Les nouvelles capacités de surveillance à très longue portée

Dans son numéro N° 2684 du 17 avril 2020, la revue « Air & Cosmos » présente un dossier très intéressant sur les différents types de radar à très longue portée mis en oeuvre par la Russie, la Chine et l’Iran.

Si l’origine de certaines perturbations n’est pas encore identifiée, les radio-amateurs comprendront pourquoi une partie des fréquences de la bande qui leur est octroyée sont brouillées.

Ce document est un peu technique mais la conclusion ouvre un large champ de réflexions.

Alain BELLANGER

Défense et Dissuasion

Discours du Président Emmanuel MACRON sur la stratégie de défense et de dissuasion, devant les stagiaires de la 27ème promotion de l’école de guerre, le vendredi 7 février 2020 – 10h30. SEUL LE PRONONCÉ FAIT FOI.

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Mesdames et messieurs les ministres, 
Mesdames et messieurs les élus,
Monsieur le chef d’état-major des armées, 
Mesdames et messieurs les officiers généraux,
Mesdames et messieurs les officiers supérieurs, auditeurs du Centre des Hautes Etudes Militaires et stagiaires de l’Ecole de Guerre, 
Mesdames et Messieurs,

C’est un réel plaisir pour moi de me trouver aujourd’hui parmi vous au sein de cette prestigieuse Ecole de Guerre qui a formé tant de nos chefs militaires.

Aussi curieux que cela puisse paraître, aucun chef de l’Etat n’est revenu ici depuis Charles de Gaulle. C’est d’ailleurs devant vos lointains prédécesseurs, aux premiers jours de la Vème République, dans un discours resté fameux, que le général de Gaulle avait annoncé le 3 novembre 1959, il y a maintenant 60 ans, la création de ce qu’il avait alors appelé la « force de frappe ».

Le contexte stratégique a évidemment depuis profondément évolué et il me paraît important de venir partager avec vous, qui allez être appelés dans les prochaines années aux plus hauts postes de nos armées, quelques réflexions sur les fondamentaux de notre stratégie de défense.

Il n’est pas besoin ici de rappeler que « la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens » comme le disait un auteur dont la fréquentation est recommandée sur ces bancs.
C’est donc, pour reprendre votre dialectique militaire, à une analyse de situation, c’est-à-dire l’analyse du monde tel qu’il est et non du monde tel qu’on aimerait qu’il soit, que je voudrais aujourd’hui procéder avec vous, avant de vous exposer mon idée de manœuvre en tant que chef des armées.

L’état du monde, je l’ai à plusieurs reprises déjà décrit tel que je le vois, et je dois dire que je partage avec l’écrivain Amin Maalouf le constat d’un dérèglement du monde et, je le cite : « l’inquiétude d’un adepte des Lumières, qui les voit vaciller, faiblir, et, en certains pays, sur le point de s’éteindre ».

La dernière décennie que nous venons de vivre a vu les équilibres stratégiques, politiques, économiques, technologiques, énergétiques et militaires, largement remis en cause et nous voyons aujourd’hui poindre à nouveau ce qui pourrait mettre à mal la paix acquise après tant de drames sur notre continent.

Alors que les défis globaux auxquels notre planète est confrontée devraient exiger un regain de coopération et de solidarité, nous faisons face à un délitement accéléré de l’ordre juridique international et des institutions qui organisent les relations pacifiques entre Etats.

Ces phénomènes ébranlent le cadre de sécurité global et affectent, directement ou indirectement, notre stratégie de défense. Les risques, les menaces, se sont accrus et diversifiés. Leurs effets se sont accélérés, rapprochés de nous, jusqu’à nous toucher directement pour certains.

Au lendemain de mon élection, la lutte contre le terrorisme a été ma première priorité. Elle le restera car un certain nombre de groupes terroristes se sont déclarés eux-mêmes comme nos ennemis. L’ennemi, c’est une menace qui se concrétise. Le califat territorial de Daech a depuis été détruit, mais les réseaux et l’idéologie terroriste djihadiste, alimentés au terreau des Etats faillis, continuent à chercher des failles dans nos sociétés, matérialisant l’existence d’un continuum entre la défense et la sécurité.

Pourtant, il serait naïf et inconséquent de notre part de limiter l’ensemble des problématiques de défense et de sécurité à une seule menace, si prégnante soit-elle.

En réalité, alors que nos concitoyens et nous-mêmes nous focalisons à juste titre sur la lutte antiterroriste, dans le même temps, le cours du monde continue de changer sous nos yeux.
Nous sommes ainsi chaque jour confrontés aux conséquences de la mondialisation, directes ou indirectes, sur notre souveraineté et notre sécurité.

La maîtrise des ressources et des flux, qu’ils soient matériels ou immatériels, constitue le ferment de nouvelles stratégies de puissance. La haute mer, les espaces aériens et exo- atmosphériques, le numérique, ces espaces communs qui s’interpénètrent et complexifient notre compréhension des enjeux, deviennent ou redeviennent des terrains de rapports de force et parfois de confrontation.

Par leur dispersion géographique, leur simultanéité, leur complexité, ces évolutions étendent de facto le champ et les modalités des confrontations interétatiques possibles.

Elles sont les symptômes au fond d’une époque de profondes ruptures que nous sommes en train de vivre. 

La première rupture est d’ordre stratégique.

Une nouvelle hiérarchie des puissances se dessine, au prix d’une compétition stratégique globale, désinhibée, porteuse pour l’avenir de risques d’incidents et d’escalade militaire non maîtrisée. Plusieurs tendances lourdes, prévisibles, sont à l’œuvre.

  • D’abord, la compétition globale engagée entre les Etats-Unis et la Chine est aujourd’hui un fait stratégique avéré, qui structure et structurera dorénavant les relations internationales.
  • Ensuite, la stabilité stratégique en Europe nécessite davantage que le confort d’une convergence transatlantique acquise avec les Etats-Unis. Notre sécurité dépend donc de notre capacité à nous investir de manière plus autonome à l’égard de notre voisinage à l’Est comme au Sud ;
  • Enfin, la frontière entre compétition et confrontation, qui nous permettait de distinguer le temps de paix du temps de crise ou de la guerre, est aujourd’hui profondément diluée. Elle laisse place à de multiples zones grises où, sous couvert d’asymétrie ou d’hybridité, se déploient des actions d’influence, de nuisance voire d’intimidation, qui pourraient dégénérer.

Ces tendances lourdes ne peuvent être ignorées, par nous-mêmes, par l’ensemble des Européens, alors même que d’autres puissances sont engagées dans des programmes de réarmement, y compris nucléaire, et que ces dernières années ont été marquées par une accélération de ces programmes.

Dans ce domaine, la multipolarité nucléaire actuelle n’a rien de comparable avec la logique qui prévalait lors de la Guerre froide. Contrairement à la France et à ses alliés, certains Etats optent sciemment pour des postures nucléaires opaques, voire agressives, incluant une dimension de chantage ou de recherche du fait accompli. Les équilibres dissuasifs entre puissances sont ainsi devenus plus instables.

Avec la prolifération des missiles aux technologies plus avancées, nous sommes également confrontés à une situation inédite où des puissances régionales sont, ou vont être, en mesure de toucher directement le territoire de l’Europe.

Enfin, le tabou de l’usage des armes chimiques a été brisé à de multiples reprises en Syrie, en Malaisie et jusqu’en Europe même.

A l’évidence, cette rupture stratégique rendra encore plus exigeantes les conditions de nos engagements militaires futurs. En particulier, lorsqu’elles seront engagées pour décourager des agresseurs potentiels ou pour augmenter le coût de leurs actions, nos armées devront faire face à un durcissement sensible de leur environnement opérationnel.

La deuxième rupture est d’ordre politique et juridique, je l’évoquais il y a un instant en creux dans mon introduction : c’est la crise du multilatéralisme et le recul du droit face aux rapports de force.

L’idée même d’un ordre multilatéral fondé sur le droit, où le recours à la force est régulé, où les engagements sont respectés, où les droits créent des obligations qui s’appliquent à tous, cette idée-là est profondément remise en cause aujourd’hui.

Cette déconstruction des normes internationales s’inscrit dans une logique assumée de compétition, où seules primeraient la loi du plus fort, la réalité du rapport de forces. Les plus cyniques vont jusqu’à se draper dans la légalité et un attachement de façade à l’ordre international, pour mieux les violer en toute impunité.

Ces attitudes posent évidemment des questions fondamentales à nos démocraties. Pouvons-nous être les seuls à accepter de respecter les règles du jeu, les seuls dont la signature sur les engagements internationaux aurait encore une valeur ? Serait-ce aujourd’hui devenu une coupable naïveté ?

