personnel école de 565 personnes encadrant et voyant annuellement un passage de 6300 ESO ainsi que la sortie de 10 promotions (6) ! Si 25% des promotions sont féminisés – soit une moyenne très supérieure à celle de la féminisation de l’Armée de Terre (16%) -, le 3e bataillon fut le premier à accueillir des ESO féminins dès 1984. Le 5e bataillon a été créé en 2015 et un 6e est en cours de création.

La mission essentielle de l’ENSOA est de former des sergents chefs de groupe à partir d’un recrutement direct. Dans un premier temps, les recrues issues de la société civile apprennent leur métier de soldat. Ce premier apprentissage est approfondi durant 8 mois afin de donner aux futurs sous-officiers la qualité physique, technique et tactique dont ils auront besoin pour commander, instruire et éduquer eux-mêmes les soldats. À leur sortie de l’ENSOA les ESO – désormais sous-officiers élèves et non plus élèves sous-officiers – ne sont cependant pas immédiatement envoyés en unité. Ils effectuent un passage dans une école d’application où ils apprennent une spécialité technique ou tactique.

À ce recrutement direct, l’ENSOA offre également une possibilité de promotion interne pour des militaires déjà installés dans le métier depuis plusieurs années. Par ce recrutement indirect, certains militaires du rang peuvent ainsi devenir sous-officier avec une formation plus courte mais qui reste tout aussi sélective. L’ENSOA c’est aussi une formation continue pour les sous-officiers qui ont les capacités d’exercer les responsabilités d’adjoint de chef de section et de chef de section. Ces deux niveaux de formation s’adressent aux sous-officiers les plus méritants et expérimentés à partir de 6 et 9 ans de carrière.

C’est donc une belle École, n’ayant jamais autant formé dans son histoire, que les lycéens de Jean Monnet ont visité le lundi 6 mars 2023. Ils s’initièrent à la simulation opérationnelle à partir de la plateforme VBS3, s’informèrent des effets balistiques des munitions au sein du simulateur de tir SITTAL, et s’exercèrent à la manipulation de l’armement d’infanterie. Après un déjeuner en ration de combat et la visite du Musée du Sous-Officier, les élèves eurent également l’occasion d’observer l’entraînement de deux sections au parcours d’obstacles.

Les lycéens et leur professeur remercient le Commandant Loïc qui fut leur accompagnateur tout au long de cette riche journée.

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  • (1) Cf. Le nom que s’étaient choisis les lycéens et qu’ils criaient fièrement avant et après chaque épreuve.
  • (2) Cf. École Nationale des Sous-Officiers d’Active. S’élever par l’effort, Poitiers, 2018, 126 p.
  • (3) Cf. L’EMI est installée à Saint-Maixent de 1881 à 1940. Sa vocation est de former des officiers issus du corps des sous-officiers (recrutement interne). Ses bataillons sont sacrifiés durant la campagne de France de 1940. Reconstituée au lendemain de la guerre, l’EMI est transférée à Coëtquidan. C’est en accueillant l’ENSOA, à partir de 1963, que la ville de Saint-Maixent devient Saint-Maixent-l’École.
  • (4) Cf. Cette année, l’ENSOA fête son 60e anniversaire (1963-2023). Les 17 et 18 juin se tiendront les portes ouvertes de l’École.
  • (5) Cf. BOUZARD (Thierry), « Les chants militaires français d’origine étrangère », in Inflexions, 34, 2017/1, pp. 61-77.
  • (6) Cf. La ville de Saint-Maixent-l’École compte une population civile de 7200 habitants.

Sensibiliser les lycéens à la cyberdéfense

Article écrit le 22 janvier 2023 par Nghia NGUYEN
180e promotion Cardinal de Richelieu
– Professeur au Lycée Jean Monnet (Cognac)

D’abord spécialiste dans le soutien technique d’aéronefs, le Colonel Thierry KESSLER-RACHEL s’est par la suite orienté dans le domaine de la cyberdéfense (1).
Après une formation dans la sécurité des systèmes informatiques qui lui ouvrit de nouvelles responsabilités, il exerça comme chef du centre des opérations cyber au sein du tout nouveau COMCYBER (2) avant de devenir l’actuel commandant de la base aérienne 709.