La réalité c’est que ces enjeux restent essentiels pour l’immense majorité des Etats membres des Nations unies, pour lesquels le droit est protecteur et stabilisateur et qui aspirent à un ordre international qui renforce la sécurité et la paix.

Aucun peuple ne peut trouver son intérêt dans l’affaiblissement du caractère universel des droits de l’Homme. Aucun peuple ne peut trouver son intérêt dans la remise en cause de l’autorité du droit international humanitaire, ou celle des différents régimes de non- prolifération, ou de la convention sur le droit de la mer ou encore du traité de l’espace.

L’Europe elle-même est directement exposée aux conséquences de cette déconstruction. Regardons la situation actuelle : depuis le début des années 2000, c’est en effet l’ensemble de l’architecture de sécurité en Europe, difficilement bâtie après 1945 durant la Guerre froide, qui s’est trouvé progressivement fissuré, puis sciemment déconstruit brique par brique. Après le blocage des négociations sur les armements conventionnels, la fin, en 2019, du traité sur les forces nucléaires intermédiaires est le symbole de ce délitement.

Les Européens doivent aujourd‘hui collectivement prendre conscience que, faute de cadre juridique, ils pourraient rapidement se trouver exposés à la reprise d’une course aux armements conventionnels, voire nucléaires, sur leur sol. Ils ne peuvent pas se cantonner à un rôle de spectateurs. Redevenir le terrain de la confrontation des puissances nucléaires non européennes ne serait pas acceptable. En tout cas, je ne l’accepte pas.

Enfin, la troisième rupture est technologique.

La technologie est en effet à la fois un enjeu, un perturbateur et un arbitre des équilibres stratégiques. Le déploiement de la 5G, le cloud pour stocker les données, ainsi que les systèmes d’exploitation sont aujourd’hui des infrastructures stratégiques dans le monde contemporain. Nous avons sans doute ces dernières années trop souvent considéré qu’il s’agissait là de solutions commerciales, de sujets simplement industriels ou marchands, alors que nous parlons là d’infrastructures stratégiques pour nos économies évidemment et pour nos armées.
L’émergence de nouvelles technologies, comme l’intelligence artificielle, les applications de la physique quantique ou encore la biologie de synthèse, est porteuse de nombreuses opportunités, mais également source de futures instabilités.

Porteur d’innovations sans limite, le numérique innerve tous les milieux physiques. Devenu lui-même un champ de confrontation à part entière, sa maîtrise exacerbe les rivalités entre puissances, qui y voient un moyen d’acquérir la supériorité stratégique. Il offre également des possibilités inédites de surveillance de masse des populations, d’exercice d’un autoritarisme numérique.

En temps de crise, ces ruptures technologiques mettront davantage sous tension nos capacités d’analyse, de décision, tiraillées entre exhaustivité, véracité et réactivité. En ce sens, elles augmentent les risques de dérapage et appellent à la mise en place de mécanismes de déconfliction, robustes et transparents.

Vous le voyez, les grandes ruptures de ce monde nous obligent à penser sans tabou ce que pourraient être les guerres de demain, étant bien conscients qu’en ce début de XXIème siècle « ni les hommes, ni les Etats n’ont dit adieu aux armes » pour reprendre les mots de Raymond Aron.

Il y a tout d’abord les conflits inter-étatiques où des Etats tiers, agissant en soutien des différents belligérants, peuvent se retrouver face à face. C’est le cas aujourd’hui en Libye, en Irak ou en Syrie. L’opération Hamilton conduite avec les Etats-Unis et le Royaume-Uni en 2018 pour sanctionner l’usage prohibé d’armes chimiques par le régime syrien, a illustré de manière concrète cette imbrication accrue, ces risques d’escalade et la nécessité de canaux permanents de dialogue afin de les limiter.

Il y a également la multiplication des zones de friction entre puissances, lorsqu’elles sont engagées dans des activités de démonstration, parfois à la limite de l’épreuve de force. C’est le cas en mer dans plusieurs zones contestées, de la Méditerranée aux mers de Chine en passant par le Golfe arabo-persique. C’est le cas sur terre lorsque s’y déploient des exercices massifs sans préavis. C’est le cas sous la mer, mais aussi dans les airs qui voient le retour des bombardiers stratégiques testant les défenses aériennes. C’est enfin le cas dans l’espace, devenu à son tour un milieu de confrontation, plus ou moins visible, mais tout à fait réelle et, dans l’espace numérique, de manière de plus en plus claire. 

L’escalade de début janvier en Irak montre bien à cet égard que ces diverses situations « au contact » peuvent à tout moment déboucher sur une crise ouverte entre des Etats qui semblent avoir oublié la raison du « plus jamais la guerre !» pour un hypothétique « pourquoi pas la guerre ? ».

Aujourd’hui, les théâtres de crise au Levant et en Libye sont aussi, et en raison de ces phénomènes que je viens de décrire, un véritable test pour la cohésion du P5, dont je souhaite qu’il puisse se réunir au sommet et démontrer sa capacité à assumer pleinement son mandat pour le maintien de la paix et de la sécurité internationale, mais également un test pour la solidarité de l’Alliance atlantique. C’est pour cette raison, que j’ai eu des mots durs, qui ont sonné comme un réveil, et que nous avons pu ainsi, après le Sommet de décembre dernier, engager une revue stratégique de l’OTAN, que je veux à la fois ambitieuse et opérationnelle.

Comme à chaque fois que nous sommes confrontés à des défis historiques, notre réaction doit être la même : l’audace et l’ambition renouvelée. Nous devons sur ce sujet prendre nos responsabilités.

Le choix qui se pose à nous est en effet celui d’une reprise en main de notre destin ou celui, renonçant à toute stratégie propre, d’un alignement sur quelque puissance que ce soit.
C’est pourquoi un sursaut est nécessaire et la refondation de l’ordre mondial au service de la Paix doit être notre cap. La France et l’Europe y ont un rôle historique à jouer.

Mesdames et Messieurs,

Toute notre action doit être au service d’une ambition, celle de la Paix, tirant parti d’un multilatéralisme fort et efficace fondé sur le droit. 

Au fond, il y a quatre piliers à cette stratégie, à mes yeux : la promotion du multilatéralisme qui fonctionne, le développement de partenariats stratégiques, la recherche d’autonomie européenne et la souveraineté nationale. Ces quatre éléments forment un tout, qui donne sa cohérence globale et son sens profond à notre stratégie de défense.

D’abord, je le disais, nous avons besoin d’un multilatéralisme qui fonctionne. C’est par le multilatéralisme que nous répondrons collectivement aux problèmes qui s’imposent à tous.

La France ne menace personne. Elle veut la paix, une paix solide, une paix durable. Elle n’a nulle part de visée expansionniste. Sa sécurité et celle de l’Europe supposent que les rapports internationaux restent régis par le droit, un droit accepté et respecté par tous.

A ce titre, nous attendons des grands partenaires de l’Europe qu’ils œuvrent à préserver et renforcer le droit international, et non à l’affaiblir. La transparence, la confiance, la réciprocité sont la base de la sécurité collective.

Car la stabilité stratégique, qui passe par la recherche de l’équilibre des forces au plus bas niveau possible, n’est plus aujourd’hui garantie. Derrière la crise des grands instruments de maîtrise des armements et de désarmement, ce sont bien la sécurité de la France et de l’Europe qui sont en jeu.

Ce débat crucial ne doit pas se dérouler au-dessus de la tête des Européens, dans une relation directe et exclusive entre les Etats- Unis, la Russie et la Chine. Et je vois bien que c’est la tentation de quelques-uns, parfois des principaux intéressés.

Pour les Européens, un multilatéralisme repensé, au service de la sécurité collective, conforme à nos principes fondateurs, doit articuler deux exigences, qui ne sont pas contradictoires si nous voulons garantir la paix : celle, d’une part, de la promotion d’un agenda international renouvelé pour la maîtrise des armements, et celle, d’autre part, d’un réel investissement européen en matière de défense.

Ces exigences découlent directement de l’ambition de souveraineté et de liberté d’action que je porte pour l’Europe depuis mon élection. Elle est le pendant d’une relation transatlantique rééquilibrée, d’une alliance dans laquelle les Européens sont des partenaires crédibles, efficaces. Les Européens doivent pouvoir ensemble se protéger. Ils doivent pouvoir décider et agir seuls lorsque cela est nécessaire. Ils doivent le faire en n’oubliant jamais ce que l’Histoire leur a appris : la démocratie et le droit sans la force ne tiennent pas longtemps ! Ils doivent enfin utiliser de manière courante les mécanismes assurant leur solidarité.

C’est pour cela que je suis convaincu que les Européens doivent d’abord et avant tout définir ensemble ce que sont leurs intérêts de sécurité et décider souverainement de ce qui est bon pour l’Europe.

Ainsi, il ne peut y avoir de projet de défense et de sécurité des citoyens européens sans vision politique cherchant à favoriser la reconstruction progressive de la confiance avec la Russie.
Ce projet, je le conduis avec exigence. J’attends de la Russie qu’elle soit un acteur constructif de notre sécurité commune. Mais nous ne pouvons pas nous satisfaire de la situation actuelle, où le fossé s’accroît, le dialogue s’appauvrit, alors même que les enjeux de sécurité à traiter avec Moscou, eux, se multiplient.

L’objectif principal – j’y suis revenu à plusieurs reprises – de ma démarche à l’égard de la Russie, c’est l’amélioration des conditions de la sécurité collective et de la stabilité de l’Europe. Ce processus s’étalera sur plusieurs années. Il demandera patience et exigence, et il sera conduit avec nos partenaires européens. Mais nous n’avons aucun intérêt à déléguer un tel dialogue ou nous enfermer dans la situation actuelle.

Dans ce cadre, les Européens doivent également pouvoir proposer ensemble un agenda international de maîtrise des armements. En effet, je l’évoquais à l’instant, la fin du traité sur les forces nucléaires intermédiaires, les incertitudes sur l’avenir du traité New Start, la crise du régime de maîtrise des armes conventionnelles en Europe laissent entrevoir d’ici 2021 la possibilité d’une pure compétition militaire et nucléaire, sans contraintes, comme nous n’en avons plus connu depuis la fin des années 1960. Je ne décris pas là un impossible ou un futur lointain. Simplement ce qui est en train de se faire depuis plusieurs années sous nos yeux. Les Européens doivent à nouveau comprendre les dynamiques d’escalade et chercher à les prévenir ou les empêcher par des normes claires, vérifiables. Car le droit doit ici servir notre sécurité, en cherchant à contraindre et limiter les armes et les comportements les plus déstabilisateurs d’adversaires potentiels.

Il nous faut sur ce sujet une position très claire de l’Europe, qui tienne compte à la fois de l’évolution des armements contemporains, notamment russes, qui pourraient impacter notre sol, et des intérêts des Européens – de tous les Européens, y compris au Nord et au Centre de l’Europe. Car il faut bien le dire, les traités même en vigueur encore il y a quelques années ne protégeaient plus certains de nos partenaires. 

Il convient enfin de repenser les priorités du désarmement. Trop longtemps, les Européens ont pensé qu’il suffisait de donner l’exemple et qu’en se désarmant, les autres Etats nous suivraient. Il n’en est rien ! Le désarmement ne peut être en soi un objectif : il doit d’abord améliorer les conditions de la sécurité internationale.

Sur ces questions, la France mobilisera les partenaires européens les plus concernés, afin de poser les bases d’une stratégie internationale commune que nous pourrons proposer dans toutes les enceintes où l’Europe est active.

Et la France, puissance nucléaire reconnue par le Traité de Non- Prolifération, membre permanent du Conseil de Sécurité des Nations unies, prendra ses responsabilités, en particulier en matière de désarmement nucléaire, comme elle l’a toujours fait.

Dans la recherche de la paix, la France est attachée à la logique d’un désarmement qui serve la sécurité et la stabilité mondiale. Et elle a, à cet égard, un bilan unique au monde, conforme à ses responsabilités comme à ses intérêts, ayant démantelé de façon irréversible sa composante nucléaire terrestre, ses installations d’essais nucléaires, ses installations de production de matières fissiles pour les armes, et réduit la taille de son arsenal, aujourd’hui inférieure à 300 armes nucléaires. Toutes ces décisions sont cohérentes avec notre refus de toute course aux armements et le maintien du format de notre dissuasion nucléaire à un niveau de stricte suffisance.

Ce bilan exemplaire donne à la France la légitimité pour réclamer aux autres puissances nucléaires des gestes concrets en direction d’un désarmement global, progressif, crédible et vérifiable.

En matière de désarmement nucléaire, j’appelle ainsi tous les Etats à nous rejoindre autour d’un agenda simple, en application de l’article VI du TNP, autour de quatre points que nous connaissons :

(i)    Le respect strict de la norme centrale que constitue le traité de non-prolifération nucléaire et la préservation de sa primauté à l’occasion de son 50ème anniversaire en 2020. Le TNP est le traité le plus universel au monde. Il est le seul traité à permettre de prévenir la guerre nucléaire tout en apportant à chacun les bénéfices des usages pacifiques de l’énergie nucléaire.
(ii)    L’enclenchement à la Conférence du Désarmement de la négociation d’un traité d’interdiction de la production de matières fissiles pour les armes, ainsi que la préservation et l’universalisation du traité d’interdiction complète des essais nucléaires. Nous y sommes engagés.
(iii)    La poursuite des travaux sur la vérification du désarmement nucléaire, que nous portons notamment avec l’Allemagne, car tout accord de désarmement n’est rien s’il ne peut pas être vérifié de façon robuste.
(iv)    Enfin, le lancement de travaux concrets pour la réduction des risques stratégiques, car l’escalade non contrôlée d’un conflit local en guerre majeure est l’un des scénarios les plus préoccupants aujourd’hui, qu’une série de mesures simples et de bon sens pourrait efficacement conjurer.

J’entends par ailleurs les appels à la « trilatéralisation » ou à la multilatéralisation des accords de maîtrise ou de réduction des arsenaux nucléaires.

Les traités bilatéraux russo-américains correspondent à une histoire – celle de la Guerre froide – mais aussi à une réalité toujours actuelle, celle de la taille considérable des arsenaux encore détenus par Moscou et Washington, sans commune mesure avec ceux des autres Etats dotés d’armes nucléaires. A cet égard, il est essentiel que le traité New Start soit prolongé au-delà de 2021. 

Mais après l’effondrement du traité FNI, la France souhaite, pour sa part, que des discussions élargies soient enclenchées, dans lesquelles l’Europe doit faire entendre sa voix et s’assurer que ses intérêts seront bien pris en compte dans une négociation sur un nouvel instrument à même d’assurer la stabilité stratégique sur notre continent. Soyons clair, si une négociation et un traité plus large sont possibles, nous les souhaitons. S’il est bloqué par certains, nous ne saurions rester à l’arrêt. Et les Européens doivent être parties prenantes et signataires du prochain traité car il s’agit de notre sol et d’une discussion qui ne doit pas passer par-dessus notre tête. 

La France, au titre de ses responsabilités propres, est également prête à participer à des discussions qui rassembleraient les cinq Etats dotés d’armes nucléaires au sens du TNP, sur les priorités du désarmement nucléaire, le renforcement de la confiance et de la transparence sur les arsenaux et les stratégies nucléaires de chacun. Cette discussion devra viser à renforcer la stabilité entre Etats dotés et à réduire les risques d’escalade involontaire en cas de conflit.

*

Cette ambition de la France, puissance d’équilibre, au service de la paix et de la sécurité, ne saurait par ailleurs être mise en œuvre sans un réseau dense d’amitiés, de partenariats stratégiques et d’alliances, et une capacité diplomatique globale, car nos responsabilités et nos intérêts de sécurité sont mondiaux. C’est pour moi le deuxième pilier, que j’évoquais à l’instant, sur lequel je veux rapidement revenir.

La France oui, est insérée dans un réseau de relations résultant de l’histoire et de la géographie. Dans ce cadre, elle continuera à développer et à approfondir des partenariats stratégiques sur tous les continents.

Elle prend d’ailleurs aujourd’hui sa part dans toutes les grandes coalitions au Levant comme en Afrique. Mais nous avons aussi bâti ces dernières années des structures régionales nouvelles. Au Sahel, elle lutte avec détermination contre le terrorisme grâce à l’opération Barkhane avec ses partenaires internationaux et africains du G5. Le sommet de Pau le 13 janvier dernier a permis de clarifier le cadre de nos opérations et de confirmer l’engagement de chacun. C’est pour cela que j’ai décidé d’envoyer 600 soldats supplémentaires pour renforcer l’engagement de la France au service de la paix et de la sécurité dans cette région. C’est une véritable coalition que nous avons bâtie à Pau, dont l’armature sont la force Barkhane et le partenariat avec le G5 Sahel. Mais nous allons progressivement engager les puissances amies pour la sécurité collective de la région. Nous sommes au cœur de cette coalition nouvelle. Elle est stratégique pour l’Afrique, comme pour notre sécurité. 