C’est en tant que spécialiste en cyberdéfense qu’il vint à la rencontre des élèves de la Terminale G4 du Lycée Jean Monnet ce jeudi 19 janvier 2023. Avec le double objectif d’éclairer les jeunes esprits sur les enjeux cruciaux que pose l’omniprésence du cyberespace dans nos vies individuelles comme professionnelles, et celui de présenter les différents parcours pouvant mener aux nombreux métiers de la cyberdéfense, l’officier fit un exposé mêlant à la fois perspective historique, enjeux contemporains et données techniques. Son propos fut d’autant plus intéressant qu’il fut accessible pour un public de lycéens nonobstant sa technicité.

Ces derniers furent d’abord introduits dans le sujet par l’Histoire de la cryptographie (le fait de rendre incompréhensible un message afin d’en protéger les informations) dont l’usage remonte à l’Antiquité. Plus proche de nous, la guerre cryptographique menée par les Alliés durant la Deuxième Guerre mondiale avec les exemples de la bataille de Midway en 1942 et la capture des livres de code de la machine allemande Enigma.

Une chronologie simple permit ainsi de tracer une problématique de protection des informations et des chaînes de décision de l’Antiquité à nos jours que vint remettre en cause la première grande cyberattaque de l’Histoire.

  • En 2007, l’Estonie alors pays le plus numérisé au monde subit une attaque cybernétique d’une ampleur inédite paralysant ses institutions et son économie. Cette attaque – que beaucoup attribuaient à la Russie – est restée à la fois un marqueur et une rupture faisant émerger de véritables doctrines nationales de cyberdéfense.
  • D’autres attaques mettant en œuvre des virus particulièrement dangereux ont eu lieu depuis (STUXNET, Snowden, Wannacry, Solarwinds…), et l’évolution technologique permet désormais de mettre en œuvre des processus de dissimulation autrement plus sophistiqués dépassant la cryptographie classique.
  • Ainsi, le pixel d’un fichier jpeg, qui en contient des centaines de milliers, peut de nos jours cacher une information codée voire un virus. L’exemple permit d’introduire la notion de stéganographie (technique de dissimulation de l’information).

Partant d’une définition du cyberespace à travers ses trois couches (physique, logique, cognitive), le Colonel KESSLER-RACHEL s’employa à mettre en place les grands principes de la guerre informatique sur ses trois volets essentiels : défensif, offensif et lutte d’influence.
La guerre informatique a pour objectif d’atteindre ou d’assurer en permanence la disponibilité, l’intégrité et la confidentialité des informations : un triptyque fondamental et incontournable.
La posture de cyberdéfense posera d’abord la question de savoir ce que nous voulons protéger et contre qui/quoi. Elle cherchera ensuite à empêcher l’extension d’une attaque à l’ensemble d’un système pour finir par l’identification de la source de la menace et de l’attaque.

Ce dernier point est ce que l’on appelle l’ « attribution ». L’officier souligne son extrême difficulté eu égard au trop grand nombre d’acteurs (individus, organisations plus ou moins clandestines, mafias…) pouvant entrer en jeu, voire son impossibilité lorsqu’il s’agit d’un État…
Quant aux cyberattaques que nous pourrions mener, elles sont frappées du sceau de l’ultra confidentialité afin de ne pas révéler à la fois les failles et les cibles visées. La lutte contre l’État islamique a, par exemple, fait l’objet de mesures de cyberdéfense et de cyberattaques.

La cyberguerre est d’autant plus complexe qu’elle peut faire aussi intervenir des actions qui ne viennent pas directement du cyberespace. La bataille peut revêtir une dimension matérielle à travers des dommages infligés aux infrastructures :

  • Couper des câbles sous-marins,
  • Élever la température dans les data centers,
  • « Abandonner » des clés USB infectées…

Face à ces menaces dont les implications ne sont pas toutes connues, la France s’est donnée en 2017 un commandement interarmées entièrement dédié à la cyberguerre le Commandement Cyber (COMCYBER).
L’année suivante, une doctrine officielle de lutte informatique offensive a vu le jour pour la première fois ; les publications de la politique de lutte informatique défensive et de la lutte informatique d’influence ont suivi.

La cyberguerre a, en fait, déjà commencé et elle est permanente. Elle fait partie de ces nouveaux déséquilibres contemporains qui contournent désormais l’alternance classique du cycle paix-guerres.

  • En 2010, les Etats-Unis annonçaient déjà qu’ils considéreraient les cyberattaques comme des actes de guerre pouvant être militairement traités en retour.
  • À partir de 2013, émergeait aussi Outre-Atlantique la notion de « Pearl Harbor cybernétique ».
  • En France, le MINARM mais aussi les hôpitaux ou les mairies subissent très régulièrement des attaques majeures.