Puissance riveraine de l’Indo-Pacifique, la France entretient aussi des liens privilégiés avec l’Australie, l’Inde et le Japon pour préserver les souverainetés et la liberté de navigation dans cet espace géographique. Elle fait vivre au quotidien ses coopérations de défense, sa solidarité avec ses partenaires du golfe arabo- persique, méditerranéens ou du sud-est asiatique. Cet axe Indo-Pacifique que nous avons, ces deux dernières années, posé, expliqué, développé, consacre notre géographie, la réalité d’engagements militaires multiples que nous prenons depuis plusieurs années, des exercices inédits que nous conduisons dans la région, mais aussi une lecture du monde qu’il nous faut avoir. Nous sommes aussi une puissance Indo-Pacifique, avec des ressortissants, des bases, des intérêts. Notre capacité à assurer cette liberté dans la région, à défendre nos intérêts, à protéger les grands axes énergétiques et technologiques passe aussi par ce nouvel axe et ces nouvelles coopérations. 

Il est évident qu’au cœur de ce réseau mondial, l’ensemble de nos partenaires européens et nos alliés nord-américains ont une place toute particulière sur laquelle je reviendrai.
Je veux enfin, quand je parle de ses alliances et de ses partenariats stratégiques, souligner notre responsabilité dans le cadre commun qui est le nôtre, celui des Nations unies, et le rôle primordial des opérations de maintien de la paix.

*

Le troisième pilier de notre stratégie, en complément de la maîtrise des armements et des réseaux d’alliances, de partenariats et de relations diplomatiques, c’est l’ensemble des ambitions concrètes que nous voulons donner à la politique de sécurité et de défense de l’Europe.

Pour longtemps encore, l’Europe, en matière de défense, ne pourra tirer sa force que des armées nationales. C’est une certitude et le redressement des budgets et des capacités de ces armées nationales doit être la priorité.

En revanche, nous avons commencé, entre Européens, à élaborer concrètement les outils qui nous permettent de faire émerger une conscience commune, de défendre des intérêts partagés, et d’agir de façon autonome et solidaire chaque fois que cela sera nécessaire. Cette voie, c’est celle de la construction d’une liberté d’action européenne qui complète et renforce les souverainetés nationales.

Il faut à cet égard dissiper ici un malentendu : la question pour les Européens n’est pas de savoir s’ils doivent se défendre avec ou sans Washington, ni de savoir si la sécurité des Etats-Unis se joue en Asie ou sur notre continent. La France participe naturellement à la communauté des nations alliées riveraines de l’océan Atlantique, dont elle partage les valeurs, les principes et les idéaux. Elle est fidèle à ses engagements dans l’Alliance atlantique, qui assure depuis 70 ans la stabilité et la sécurité collective de ses membres et de l’Europe. Et à ce titre, j’entends parfois beaucoup de bruit. Mais je préfère regarder les faits : la France est un acteur militaire crédible, qui est présent au combat sur le terrain et qui paie le prix du sang. Elle l’a prouvé récemment au Sahel, une fois encore. La France est un allié fiable et solidaire, y compris dans les coups durs. Elle l’a prouvé encore récemment en Syrie et en Irak. La France, enfin, est convaincue que la sécurité à long terme de l’Europe passe par une alliance forte avec les Etats- Unis. Je l’ai redit lors du sommet de l’OTAN à Londres, et la France en fait chaque jour l’expérience dans ses opérations.

Mais notre sécurité passe aussi, inévitablement, par une plus grande capacité d’action autonome des Européens. Que le dire, l’assumer, le porter suscitent tant de réactions, tant de doutes, me surprend vraiment. Pour reprendre les mots du général de Gaulle, « aucune alliance ne peut être dissociée de l’effort entrepris par chacun de ses membres, pour son compte, à ses frais et en fonction des intérêts qui lui sont propres ». Oui, les vraies questions pour les Européens sont au fond plutôt les questions qu’ils doivent s’adresser à eux-mêmes, plutôt qu’aux Américains : pourquoi ont-ils diminué à ce point leur effort de défense depuis les années 90 ? Pourquoi ne sont-ils plus prêts à inscrire la défense parmi leurs priorités budgétaires et à faire pour cela les sacrifices nécessaires, alors même que les risques s’accumulent ? Pourquoi avons-nous aujourd’hui des débats si compliqués sur les montants à allouer au Fonds européen de défense que nous venons de créer – parce que c’est une question accessoire, dont d’autres se chargeraient pour nous ? Pourquoi y a-t-il de tels écarts entre les budgets et les capacités de défense des Etats européens, alors que les menaces auxquelles nous sommes exposés nous sont très largement communes ?

Toutes ces questions, ce sont des questions à nous poser à nous, Européens. L’Europe doit se mettre en situation de pouvoir davantage garantir sa sécurité et agir dans son voisinage. Cet objectif d’action autonome, l’Union européenne se l’est, d’ailleurs, déjà fixé à elle-même. Imaginez, c’était au Conseil européen de Cologne, en…1999 ! Il est, aujourd’hui comme il y a vingt ans, parfaitement compatible avec le souhait que les Européens se réengagent et soient plus crédibles et efficaces dans l’OTAN. Ce rééquilibrage est d’ailleurs souhaité par les Etats-Unis.
C’est pourquoi, les Européens doivent aujourd’hui assumer davantage cette Europe de la défense, ce pilier européen au sein de l’OTAN. Et je l’assume pleinement, sans état d’âme ! Je vous le dis très clairement : je considère que l’une de mes responsabilités est bien que cela ne reste pas lettre morte, comme ce fut le cas après 1999. L’OTAN et l’Europe de la défense sont les deux piliers de la sécurité collective européenne. Assumons-le ! Regardons les choses en face, entendons les Etats-Unis d’Amérique qui nous disent : « Dépensez pour votre sécurité davantage, je ne serai plus dans la durée votre garant de dernier ressort, votre protecteur. » Prenons nos responsabilités, enfin ! 

Mais la liberté d’action européenne, la défense et la sécurité de l’Europe, ne peuvent reposer sur une approche uniquement militaire.

Pour construire l’Europe de demain, nos normes ne peuvent être sous contrôle américain, nos infrastructures, nos ports et aéroports sous capitaux chinois et nos réseaux numériques sous pression russe.

Il nous faut, au niveau européen, maîtriser nos infrastructures maritimes, énergétiques et numériques. Là aussi, nous nous sommes beaucoup trompés. Nous avons fini par penser, dans les années 90 et 2000, que l’Europe était devenue un gros marché, confortable, théâtre d’influence et de prédation à tout-va. Nous nous sommes même abandonnés entre européens, poussant tant de pays du Sud de notre Union Européenne, à laisser des investisseurs prendre ce que nous ne savions pas acheter, ce que nous poussions à privatiser, quand bien même, ces infrastructures étaient stratégiques. 

Funeste erreur ! Nous devons pour ces infrastructures critiques, retrouver, au niveau européen, une vraie politique de souveraineté ! 

C’est le cas pour les infrastructures 5G, le cloud, décisif pour le stockage des données, les systèmes d’exploitation, les réseaux de câbles sous-marins, systèmes névralgiques de notre économie mondialisée. Il nous faut au niveau européen, aussi, maitriser notre accès à l’espace et décider nous-mêmes des standards qui s’imposent à nos entreprises.

Cette politique de normes, cette politique d’infrastructures stratégiques, est essentielle. Et elle l’est pour notre sécurité collective, notre capacité à agir.  Nous vivons dans le monde de l’interopérabilité, avec des équipements de plus en plus numérisés. Dépenser ce que nous dépensons pour avoir des équipements parfaits et remettre les infrastructures de connexion, entre nos équipements et nos pays, à d’autres, sans garantie, serait quand même une étrange naïveté.  Vous me permettrez de ne pas vouloir y participer. 

La liberté d’action européenne passe par cette souveraineté économique et numérique. Les intérêts européens, qu’eux seuls sont à même de définir, doivent être entendus. C’est à l’Europe de définir le cadre de régulation qu’elle s’impose, car il s’agit à la fois de protéger les libertés individuelles, les données économiques de nos entreprises, au cœur de notre souveraineté, et notre capacité concrète opérationnelle à agir aussi de manière autonome. 

Il nous faut également conforter l’indépendance technologique de l’Europe et sa capacité à anticiper les prochaines ruptures stratégiques. Il nous faut pour cela une base industrielle de défense autonome et compétitive, un effort résolu et massif d’innovation, la maîtrise de nos technologies de sécurité et la maitrise de nos exportations de défense.

Tout cela aujourd’hui suppose un aggiornamento de l’approche européenne, de ces approches économiques et budgétaires pour que chacun en tire les conséquences. Nous ne sommes plus dans le monde des années 90 ! 

La bonne utilisation de ces outils de souveraineté commune nécessite, d’abord et avant tout, bien évidemment des investissements, une politique industrielle, des standards de souveraineté, beaucoup plus forte et ambitieuse mais aussi la construction d’une culture stratégique partagée, car notre incapacité à penser ensemble nos intérêts souverains et à agir ensemble de façon convaincante met chaque jour en cause notre crédibilité en tant qu’Européens. Elle offre aux autres puissances la possibilité de nous diviser, de nous affaiblir.

La construction de cette culture stratégique européenne partagée, c’est ce à quoi s’emploie la France, sur la base des importants progrès accomplis depuis, un peu plus de deux ans, et qui rendent, je le crois, d’ores et déjà, plus tangible la vision arrêtée en 1999 : le Fonds européen de défense, la coopération renforcée mais aussi l’Initiative européenne d’intervention que nous avons proposée, portée, voulue et qui se déploie. 

Mesdames et messieurs,

Pour que la France soit à la hauteur de son ambition européenne, à la hauteur aussi de son histoire, elle doit rester souveraine ou décider elle- même, sans les subir, les transferts de souveraineté qu’elle consentirait, tout comme les coopérations contraignantes dans lesquelles elle s’engagerait. Et c’est le quatrième pilier de la stratégie que je veux pour notre pays : une véritable souveraineté française.

Cette volonté de souveraineté nationale n’est absolument pas incompatible avec notre volonté de développer les capacités européennes, je dirais même que c’est un prérequis indispensable. On coopère mieux quand on peut décider souverainement de coopérer. 

Fondement de toute communauté politique, la défense est au cœur de notre souveraineté.

Notre stratégie de défense se définit donc, d’abord et avant tout, par sa capacité à protéger nos concitoyens, à contribuer à la sécurité et à la paix de l’Europe et de ses approches.

Mais elle ne s’y limite pas. Elle doit également nous donner la capacité de défendre nos intérêts souverains partout dans le monde, en lien avec notre géographie des outremers et avec la densité de nos partenariats stratégiques. Elle doit nous permettre d’assumer nos responsabilités dans le maintien de la paix et de la sécurité internationale. Elle doit nous mettre à l’abri d’un chantage, et ainsi préserver notre autonomie de décision. Elle doit nous permettre de tenir notre rang et notre influence parmi les nations. Elle doit, en somme, nous garantir la maitrise de notre destin.

Au lendemain de la guerre froide, une vision idéaliste a accrédité l’idée que le monde était devenu moins dangereux et a conduit à réduire progressivement la part de notre richesse nationale consacrée à la défense. C’était, au fond, l’époque des dividendes de la Paix.

Ce choix, cette réorganisation des priorités budgétaires, pouvait sembler justifié alors que des arsenaux considérables avaient été accumulés de part et d’autre du rideau de fer. Mais la grande erreur a sans doute été, en Europe uniquement, de le prolonger au cours des vingt dernières années, voire de l’accélérer pendant la crise financière, alors que d’autres puissances, majeures ou régionales, maintenaient voire renforçaient leurs efforts de défense.

Au fond, les dix dernières années ont conduit à un décalage profond. Les européens ont continué de réduire, de réduire, de réduire, quand d’autres ont cessé de le faire, voire ont réinvesti, accélérant les mutations technologiques, accélérant leurs capacités propres. 

Le format et les capacités de nos armées ont été directement impactés. Celles-ci étaient pourtant sollicitées, au même moment, de manière croissante, dans des opérations régionales de gestion de crise, toujours plus variées et plus éloignées. La nécessité de dimensionner les outils de défense en fonction de défis bien supérieurs, « de haut du spectre », était alors souvent oubliée.

Ce double effet de ciseau a conduit à un décalage croissant entre le niveau de nos capacités militaires et la réalité de l’évolution de l’environnement international tel que je viens de vous le décrire.

C’est pourquoi, afin d’arrêter la lente érosion de nos capacités militaires et de les adapter à ce nouvel environnement stratégique, j’ai décidé qu’un effort budgétaire inédit serait accompli dans le domaine de la défense. C’est un effort majeur et durable, je l’assume pleinement devant la Nation. 

Je vous le redis, très clairement, aujourd’hui. J’entends, parfois, je suis étonné de cela, des doutes, des remises en question, des désirs de révision. Soyons clairs, les sujets dont nous parlons sont trop stratégiques et importants. Il faut que les mots prononcés soient suivis d’actes en conformité et que la durée soit au rendez-vous, car nous parlons là de programmes de long-terme. Ce sur quoi j’ai engagé notre nation sera tenu dans la durée avec force. Que nul ne perde d’énergie à chercher à le revisiter. 

Mais le budget n’est qu’un indicateur de l’effort consenti. Pour la défense, comme pour les autres domaines de l’action publique, ce n’est pas en priorité le prisme budgétaire qui doit nous guider. Car cet effort n’est rien s’il ne se met pas au service d’une vision stratégique.

Ce qui doit nous guider, c’est bien la réalité des menaces d’aujourd’hui et de demain pour la France et les Français, pour l’Europe et les Européens. C’est le juste équilibre à conserver entre gestion du court terme et prise en compte du temps long. C’est l’anticipation des menaces à venir et l’adaptation continue aux nouveaux modes de conflictualités. C’est ce que nous voulons préserver en national et ce que nous choisissons librement de faire en coopération avec nos partenaires.

Pour répondre à ces exigences, il faut à la France un outil de défense complet, moderne, puissant, équilibré, mis en œuvre par des armées réactives et tournées vers l’avenir.

Nous pouvons être fiers de nos armées. Notre outil de défense doit en effet nous permettre de relever trois grands défis :

  • Il s’agit tout d’abord, naturellement, de protéger nos concitoyens, notre territoire, ses approches aériennes et maritimes, contre tous les types de menaces et d’agression. C’est le fondement premier de notre existence en tant que nation et l’essence même de notre souveraineté.

    Au quotidien, cet objectif réunit le soldat de l’opération Sentinelle, la frégate de surveillance et la patrouille de défense aérienne. En surplomb, dans le cadre de la posture permanente de dissuasion, la veille silencieuse des équipages de nos SNLE et des forces aériennes stratégiques garantit chaque jour la protection du territoire et de la population et, au-delà, celle de nos intérêts vitaux.

    Responsable devant la Nation de la sécurité de notre pays et de son avenir, j’ai la responsabilité de protéger la France et les Français contre toute menace d’origine étatique contre nos intérêts vitaux, d’où qu’elle vienne et quelle qu’en soit la forme.

    Cette responsabilité ultime, au cœur de la fonction présidentielle, je l’assume chaque jour avec la plus grande détermination. Elle s’exerce par la dissuasion nucléaire. Cet exercice de la dissuasion, tout comme la transparence et la confiance que nous devons à la communauté internationale en tant qu« Etat doté » au sens du TNP – nécessite une doctrine strictement défensive, claire et prévisible, dont je veux ici rappeler les principaux fondements.

    Si d’aventure un dirigeant d’Etat venait à mésestimer l’attachement viscéral de la France à sa liberté et envisageait de s’en prendre à nos intérêts vitaux, quels qu’ils soient, il doit savoir que nos forces nucléaires sont capables d’infliger des dommages absolument inacceptables sur ses centres de pouvoir, c’est-à-dire sur ses centres névralgiques, politiques, économiques, militaires.

    Nos forces nucléaires ont été configurées pour cela avec la flexibilité et la réactivité nécessaires. En cas de méprise sur la détermination de la France à préserver ses intérêts vitaux, un avertissement nucléaire, unique et non renouvelable, pourrait être délivré à un agresseur étatique pour signifier clairement que le conflit vient de changer de nature et rétablir la dissuasion.

    Dans ce cadre, la France s’appuie au quotidien sur les deux composantes de ses forces nucléaires, qui sont complémentaires. J’ai pris et je continuerai à prendre les décisions nécessaires au maintien de leur crédibilité opérationnelle dans la durée, au niveau de stricte suffisance requis par l’environnement international.
     
  • Mais notre territoire, comme celui de l’Europe, n’est pas isolé du monde. C’est à mes yeux, le deuxième défi sur lequel je voulais revenir. En effet, nous vivons au rythme des crises qui agitent notre environnement direct. Nous subissons les conséquences de ces crises qui troublent des régions ou des mers plus lointaines, rendues toujours plus proches par les flux économiques et les échanges humains.

    Pour défendre nos intérêts de sécurité, nous devons donc relever le deuxième défi que représentent, d’une part la faillite des Etats qui laisse des sociétés entières en proie à la violence et aux bandes armées, et d’autre part, le désordre qui gagne les espaces communs, qu’ils soient océaniques, exo- atmosphériques ou cyber.

    C’est pourquoi, dans le respect du droit international et de nos responsabilités de membre permanent du Conseil de Sécurité des Nations unies, nos armées contribuent chaque jour, par le stationnement de nos forces de présence et de nos forces de souveraineté outre-mer comme par nos opérations extérieures, à la prévention des crises et à la stabilisation des régions où progresse le chaos.