Tout en menant son exposé, le Colonel KESSLER-RACHEL développa – à partir d’exemples concrets du quotidien – un véritable questionnement sur la nécessité d’adopter une hygiène informatique.

  • La posture de défense est d’abord individuelle tant les failles dans les systèmes sont avant tout… humaines.
  • Projetant les lycéens dans un avenir professionnel proche, il les encouragea à porter cette sensibilisation au plus haut niveau de leur future entreprise en obtenant, par exemple, l’adhésion de leurs responsables de services et de direction sur la question de la cybersécurité.
  • L’enjeu peut sembler évident mais achoppe trop souvent sur les efforts budgétaires réclamés par une véritable traduction opérationnelle de la cyberdéfense sur le terrain… Il faut donc convaincre de l’intérêt de celle-ci pour le service, l’entreprise, voire pour la stratégie globale de cette dernière.
  • (1) Cf. Il est l’auteur de plusieurs articles sur le sujet avec entre autres BUSSER (Marion) et KESSLER-RACHEL (Thierry), « La culture du choc. Fluctuat nec mergiteur », in DSI, 148, juillet-août 2020, pp. 84-87. BUSSER (Marion) et KESSLER-RACHEL (Thierry), « Y a-t-il un pilote dans la donnée ? », in Revue Défense Nationale, 847, 2022/2, pp. 93-98. BUSSER (Marion) et KESSLER-RACHEL (Thierry), « La donnée et la guerre : vers la guerre « donnée-centrée » ? », in Revue Défense Nationale, 854, 2022/9, pp. 18-23.
  • (2) Cf. Le JDEF du 27 juin 2022 « Cyber, un combat virtuel bien réel » pour approfondir.

Art opératif

Par Bernard PENISSSON – titulaire d’un doctorat en histoire ( Paris I – Panthéon Sorbonne), agrégé de l’Université, auditeur IHEDN (SR 143), membre du comité 86

Marc FIARD, Vice-Présidant du comité 86 nous avais recommandé, à juste titre, la lecture du livre Conduire la guerre, sur l’art opératif, de Bihan et Lopez.
Je l’ai lu avec intérêt et j’en ai tiré quelques citations à la suite, car elles peuvent éclairer la conduite de la guerre en Ukraine, les deux adversaires ayant été formés au départ à la même école stratégique. Svetchine a aussi été très influencé par Clausewitz.
J’ai  ajouté une petite introduction légèrement ironique.  

Si je devais enseigner l’art de la guerre aux enfants, je définirais trois concepts fondamentaux à l’aide de quatre adverbes interrogatifs (niveau : grammaire de l’école primaire). Après tout, si l’on en croit Clausewitz, la guerre a sa grammaire et la politique sa logique. Mais si la guerre échappe à la politique, elle poursuit sa propre logique, qui est la montée aux extrêmes et le risque de l’anéantissement réciproque des adversaires. Mais revenons à nos concepts et à nos adverbes.

  • Stratégique : pourquoi faire la guerre ? (buts)
  • Opératique : où et quand conduire la guerre ? (espace-temps)
  • Tactique : comment faire la guerre ? (moyens)

Ce qui retiendra ici mon attention, pour essayer de me hisser au niveau des auditeurs de l’IHEDN, c’est le livre de Benoist Bihan et Jean Lopez, Conduire la guerre. Entretiens sur l’art opératif, Perrin, 2023, 396 p.
Les deux auteurs mènent une série d’entretiens approfondis sur le livre du stratégiste soviétique Alexandre Svetchine (1878-1938), Stratégie, paru à Moscou en 1926-1927 et traduit longtemps après en anglais (Strategy, Minneapolis, East View Publishing, 1992), mais pas encore en français. Trop intelligent et donc dangereux, Svetchine fut fusillé sur l’ordre de Staline le 28 juillet 1938. Il fut réhabilité par Khrouchtchev en 1962. Après la guerre du Vietnam, les militaires américains adoptèrent le concept d’art opératif de Svetchine, signe de la reconnaissance internationale du talent exceptionnel de ce général soviétique.

De l’art opératif, Jean Lopez donne la définition suivante : « L’art opératif est une discipline militaire à laquelle est confiée la tâche centrale d’organiser l’activité militaire en ‟ opérations ˮ, sur la base de buts fixés, eux, par la stratégie » (p. 78).
Selon Svetchine, l’art opératif c’est : « Combiner les opérations pour atteindre le but final de la guerre » (p. 81).