    J’ai souhaité également que la France renforce ses capacités dans les nouveaux champs de confrontation. Au-delà du renseignement, de la cyberdéfense pour laquelle un investissement est en cours dans la durée, la défense spatiale sera renforcée et réorganisée au sein d’un nouveau commandement spatial rattaché à l’armée de l’air. Quant à l’intelligence artificielle, elle est l’une des priorités de la nouvelle Agence d’Innovation de la Défense.

    Terrain d’expression de la rivalité stratégique des Etats, certaines crises régionales représentent aujourd’hui autant d’hypothèses crédibles, mais pas exclusives, dans lesquelles nous pourrions, pour la première fois depuis longtemps, devoir relever un troisième défi, celui d’avoir à affronter directement, dans une escalade non maitrisée, une puissance hostile, éventuellement dotée de l’arme nucléaire ou alliée à une puissance possédant des armes de destruction massive.
     
  • Ce troisième défi, c’est le résultat très concret des transformations de la menace que j’évoquais tout à l’heure. 

    La prise d’un gage territorial, la déstabilisation d’un de nos alliés ou partenaires stratégiques, la remise en cause de fondements entiers du droit international ne sont plus seulement des scénarios du passé. Ils pourraient, demain, justifier l’engagement aux côtés de nos alliés de nos forces terrestres, navales ou aériennes dans un conflit majeur pour défendre la sécurité collective, le respect du droit international et la paix.

    A cet égard, notre stratégie de défense est un tout cohérent : forces conventionnelles et forces nucléaires s’y épaulent en permanence. Dès lors que nos intérêts vitaux sont susceptibles d’être menacés, la manœuvre militaire conventionnelle peut s’inscrire dans l’exercice de la dissuasion. La présence de forces conventionnelles robustes permet alors d’éviter une surprise stratégique, d’empêcher la création rapide d’un fait accompli ou de tester au plus tôt la détermination de l’adversaire, en le forçant à dévoiler de facto ses véritables intentions. Dans cette stratégie, notre force de dissuasion nucléaire demeure, en ultime recours, la clé de voûte de notre sécurité et la garantie de nos intérêts vitaux. Aujourd’hui comme hier, elle garantit notre indépendance, notre liberté d’appréciation, de décision et d’action. Elle interdit à l’adversaire de miser sur le succès de l’escalade, de l’intimidation ou du chantage.

En tant que chef de l’Etat, je suis le garant du temps long, parce que ma responsabilité de chef des armées est de prémunir notre Nation des menaces, en fixant l’horizon à plusieurs dizaines d’années.

La dissuasion nucléaire a joué un rôle fondamental dans la préservation de la paix et de la sécurité internationale, notamment en Europe. Je suis intimement persuadé que notre stratégie de dissuasion conserve toutes ses vertus stabilisatrices, et demeure un atout particulièrement précieux dans le monde de compétition des puissances, de désinhibition des comportements et d’érosion des normes qui aujourd’hui se dessine sous nos yeux.

La stratégie nucléaire de la France, dont je rappelais tout à l’heure les bases doctrinales, vise fondamentalement à empêcher la guerre.

Nos forces nucléaires ne sont dirigées contre aucun pays et la France a toujours refusé que l’arme nucléaire puisse être considérée comme une arme de bataille. Je réaffirme ici que la France ne s’engagera jamais dans une bataille nucléaire ou une quelconque riposte graduée.

Par ailleurs, nos forces nucléaires jouent un rôle dissuasif propre, notamment en Europe. Elles renforcent la sécurité de l’Europe par leur existence même et à cet égard ont une dimension authentiquement européenne.

Sur ce point, notre indépendance de décision est pleinement compatible avec une solidarité inébranlable à l’égard de nos partenaires européens. Notre engagement pour leur sécurité et leur défense est l’expression naturelle de notre solidarité toujours plus étroite. Soyons clairs : les intérêts vitaux de la France ont désormais une dimension européenne.
Dans cet esprit, je souhaite que se développe un dialogue stratégique avec nos partenaires européens qui y sont prêts sur le rôle de la dissuasion nucléaire française dans notre sécurité collective.

Les partenaires européens qui souhaitent s’engager sur cette voie pourront être associés aux exercices des forces françaises de dissuasion. Ce dialogue stratégique et ces échanges participeront naturellement au développement d’une véritable culture stratégique entre Européens.

Nos forces nucléaires évidemment contribuent également de manière significative au renforcement global de la dissuasion de l’Alliance atlantique, aux côtés des forces britanniques et américaines. La France ne participe pas aux mécanismes de planification nucléaire de l’Alliance et n’y participera pas plus à l’avenir. Mais elle continuera à nourrir la réflexion de niveau politique visant à renforcer la culture nucléaire de l’Alliance.

Seules puissances nucléaires européennes, la France et le Royaume-Uni ont dès 1995 affirmé clairement qu’ils n’imaginaient pas de situation dans laquelle les intérêts vitaux de l’un des deux pays pourraient être menacés sans que les intérêts vitaux de l’autre ne le soient aussi.

Je veux aujourd’hui réaffirmer solennellement ce constat. Le haut niveau de confiance mutuelle, consacré par les traités de Lancaster House de 2010, dont nous célébrons cette année le dixième anniversaire, se traduit au quotidien dans une coopération inédite sur les sujets nucléaires. Nous la poursuivrons avec détermination et le Brexit n’y change rien.

Mesdames et Messieurs,

Avant de conclure, je voudrais prendre encore quelques instants pour approfondir devant vous la réflexion sur le sens de la stratégie de dissuasion dans le monde d’aujourd’hui.
Il faut tout d’abord, sur ce sujet, reconnaître l’existence d’un débat éthique autour des armes nucléaires, qui n’est pas nouveau et auquel le Pape François a très récemment contribué lors de son déplacement à Hiroshima.

Il y a aussi un débat juridique et stratégique : face à un environnement international dégradé, certains, y compris en Europe, se sont engagés récemment dans une approche prohibitionniste, fondée en grande partie sur un impératif absolu et un raisonnement stratégique simple : pour supprimer la peur, pour supprimer la guerre, il suffirait de supprimer les armes nucléaires !

Je respecte très profondément les considérations qui se sont exprimées. Mais pour sa part, la France, Etat doté, qui porte la responsabilité du maintien de la paix et de la sécurité internationales, ne partage qu’en partie cette vision de la réalité de notre monde. Je souhaite vous exposer ma vision des équilibres sur lesquels repose le Traité de Non- Prolifération et les raisonnements éthiques qu’il convient d’appliquer pour préserver la paix.

L’objectif ultime d’élimination complète des armes nucléaires dans le cadre du désarmement général et complet figure dans le préambule du TNP. Mais dans la réalité de notre monde, les avancées vers cet objectif ne peuvent être que progressives, et fondées sur une perception réaliste du contexte stratégique.

Faute de disposer d’une recette pour faire disparaître rapidement les armes nucléaires de notre monde, les promoteurs de l’abolition s’attaquent au fond à la légitimité de la dissuasion nucléaire et avant tout, disons-le, là où cela est le plus facile, c’est-à-dire dans nos démocraties européennes.

Or j’estime que le choix n’est pas entre d’une part un absolu moral sans lien avec les réalités stratégiques, et d’autre part un retour cynique au seul rapport de forces sans le droit.
Pour ma part, je ne tomberai pas dans le piège de cette fausse alternative. Elle est déstabilisante pour l’architecture de sécurité internationale et n’est pas à la hauteur des ambitions que porte la France pour la paix, le multilatéralisme et le droit.

Ma responsabilité est d’assurer la sécurité de notre pays, dans le respect de ses engagements internationaux, en particulier ceux du TNP.

Mais cela ne signifie pas pour autant que la France renonce aux questionnements éthiques s’agissant de l’arme nucléaire. Une démocratie doit se poser la question des finalités de sa politique de dissuasion nucléaire, porteuse de dilemmes moraux et de paradoxes.

Il faut pour cela saisir la dissuasion dans la totalité de ses aspects, ce qui suppose de la replacer dans un cadre politique plus large, relatif à notre vision de l’ordre mondial.

L’arme nucléaire a fait pénétrer en 1945 l’humanité dans un nouvel âge, en lui donnant au fond les moyens de sa propre destruction et en lui faisant prendre ainsi conscience de l’unité de son destin. Sa diffusion a été limitée en 1968 par le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, photographie en quelque sorte du monde nucléaire de l’époque – il constate l’existence de cinq Etats dotés d’armes – et qui, à de rares exceptions près, a tenu. Ce faisant, la détention de l’arme nucléaire confère aux responsables politiques des pays concernés une responsabilité d’une ampleur morale sans précédent dans l’histoire. S’agissant de la France, j’assume pleinement cette responsabilité.

Nous n’avons pas d’autre choix que de nous confronter à l’imperfection du monde et d’affronter, avec réalisme et honnêteté, les problèmes qu’il nous pose.

Je ne peux ainsi donner à la France comme objectif moral le désarmement des démocraties face à des puissances voire des dictatures qui, elles, conserveraient ou développeraient leurs armes nucléaires.

Un désarmement nucléaire unilatéral équivaudrait pour un Etat doté comme le nôtre à s’exposer et à exposer ses partenaires à la violence et au chantage, ou à s’en remettre à d’autres pour assurer sa sécurité.

Je refuse cette perspective. Et ne soyons pas naïfs : un décrochage de la France, dont l’arsenal ne peut en aucun cas être comparé à celui des Etats-Unis ou de la Russie, n’aurait pas le moindre effet d’entraînement sur les autres puissances nucléaires.

Dans le même esprit, la France n’adhérera pas à un traité d’interdiction des armes nucléaires. Ce traité ne créera aucune obligation nouvelle pour la France, ni pour l’Etat, ni pour les acteurs publics ou privés sur son territoire.

Le désarmement n’a en réalité de sens que s’il s’inscrit dans un processus historique de limitation de la violence.

La stratégie de dissuasion y contribue déjà, même de façon paradoxale. Dans la dissuasion telle que la France la pratique, c’est bien la possibilité de dommages inacceptables pour un adversaire potentiel qui, sans même que la menace en soit proférée, restreint la violence effective.

Reconnaissons cependant que cette rationalité dissuasive ne suffit pas à fonder la paix, au sens plein du terme, c’est-à-dire un état qui ne soit pas une simple inhibition de la violence, mais bien une véritable coopération et une concorde entre tous.

Notre objectif doit être d’œuvrer à l’instauration d’un ordre international différent, avec un gouvernement du monde efficace capable d’établir le droit et de le faire respecter.

Cet objectif de transformation de l’ordre international n’est pas seulement un idéal. Il dessine dès à présent un chemin politique et stratégique qui doit nous permettre de progresser concrètement.

Pour ce faire, il est indispensable de circonscrire le rôle de la dissuasion aux circonstances extrêmes de légitime défense.

Les armes nucléaires ne doivent pas être conçues comme des outils d’intimidation, de coercition ou de déstabilisation. Elles doivent rester des instruments de dissuasion à des fins d’empêchement de la guerre.

La doctrine nucléaire de la France s’inscrit strictement dans ce cadre.

J’appelle les dirigeants des autres puissances nucléaires à faire preuve de la même transparence dans leur doctrine de dissuasion et à renoncer à toute tentation d’instrumentalisation de cette stratégie à des fins coercitives ou d’intimidation.

Voici, Mesdames et Messieurs, ce que je voulais vous dire aujourd’hui sur la place de la France dans le monde, sur son ambition européenne, sur sa stratégie de défense et de dissuasion.
Regardons notre avenir avec lucidité et détermination.

Lucidité, parce que nous ne pouvons faire comme si la mondialisation et les progrès technologiques ne bouleversaient pas les modèles issus du passé. Plus que jamais notre réflexion stratégique doit s’adapter aux soubresauts de notre environnement, tout en s’inscrivant dans le temps long. Ayons le courage de regarder le monde tel qu’il est, tel qu’il va évoluer. Il n’y a pas de fatalité, mais il peut y avoir des erreurs historiques à ne pas vouloir le regarder.

Détermination également : détermination à rester la France, la France fière de son Histoire, la France fière de ses valeurs et respectueuse de ses engagements. La France farouchement attachée à rester maitresse de son destin, au sein d’une Europe refondée pour le bien commun.

Vive la République et vive la France !

Sylvie BERMANN, Présidente du conseil d’administration de l’IHEDN

Par décret du Président de la République en date du 24 janvier 2020, Mme Sylvie BERMANN, ambassadrice de France, est nommée présidente du conseil d’administration de l’Institut des hautes études de la défense nationale. [JORF n°0022 du 26 janvier 2020 – texte n° 25]

© Par Ambassade de France en Chine — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=33368044

Biographie sommaire.

Sylvie-Agnès BERMANN, née le 19 octobre 1953 à Salins-les-Bains (Jura), est une diplomate française de carrière après sa réussite au Grand Concours d’entrée au Quai d’Orsay. Elle est la première femme à avoir été nommée ambassadrice extraordinaire et plénipotentiaire de la République française dans un pays membre permanent du Conseil de Sécurité (Chine, 2011).

Par décret du Président de la République du 19 juin 2019, à la suite de la décision prise la veille en Conseil des ministres, Mme Sylvie BERMANN, ministre plénipotentiaire hors classe, est élevée à la dignité d’ambassadrice de France. [JORF n°0141 du 20 juin 2019 – texte n° 53]
Elle est ainsi la première femme à accéder à la dignité d’État d’ambassadeur de France. Il convient donc d’adapter désormais le vocabulaire en parlant de Madame l’Ambassadrice de France … tout comme celle de Maréchal de France ou d’Amiral de France.

Madame Sylvie BERMANN a occupé précédemment en qualité d’ambassadrice extraordinaire et plénipotentiaire des postes comptant parmi les plus importants du réseau diplomatique de la France :
– Pékin, Chine (2011-2014)
– Londres, Royaume-Uni (2014-2017)
– Moscou, Fédération de Russie (2017-2019), d’ou elle fait valoir ses droits à la retraite.

Décorations honorifiques :
– Officier de la Légion d’honneur
– Commandeur de l’ordre national du Mérite

Sylvie BERMANN a publié en 2017 aux éditions Stock, un excellent ouvrage sur les années qu’elle a passées en Chine dans plusieurs postes différents, pays dont elle est une grande spécialiste : La Chine en eaux profondes.

Pour compléter votre lecture :
L’ambassadrice Sylvie Bermann a la Chine au coeur
L’ambassadrice de France à Londres, Sylvie Bermann
Sylvie Bermann, nouvelle ambassadrice de France en Russie ?
La nouvelle ambassadrice Sylvie Bermann se confie sur sa relation avec la Russie
Sylvie Bermann, première ambassadrice de France

© http://observatoire-de-la-diplomatie.com/sylvie-bermann-premiere-ambassadrice-dignitaire/
© https://www.linkedin.com/in/sylvie-bermann-372934197/

Le SNU en 2019

Le Service national universel (SNU) s’adresse, après la classe de 3e, aux jeunes filles et garçons âgés de 15 à 16 ans. Il comporte obligatoirement une phase de cohésion, en hébergement collectif et hors de son département de résidence de deux semaines et une mission d’intérêt général auprès d’une association, d’une collectivité, d’une structure publique ou d’un corps en uniforme, de deux semaines également. Chaque jeune peut ensuite poursuivre une période d’engagement de trois mois minimum. 

Les débuts du service national universel. Cette année 2 000 jeunes ont expérimenté le SNU dans 13 départements.

Du 16 au 28 juin 2019 a eu lieu la phase de préfiguration du service national universel (SNU). 2 000 volontaires âgés de 15 à 16 ans ont été retenus parmi 4 000 candidats.

C’est un signe que le SNU répond à une attente de la part des jeunes et de leurs familles en quête d’un moment républicain d’engagement et de cohésion.

Ces volontaires sont issus d’horizons différents et sont représentatifs de la jeunesse de France, y compris de celle en situation de handicap. Ils ont vécu deux semaines dans un centre d’hébergement collectif.

Ils ont bénéficié alors de bilans personnels de santé, d’évaluations de la maîtrise de la langue française et de bilans de compétences, notamment numériques.

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Le Service national universel (SNU).

Le Service national universel (SNU) proposera aux jeunes Français, filles et garçons, un moment de cohésion visant à recréer le socle d’un creuset républicain et transmettre le goût de l’engagement.

LES OBJECTIFS DU SERVICE NATIONAL UNIVERSEL

La mise en place d’un Service national universel (SNU) vise à impliquer davantage la jeunesse française dans la vie de la Nation, promouvoir la notion d’engagement et favoriser un sentiment d’unité nationale autour de valeurs communes.

Le groupe de travail sur le SNU a proposé un dispositif opérationnel soumis à l’arbitrage des pouvoirs publics. Il indique l’ensemble des éléments clés nécessaires et trace le chemin qui pourrait conduire à ce déploiement.

Le SNU n’est pas le rétablissement du service militaire, suspendu en 1997.

Les objectifs assignés au SNU sont au nombre de trois :

  • Cohésion sociale et territoriale ;
  • Prise de conscience, par chaque génération, des enjeux de la défense et de la sécurité nationale ;
  • Développement de la culture de l’engagement.