Benoist Bihan donne ensuite la définition de l’art opératif selon Svetchine : 

[C’est] « Une action de guerre si les efforts des troupes sont dirigés, sans interruption, vers l’atteinte d’un certain but intermédiaire dans un théâtre d’opérations militaires donné. Une opération est un conglomérat d’actions bien différentes, à savoir :

  • l’élaboration du plan de l’opération ;
  • les préparatifs logistiques ;
  • la concentration des forces amies sur leur position initiale ;
  • l’exécution de travaux défensifs ;
  • faire mouvement ;
  • livrer des batailles qui mènent à l’encerclement ou à la destruction d’une portion des forces hostiles, soit comme résultat d’un enveloppement direct, soit comme résultat d’une percée préliminaire, et capturer ou tenir une certaine ligne ou une position géographique donnée. […]

Le succès dans le développement d’une opération dépend à la fois des solutions pour chacun des problèmes tactiques et de la fourniture de tous les moyens nécessaires à la conduite de l’opération sans interruption jusqu’à ce que son but final soit atteint. Sur la base du but d’une opération, l’art opératif fixe toute une série de missions tactiques et un certain nombre de prérequis logistiques » (p. 84-85).

« Une opération est d’abord définie par son but, qui est fixé par la stratégie. Alors que la stratégie poursuit des buts, la tactique résout des problèmes, distinction fondamentale. L’opération est donc le cheminement par lequel la stratégie atteint les buts qu’elle s’est fixés » (p. 85).   

« Svetchine définit l’opération comme une séquence continue, ‟ ininterrompue ˮ, jusqu’au but fixé. Continue ne veut pas dire que les troupes  se déplacent et combattent sans arrêt, mais que l’action est entretenue dans la durée jusqu’à l’atteinte de l’objectif.
On peut donc définir l’opération comme la matérialisation – sous la forme d’une combinaison d’activités militaires de natures variées entretenues dans la durée – du cheminement par lequel la stratégie entend parvenir à l’un des buts qu’elle se fixe dans un espace-temps donné, espace-temps qui dépend des buts politiques poursuivis » (p. 91). 

Les formes de l’opération : destruction et attrition

« Svetchine n’établit pas un catalogue de formes, comme il peut y en avoir pour la tactique – avec par exemple la percée, l’enveloppement simple ou double, la feinte, l’encerclement, etc. Selon lui, l’opération découle de son but, et c’est sur la base de ce but que se décide la forme opérative. En dernière analyse, cette forme se détermine selon trois couples d’opposés : anéantissement (ou « destruction ») et attrition, offensive et défensive, manœuvre et positions. ‟ Chaque forme, dit Svetchine, a un effet important sur la ligne de conduite stratégique ˮ ; c’est-à-dire sur le cheminement vers le but de la guerre » (p. 93-94).

Offensive et défensive

« Pour le penseur russe, offensive et défensive ne s’opposent pas dans l’opération mais sont des formes complémentaires ; ce qui modifie l’aspect d’une opération donnée est le dosage entre elles. En effet, même si ‟ chaque opération est inévitablement une combinaison de moments défensifs et offensifs ˮ, c’est encore une fois le but fixé qui détermine la forme dominante : ‟ Nous faisons la différence entre des opérations offensives et défensives selon que le stratège fixe des buts positifs ou négatifs. L’avancement d’une série de buts positifs caractérise une offensive stratégique, tandis qu’une série de buts négatifs caractérise une défense stratégique. ˮ Mais une défense stratégique peut, et doit, inclure des « moments » offensifs, de la même manière qu’une offensive stratégique comporte nécessairement une dimension défensive […] y compris dans une logique d’anéantissement de l’adversaire. » (p. 103-104). [C’est un raisonnement très clausewitzien]            

« L’art opératif […] est bien une émanation de la stratégie et non une construction sur la base de la tactique, un distinguo absolument fondamental […] » (p. 109).

Rallye Citoyens de Beurlay (17)

Extrait de la typologie des actions du trinôme académique
Le rallye citoyen est une action pluridisciplinaire d’enseignement de défense proposant aux élèves de participer à un parcours aux dimensions citoyennes, sportives et mémorielles, à travers différentes activités ou ateliers proposés par l’Éducation nationale, les armées, l’Union-IHEDN et de nombreux partenaires publics, associatifs ou privés (y compris SDIS ou associations agréées de sécurité civile).
Des ateliers pourront promouvoir les autres éducations transverses
(ex : le développement durable, l’éducation aux médias et à l’information) dans l’objectif d’acquérir une culture de l’engagement au profit de la collectivité.

Vue n° 2 – La feuille de route est claire, mais les budgets ne sont pas prévus.