Le SNU doit favoriser le brassage social et territorial et permettre à chaque jeune d’être acteur de sa citoyenneté.

Il s’agit de construire un projet de société qui vise à la transformer en impliquant les jeunes générations. Ces dernières seront à la fois les bénéficiaires et, en partie, les organisateurs de ce projet.

Sa conception devra donc être collective. Une large place devra être accordée à l’innovation pour rendre ce dispositif attractif, et qu’il puisse donner lieu à une réelle reconnaissance de l’engagement.

Il ne saurait, enfin, être question de définir un parcours rigide et obligatoire, qui ne répondrait ni aux objectifs des pouvoirs publics ni aux attentes de la jeunesse.

LES GRANDS PRINCIPES DU SERVICE NATIONAL UNIVERSEL

Le Gouvernement a validé les grands principes d’architecture proposés par le groupe de travail, et notamment son organisation en deux phases distinctes.

La première phase du SNU, dans le prolongement de l’obligation scolaire, constituera l’aboutissement du parcours citoyen, débuté à l’école primaire et poursuivi au collège. Effectuée aux alentours de 16 ans, elle sera d’une durée d’un mois maximum et comportera une période d’hébergement collectif.

Vécue par une classe d’âge entière quels qu’en soient l’origine, le sexe, le milieu ou le territoire, cette phase comprendra une occasion de vie collective permettant à chaque jeune de créer des liens nouveaux, d’apprendre une façon neuve de vivre en commun, de développer sa culture d’engagement pour affermir sa place et son rôle au sein de la société. Elle sera aussi l’occasion de détecter les difficultés de certains jeunes (lecture, santé, insertion, etc.) et d’y remédier par une orientation vers les dispositifs adaptés.

Dans un second temps, chaque jeune sera encouragé, notamment par des mesures d’attractivité variées et ciblées, à poursuivre volontairement une période d’engagement d’une durée d’au moins trois mois, liée à la défense et la sécurité (engagement volontaire dans les armées, la police, la gendarmerie, les pompiers, la sécurité civile), à l’accompagnement des personnes, à la préservation du patrimoine ou de l’environnement ou encore au tutorat, sans que cette liste soit limitative. L’offre des différentes opportunités d’engagements, civils ou militaires, intégrera les volontariats existants et des propositions nouvelles, y compris celles qui émaneront des jeuneseux-mêmes. À titre d’exemple, l’actuel service civique sera l’un des moyens d’accomplir cette seconde phase du SNU.

INJEP. Évaluation de la phase de préfiguration du Service national universel Premiers enseignements des séjours de cohésion de juin 2019.

Autre documentation :

© Gouvernement.fr

Conférence : Rochefort et la déportation – 75e anniversaire de la libération des camps

  • par l’AFMD-DT17, Amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation, lectures, chants, projection et témoignages
  • et l’exposition « Rochefort et la déportation : hommage aux familles Juives rochefortaises victimes de la déportation » par le Service commun des archives
  • le 27 janvier 2020 à 18 heures au Palais des Congrès à Rochefort

Conférence : Mémoires d’un officier de marine négrier

  • par Louis-Gilles PAIRAULT – archiviste paléographe, conservateur en chef du patrimoine, directeur des Archives départementales de la Charente-Maritime
  • et Albert-Michel LUC, docteur en histoire, inspecteur honoraire de l’Education nationale
  • le jeudi 30 janvier 2020, à 18 h, au Service historique de la Défense, enclos de Martrou, 4, rue du Port, à Rochefort.
« …Leur chef parvint à les faire taire et décida que nous serions de suite, et sous bonne garde, conduits à la ville ; une partie d entre eux s empara donc de mon compagnon, qui était tombé à terre de faiblesse et de peur, et ils sortirent du fort ; comme ils passaient la barrière, un nègre de derrière, levant son fusil, l’ajusta ; le coup manqua, un autre voulut y suppléer par un pistolet qui rata aussi ; ses protecteurs, car il en avait dans les mulâtres surtout, menacèrent les nègres, et pendant qu’ils s en allaient, ceux restant se querellèrent, firent avec leurs armes plusieurs gestes menaçants, prirent des tisons allumés… »
– C’est ainsi que Polony raconte l’arrestation qui faillit lui coûter la vie, au moment de l’insurrection des esclaves de Saint-Domingue (actuelle Haïti) en 1791.
– Écrit dans un style alerte, souvent émouvant, parfois sentimental, les mémoires de Claude-Vincent Polony constituent un témoignage rare et passionnant sur la traite négrière et sur la vie d’un officier de marine à la fin du XVIIIe siècle.
– Conservé aux Archives départementales de la Charente-Maritime, ce manuscrit n avait jamais été publié.
Claude-Vincent Polony (1756-1828) est l’un des derniers officiers négriers français. Originaire de Rochefort (Charente-Maritime), orphelin de peu de fortune, il entre d’abord dans la marine de guerre et participe à la guerre d’indépendance américaine. La paix revenue, le jeune officier se tourne vers un commerce alors florissant : la traite négrière. Il effectue trois campagnes de traite entre le golfe de Guinée et Saint-Domingue. Il raconte alors les dangers de la navigation, les maladies et les décès, les longues tractations avec les courtiers, une révolte d’esclaves, sa rencontre avec une princesse capturée, les difficultés de la revente, ses escales périlleuses à Saint-Domingue, en Guyane ou aux Antilles… De nouveau dans la marine militaire durant les guerres de la Révolution et de l’Empire, il mène activement la guerre de course, parcourt les côtes d Amérique et des Caraïbes, approche de nombreux personnages célèbres (Billaud-Varenne, Carrier, Collot d’Herbois, Philippe-Egalité…), participe au camp de Boulogne décidé par Bonaparte pour envahir l’Angleterre… C est même lui, ironie de l’histoire, qui apporte en Guyane le décret d’abolition de l’esclavage.

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Sèvres 1920 – Lausanne 1923 ou le poids de l’Histoire sur le monde contemporain

Chers amis, 
Si vous vous intéressez aux questions du Moyen-Orient et souhaitez en découvrir les racines profondes, je vous invite à assister à la conférence que je donne le mercredi 22 janvier à 17 h dans la bibliothèque du Muséum d’histoire naturelle de La Rochelle.
Titre: Sèvres 1920 Lausanne 1923 ou le poids de l’Histoire sur le monde contemporain.
L’analyse de ces deux traités qui mirent fin à la guerre avec la Turquie éclaire les événements actuels et explique les positions du président Erdogan.
Entrée libre et gratuite. Arrivez de bonne heure.
Vous avez l’affiche en PJ.
Je compte sur vous.
Amitiés.
Philippe MOUNIER

Meilleurs vœux pour 2020

En avant pour la Victoire !

Chères amies, chers amis,
Je sacrifie une fois encore à la tradition.
Je remercie tout d’abord tous ceux qui se sont déjà exécutés dans le respect des usages
C’est avec grand plaisir que je viens présenter au comité Aunis-Saintonge, dans sa plénitude, tous mes souhaits de Joyeux Noël et de Bonne et Heureuse Année 2020.
Que cette année nouvelle soit pour vous emplie de tout ce que vous souhaitez de meilleur. En faire la liste serait trop long. Mais le cœur y est.
[…] que cette année voit notre victoire dans tout ce que nous entreprendrons et le maintien de notre amitié et de notre cohésion.
Avec toutes mes amitiés.
Philippe MOUNIER

Carré militaire de Saint-Éloi de La Rochelle

Sur la photo (premier en partant de la gauche), notre camarade l’IHEDN Christian Barbe, trésorier départemental du Souvenir français.
Crédit photographique : reporterunpdlp@orange.fr Pierre Le Droumaguet UNP 170

Comme chaque année à la Toussaint le Souvenir français bravant la tempête a rendu hommage aux 168 Morts pour la France reposant au cimetière Saint-Eloi de La Rochelle lors d’une cérémonie en présence des Autorités civiles et militaires.

Merci à Madame Aurélie Aubry et aux services techniques de la Ville de La Rochelle, à l’ONACVG représenté par sa directrice, au Comité de coordination de l’Entente patriotique, aux élus, aux anciens combattants, aux porte-drapeaux et à toutes celles et ceux qui se sont joints au Souvenir français pour écouter le message du Président national, le Contrôleur général des armées Serge Barcellini et se recueillir devant les tombes rénovées par les jeunes du Service Militaire Volontaire à l’heureuse initiative du nouveau Délégué Militaire Départemental adjoint soucieux de sauvegarder notre mémoire.

Christian BARBE, délégué honoraire et trésorier départemental.
Membre associé IHEDN du Comité Aunis-Saintonge.