Vue n° 3 – Un projet plein de bonnes intentions mais en dehors de toute règle élémentaire de gestion de projets.
Le triangle Coûts-Qualité-Délais est totalement absent :
– Aucun budget n’est mis en place,
– Les objectifs sont d’une banalité affligeante (adapter les contenus à l’âge des participants et intégrer une dimension mémorielle),
– Aucun délai n’est fixé et le découpage par cycle est totalement ignoré.

Vue n° 4 – Comment faire avec rien ou presque

La cybersécurité à Rochefort

Colloque Cybersécurité
Face aux risques socio-économiques liés à la cybersécurité, quelles sont les compétences à acquérir ? Nouveaux enjeux pour notre jeunesse.
Mardi 9 mai 2023 de 13 h 15 à 18 h 15
Palais des Congrès de Rochefort

Point de contact : Paul Morin, président de l’association régionale Poitou-Charentes de l’Union des Auditeurs de l’Institut des Hautes Études de Défense Nationale.
Réponses et inscriptions : colloquecyber@ihednpoitoucharentes.fr

Perception de la France et de ses entreprises en Afrique

Par Patrick SEVAISTRE et de Jean-Marc BRAULT de BOURNONVILLE

Patrick Sevaistre : Président de la Commission “Institutions Européennes” du CIAN [Conseil français des investisseurs en Afrique].
Jean-Marc Brault de Bournonville : Ancien directeur de différentes filiales AGF en Afrique et ancien Président des Conseillers du Commerce extérieur de la France.

Analyse de l’actualité économique – Janvier 2023

Par Jacques-Louis KESZLER et Olivier PASSET

Depuis plus de trente ans Jacques-Louis KESZLER accompagne les PME dans leur adaptation au monde qui change, dans leur stratégie de marges et dans l’animation de leur personnel pour lui faire donner le meilleur de lui-même.
– Consultant Associé chez KESZLER & Compagnie (1997 à aujourd’hui).
– Gérant de la PME Visuel F Conseil dans le cadre de son redressement (2000-2004).
– Gérant de l’institut de recherche et d’action commerciale de Paris (1998-2000).
– Directeur fondateur de l’école supérieure de commerce de La Rochelle [Excellia] (1988-1996).

Olivier PASSET est économiste et directeur des synthèses économiques chez Xerfi. Il est notamment chargé du suivi des politiques économiques et des mutations de l’appareil de production.

19 oct. 2022 – La guerre en Ukraine, nous place face à une nouvelle polarisation du monde, entre l’Occident développé, sous leadership américain, et l’Orient émergent qui conteste ce leadership. À travers cette fracture, sans rigueur géographique, c’est la rivalité entre deux blocs d’intérêts que nous pointons. […]
16 nov. 2022 – Quelque chose cloche encore et toujours dans la compétitivité hexagonale. Voici bientôt 10 ans que la France est engagée dans des politiques de l’offre. Modérant la hausse du salaire minimum. Allégeant la fiscalité sur les entreprises et poursuivant la baisse des charges sur les bas et moyens salaires. […]

Rallye Citoyen de la Charente

Rallye Citoyen de la Charente le 12 octobre 2022 au Camp de Broche à Dirac.

Mercredi 12 octobre 2022, 144 jeunes des classes de première des lycées de la Charente, ont participé à la 12 édition du rallye citoyen qui s’est déroulée au camp de Broche à Dirac.
Soutenue par le trinôme académique, cette manifestation d’envergure était organisée de main de maître par la Délégation Militaire Départementale de la Charente.
Partenaire du trinôme académique, l’association Poitou-Charentes des Auditeurs de l’Institut des Hautes Études de Défense Nationale [AR-18] a participé activement à cette manifestation.
Représentée par Pierre WAENDENDRIES, membre du comité de la Charente et par Paul MORIN, président de l’association régionale, notre association a présenté aux participants, un QCM (Questionnaire à Choix Multiples) sur le  thème de l’Europe.
Préparé  par Muriel OUVRARD, membre du comité de la Charente et secrétaire-générale adjointe du comité directeur de l’AR-18, par Dominique FAURE, vice-président de l’AR-18 pour la Charente et membre du comité directeur de l’association, et par le Général Pierre MÉNANTEAU, membre du comité directeur de l’AR-18, ce QCM a retenu toute l’attention des participants.

Pierre WAENDENDRIES et Paul MORIN présentant le QCM à un groupe de jeunes très attentifs.
L’équipe gagnante avec les officiels lors de la remise des prix.